Macre (Potager d'un curieux, 1899)

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Maca
Potager d'un curieux, Introduction
Mangaride


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Noms acceptés : Trapa bicornis, Trapa natans (y compris var. bispinosa)


MACRE À DEUX CORNES


Ling-Kio.


Trapa bicornis L. fil.


Fam. des Onagrariacées.


Plante aquatique annuelle. Tige grêle ; feuilles, les unes submergées, réduites à l'état de lanières linéaires, les autres en rosettes flottant à la surface de l'eau, à pétiole assez long, d'abord cylindrique, puis vésiculeux vers leur milieu, au moment de la floraison, à limbe en forme de losange, entier ou à peine deuté. Fleurs blanches, petites, brièvement pédonculées, placées à l'aisselle des feuilles supérieures; calice à deux divisions accrescentes, devenant plus tard les cornes du fruit ; corolle à quatre pétales ; étamines au nombre de quatre ; style grêle, terminé par un stigmate capité.


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Fruit ligneux, à deux cornes opposées, épaisses, obtuses, recourbées au sommet.

« Le grand lac Talo est célèbre par son fruit aquatique nommé Linkio. Ce fruit ressemble un peu au Tribulus « ad instar triangularis pyramidis undequaque prominens ». Son écorce est verte, épaisse, rougeâtre aux pointes et devient noire en se desséchant. Sa subs-

Fig. 45. — Trapa bicornis.

tance intérieure est très blanche ; sa saveur est celle de la Châtaigne « magnitudine tres quatuorve castaneas æquat ». La plante est cultivée dans les eaux stagnantes de toute la Chine. » (Martini, Novus atlas sinensis, 1655).

« Elle a de petites feuilles qui flottent à la surface de l'eau, à l'extrémité de très longues tiges. Les fruits, nombreux, restent cachés sous l'eau. Cultivé sur une grande échelle dans les lacs et dans les rivières de la Chine septentrionale. » (Roxburgh, Flora indica).

Robert Fortune rapporte qu'il a vu récolter les fruits de Ling-Kio : « Étant revenu pour quelque temps à Shanghaï, je résolus de pénétrer, s'il m'était possible,


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dans le district de Kwey-chow-Foo. En remontant la rivière dans la direction du sud-ouest, j'arrivai, peu après avoir dépassé Kea-Hing-Fo, cité d'environ 270.000 habitants, à un immense étang qui, je le suppose, communique avec le célèbre Taï-Ko. L'eau était très peu profonde et couverte de Trapa bicornis, que les Chinois nomment Ling, et dont le fruit, de forme assez bizarre, comme on le sait, ressemblant assez à une tête de bœuf armée de ses deux cornes, est très estimé en Chine. J'en observai là trois variétés bien distinctes, dont une qui donne un fruit d'une belle couleur rouge.

« Des femmes et des enfants, en grand nombre, naviguaient dans de petits batelets de forme circulaire, à peu près comme nos cuviers à lessive, et étaient occupés à pêcher le Ling. Au fait, on ne pourrait rien imaginer de plus convenable pour ce genre de travail que ces singulières embarcations qui, assez vastes pour contenir le pêcheur et tout le produit de sa pêche, se dirigent tout doucement au milieu de toutes les plantes sans les briser. La vue de cette immense quantité d'individus naviguant ainsi sur ce marais, chacun dans son cuvier, formait pour moi un coup d'œil des plus divertissants. »

« Le Trapa bicornis, dit un autre voyageur, M. Marchal, de Lunéville (1), est très estimé en Chine. Il forme la nourriture des populations où la récolte du Riz est insuffisante. Leur cueillette rappelle les vendanges en France. On sème le Ling à la fin de l'automne, dans les parties des étangs où l'eau est peu profonde, où elle est claire et dans les endroits les plus exposés au midi.

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(1) Voir l'ouvrage intitulé : De l'amidon du Marron d'Inde, Ad. Thibierge et Dr Remilly, 1857.


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Les Chinois assurent que cette culture absorbe les émanations putrides qui s'élèvent à la surface des eaux stagnantes. Si la récolte est très abondante, on donne le Trapa aux oiseaux de basse-cour ; ceux-ci engraissent promptement et leur chair acquiert un goût exquis. »

Cent ans se sont écoulés depuis que l'abbé Grosier, que nous citons plus loin au sujet du Pitsi, Heleocharis tuberosa, auquel, comme Duncan, il donna le nom de Châtaigne d'eau, recommandait la culture du Ling-Kio (Trapa bicornis). « Nous avons et nous négligeons, disait-il, dans quelques provinces de France, une espèce de Châtaigne aquatique que les Latins ont nommée Tribulus. Les missionnaires pensent que cette plante pourrait être celle que les Chinois appelent Ling-Kio et dont ils tirent un très grand parti ; si cette idendité était constatée, il serait facile d'en étendre partout la culture, qui offrirait une ressource nouvelle dans les temps de disette :

« 1° Cette autre Châtaigne d'eau, le Ling-Kio, est un fruit rafraîchissant, agréable en été. Lorsqu'il est vert, ou le vend à Pékin, sur les marchés, comme les Noisettes en Europe ;
2° Séché et réduit en farine, il donne une très bonne bouillie, surtout lorsqu'on y joint un peu de farine de Froment ; on peut même en mêler un tiers dans la farine dont on fait le pain ;
3° Cuit au four, confit au sucre ou au miel, il devient une nourriture saine et agréable ;
4° Il fournit un aliment convenable pour les oies, les canes et autres oiseaux de basse-cour.
La culture du Ling-Kio n'exige aucun soin. Cette


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plante se reproduit d'elle-même dans tous les lieux où elle existe. Quand on veut la lancer dans un étang, dans un ruisseau, on jette la graine à la fin de l'automne dans la partie de l'étang où l'eau est peu profonde. Il faut choisir un endroit où l'easoit claire, et le rivage tourné au midi. Plus le Ling-Kio reçoit de chaleur, plus il est sain, savoureux, et plus il donne de fruits. »


MACRE À DEUX ÉPINES


Singhara.
Trapa bispinosa Roxb., Pl. of the Coast of Coromandel, pl. 234.

Cette espèce diffère de la précédente par son fruit à cornes droites, à pointe aiguë, et par ses feuilles dentées.

Elle croît dans l'Asie centrale et méridionale, où on

Fig. 46. — Trapa bispinosa.

la nomme Singhara, jusqu'à Ceylan et au Japon ; on la rencontre aussi dans le sud de l'Afrique, jusqu'au Zambèse. Ses fruits sont souvent convertis en amidon, on en peut faire aussi des gâteaux et des soupes d'un excellent goût, on peut les emmagasiner et les conser-


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ver pour s'en nourrir. La production est abondante et économique, la plante se ressemant spontanément. Elle vit plusieurs années. Dans quelques contrées, dans le Cachemire par exemple, les fruits du Trapa constituent pour la population un approvisionnement alimentaire important. A cette espèce appartiennent probablement le Trapa cochinchinensis Lour. et le Trapa incisa Sieb. et Zucc.

M. L. Bouley, directeur des jardins du Maharadja de Cachemire, à Srinagar, a publié, dans la Revue horticole (16 mars 1884), l'intéressante note suivante :

« Les Trapa natans et bicornis (1) sont en si grande quantité dans les lacs du Cachemire et y croissent avec une telle vigueur que les parties où ces plantes se trouvent ont l'aspect d'immenses prairies plutôt que d'un lac ; aussi est-il impossible d'y naviguer, même avec la plus frêle embarcation.
Les produits que donnent ces deux plantes sont considérables ; à l'automne, la récolte occupe des milliers de gens.
Avant de les livrer à la consommation, ces Châtaignes sont passées sous des pilons qui les débarrassent de leurs enveloppes ligneuses et piquantes, et sont ensuite moulues. La farine grossière qu'on en retire est consommée en bouillie.
Cette farine est vendue très bon marché, ce qui s'explique par l'absence des frais de culture ; aussi, la consommation qui s'en fait pendant tout l'hiver est-elle énorme. On voit tous les jours de grands bateaux chargés de fruits de Trapa qui arrivent à Srinagar. »

M. Ermens, prédécesseur de M. Bouley dans les

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(1) C'est certainement du Trapa bispinosa qu'il sagit.


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fonctions de directeur des cultures du Maharadja et qui a longtemps habité le Cachemire, nous a très obligeamment fourni les détails complémentaires suivants sur la culture du Singhara :

« Après une grande famine, le gouverneur du district dans lequel est le Woorlake y introduisit la culture du Trapa. Ce lac, qui mesure au moins 2,000 hectares, en est tellement rempli que la navigation y est impossible. On recueille les fruits par bateaux entiers, et le gouverneur en tire un grand profit, car chaque cultivateur lui paie une redevance. Il s'en fait une très grande consommation et, dans les dernières famines, cette récolte a sauvé la vie d'un grand nombre d'habitants.
A l'état frais, on consomme les fruits du Trapa comme les Noix, cuits à l'eau ; c'est un aliment usuel. Il est très indigeste, et les Hindous, pour obvier à cet inconvénient, placent sur leur estomac une chaufferette nommée kangreii, qui, selon les médecins du pays, facilite la digestion ; d'où il suit que leur estomac est noirci et comme fumé par ce procédé. »

Les notes qui précèdent ont été publiées par nous, en 1888, dans le Bulletin de la Société nationale d'Acclimatation ; peu de temps après, M. P.-L. Simmonds, F. L. S., dont le nom est connu de tous ceux qui s'occupent de botanique appliquée, nous adressait un exemplaire du Journal of the Society of the Arts, numéro du 31 août 1888, contenant un article signé de lui et intitulé : Plantes aquatiques alimentaires. Nous y avons trouvé des détails qu'il nous parait utile de reproduire :

« Dans le dernier numéro du Bulletin de la Société d'Acclimatation de Paris a paru, sur les plantes aquatiques alimentaires, un article qui mérite l'attention par la


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nouveauté des renseignements qu'il fournit, et auquel, tout en y prenant un ou deux passages, je puis ajouter quelques détails supplémentaires qui seront intéressants.
On dit que le Trapa natans formait une grande partie de la nourriture des anciens Thraces, comme, de nos jours, le Trapa bispinosa pour les habitants du Cachemire et le T. bicornis pour les Chinois. Le Dr Royle dit que le premier produisait jusqu'à 12,000 livres par an de revenu au gouvernement de Runje Singh, la taxe étant prélevée sur 96,000 à 128,000 charges d'ânes, du grand lac de Oaller.
A Gugerat, ses fruits forment un important article alimentaire. Aux jours de fête, on en fait une teinture rouge que l'on mélange avec une couleur jaune tirée des fleurs du Butea frondosa.
Le colonel Sleeman a donné sur le Trapa bispinosa l'intéressante relation qui suit, dans ses Voyages dans les provinces du Sud-Ouest : « Ici, comme dans la plupart des autres parties de l'Inde, les réservoirs sont gâtés par la Châtaigne d'eau (Singhara), qui est partout plantée et cultivée dans des champs couverts d'eau, d'une grande étendue, aussi régulièrement que l'est le Blé ou l'Orge sur les plaines sèches. Elle est cultivée par une classe d'hommes appelés « Dheemurs », qui sont partout des pêcheurs et des porteurs de palanquin. Ils ont des bateaux pour planter, sarcler et récolter le Singhara. Les tenures de chaque cultivateur sont soigneusement indiquées par de longs Bambous enfoncés dans l'eau, et ils payent tant l'acre pour la partie qu'ils cultivent.
Les longues tiges de la plante atteignent la surface de l'eau, sur laquelle flottent leurs feuilles vertes, et leurs fleurs d'un blanc pur s'épanouissent agréablement au


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milieu d'elles, dans la dernière partie de l'après-midi. Les noix croissent sous l'eau, après que les fleurs se sont flétries. Elles sont de forme triangulaire et couvertes d'un tégument brun, grossier, adhérant fortement à l'amande, qui est blanche, comestible et d'une texture fine et serrée.
Ces noix sont très estimées. Elles sont portées au marché à dos de bœuf, souvent à 200 ou 300 milles. Elles mûrissent à la fin des pluies de septembre et peuvent être mangées jusqu'à la fin de novembre.
Le loyer payé pour un réservoir ordinaire est d'environ 100 roupies (L. 10) par an. J'en ai connu un très grand pour lequel on payait 200 roupies et même 300 (L. 30) par an ; mais la vase s'accroît si rapidement par la culture, qu'elle détruit promptement tout réservoir dans lequel elle est permise ; et, là où l'on croit désirable de conserver le réservoir pour en utiliser l'eau, elle doit être expressément prohibée. » Des colliers faits avec les noix du Singhara sont vendus à Benarès et considérés comme sacrés.

« Le capitaine J.-P. Pogson, de Simla, se fit, il y a quelques années, l'avocat d'une culture et d'un emploi plus étendus de cette plante : « Ayant l'exemple du Cachemire sous nos yeux, dit-il, il est très singulierque les réservoirs si vantés, les grands lacs et la mer intérieure d'eau douce de la Présidence de Madras, et aussi les immenses « Vheels » des provinces nord-ouest et ouest ne soient point régulièrement employés d'une manière plus profitable parla culture du Singhara. Les noix séchées se garderaient, je crois, bien des années et se vendraient toujours en Angleterre comme Arrow-root ou fécule de Singhara, pour l'alimentation ou pour des emplois industriels. Tout vieux magasinage de Singhara pourrait être ainsi transformé et vendu.


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Comme le grain de Blé, l'amande du Singhara peut soutenir la vie de l'homme pendant un temps déterminé et est agréable au goût, assaisonnée avec du sel et du poivre, ou en soupe (porridge) avec du sucre, « ghoor ou jaggery » (1). Si les amandes sont cassées en petits morceaux, elles peuvent être réduites en farine au moyen d'un moulin à main, et le produit peut être pétri en une pâte dont on fait des petits « chuppaties » ou des gâteaux.
En faisant tremper les amandes une nuit dans l'eau froide, il suffit, le matin suivant, de les faire bouillir pour en faire un aliment. Les cuire à la vapeur serait peut-être aussi bien, peut-être mieux, mais je n'ai encore essayé les amandes trempées que bouillies. J'ai mangé, il y a quelques années, un « Hulwa » fait de farine de Singhara, et il était plus agréable que celui qui est fait de fleur de farine de Blé.
La Présidence de Madras possède d'anciens et magnifiques ouvrages hydrauliques, le réservoir de Viranum(2), d'une étendue de 35 milles carrés, avec 12 milles de digues ; le réservoir de Cauverypank, dont les digues, de 4 milles, sont consolidées avec des pierres dans toute leur longueur ; le réservoir de Chembrumhankam, semblable à une pittoresque mer intérieure, ouvrage dont l'exécution remonte à des temps inconnus. Le premier de ces lacs artificiels a 22,400 acres de surface, et le troisième, comparé à une mer intérieure, peut avoir dix fois cette étendue. C'est un fait officiellement cons-

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(1) Le « ghoor » est le résidu du sucre de l'Inde ; le « jaggery » est le résidu du sucre de Chine.

(2) Le mot anglais tank ne peut être traduit que par le mot réservoir, qui cependant n'est pas applicable, en français, aux étangs, lacs, mers intérieures, c'est-à-dire aux vastes étendues d'eau dont il s'agit ici.


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talé, qu'au Cachemire 30,000 créatures humaines se nourrissent de la noix de Singhara pendant cinq mois par an, et si la pittoresque mer intérieure dont nous parlons mérite son nom, son lit et la surface de son eau pourraient être utilisés d'une manière profitable par la culture du Singhara. Le réservoir de 35 milles carrés pourrait devenir une pépinière de première classe pour approvisionner Madras de noix pour semence.
Le rendement de la Noix d'eau, par acre, est, jusqu'à présent, inconnu ; mais, en supposant la récolte de 4 quarlers (480 livres) chacun d'amandes de noix par acre, les 22,400 acres donneraient 43,800,000 livres d'aliment, et, en comptant 60 livres par adulte et par mois, la quantité ci-dessus suffirait pour nourrir 716,800 personnes pendant un mois, ou 143,360 pendant cinq mois.
Le coût de cet abondant et permanent approvisionnement alimentaire serait insignifiant. Il y a 4,000 yards carrés dans un acre et, en accordant une noix de semence par yard, le prix des noix et du transport par chemin de fer pourrait être facilement calculé. La récolte de la première année ferait plus que couvrir les frais, et on aurait ensuite à perpétuité une moisson qui n'aurait plus à couvrir que les frais de surveillance, de garde et de récolte.
La récolte appartenant à l'État, on obtiendrait un revenu considérable par la vente des noix, même si les amandes ne se vendaient qu'à moitié prix du Riz ou d'un autre grain.
Dans les bonnes années, les populations agricoles feraient largement usage de cet aliment nourrissant et économique, et vendraient et ex porteraient leurs récoltes de Riz, etc., et dans les mauvaises années de famine, la récolte de noix serait une ressource ; enfin, leur pré-


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sence aurait une grande influence pour prévenir la production artificielle de famine locale.
Les noix, une fois semées, se ressèment d'elles-mêmes, de sorte que leyard carré pourrait bientôt produire neuf plantes ou davantage. La mer intérieure, lorsqu'elle sera couverte de ces noix, sera une source de richesse pour l'État et un profit pour le public. Comme l'extension annuelle, spontanée ou artificielle de la culture est une chose très simple, le gouvernement de Madras se trouverait en quelques années propriétaire d'une plantation de Singhara de grande valeur. »

Le capitaine Pogson, écrivant de Simla, dit encore :

« La Noix Singhara de l'Inde et de l'Europe étant une plante aquatique vivace, les vieilles racines portent du fruit annuellement. Si elles croissent dans une eau profonde de 2 pieds, on entre dedans pour les recueillir, en allant de l'une à l'autre, et on les dépose dans un récipient flottant, comme, par exemple, une barrique de 5 gallons. Si l'eau est plus profonde, on devra employer n'importe quel radeau ou canot et cueillir les noix.
Eh ce pays-ci (l'Inde), on les recueille plusieurs fois pendant la saison, et les dernières récoltées, c'està-dire celles qui sont les plus grosses et dont les amandes sont dures, se mangent bouillies. D'autres sont pelées, séchées et réduites en farine, tandis que d'autres sont enterrées entières, pour être employées comme semence l'année suivante. Par exemple, la mare ou.la dépression du sol qui a fourni une récolte de noix peut se dessécher par le temps chaud ; au commencement des pluies, cet endroit redeviendra une mare ; les noix pour semence seront alors déterrées et semées à 12 pouces de distance dans l'eau encore un peu profonde, en plaçant chaque noix à environ 2 pouces de


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profondeur dans le sol submergé, et on continue à semer ainsi chaque jour, à mesure que les eaux montent. Les noix germeront en leur temps et fourniront la récolte de l'année.
Naturellement, si l'eau ne tarissait pas, les vieilles racines vivraient et, dans la saison, donneraient une nouvelle pousse de tiges qui porteraient du fruit comme à l'ordinaire. Il s'ensuit que, lorsqu'on veut une récolte perpétuelle, il faut semer les noix dans le lit d'une mare d'eau douce, peu profonde, ne se desséchant jamais. »


MACRE VERBANAISE (1) Lagana.
Trapa natans L., var. verbanensis Jaggi.

Sous le nom de Trapa verbanensis, De Notaris a décrit une plante qui croît dans le lac Majeur et dont le fruit n'a que deux cornes obtuses et non barbellées.

M. Jaggi, dans une note qu'il a publiée sur les Macres (2), établit d'une manière très nette qu'il s'agit tout simplement d'une variété du Trapa natans dont les cornes médianes sont avortées.

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(1) Nous avons présenté les fruits de cette espèce dans l'une des séances de la Société botanique de France (Bull. Soc. Bot., 1888), comparativement avec des fruits de Trapa natans ne présentant que trois cornes. La parenté entre ces deux plantes ne fait aucun doute pour nous.

(2) Die Wassernuss (Trapa natans L.) und der Tribulus der Alten. Zurich, 1883.


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Nous ne pouvons reproduire ici toutes les raisons qu'il donne à l'appui de sa thèse ; mais l'une des plus probantes est certainement ce fait que l'on trouve dans le même lac des fruits tantôt à deux, tantôt à trois cornes, mêlés avec le Trapa natans à quatre cornes. On trouve donc toutes les gradations de l'avortement.

Fig. 47. — Trapa verbanensis.

M. le professeur Gibelli, de Bologne, qui a transplanté le T. verbanensis à Modène, a obtenu des fruits pourvus tantôt de deux, tantôt de trois cornes.

Leysser, Mertens et Koch, dans leur flore de Halle ; Boehling, dans sa flore d'Allemagne, disent que le Trapa natans présente quelquefois des fruits à deux cornes. Ils n'ont pas pensé qu'il y eut lieu de faire une espèce de cette variété. Quant au caractère tiré des cornes qui sont obtuses, il n'a également que peu


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d'importance, car on trouve parfois des Macres à quatre cornes plus ou moins arrondies au sommet.

Les essais de culture faits à Modène prouvent que le

Fig. 48. — Trapa verbanensis.

Feuille vue en dessous, et jeune fruit, de grandeur naturelle.

Trapa verbanensis se reproduit au moins pendant quelque temps.

Voici les renseignements que nous avons recueillis


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sur cette variété. Nous les devons à M. Rovelli, président de la Société horticole verbanaise de Pallanza ; à M. D. Lamperlico, secrétaire du Comice agricole de Vicence, qui a bien voulu consulter pour nous M. le professeur Saccardo, de l'Université de Padoue, et à M. le Dr Mattirolo, de l'Université de Turin.

Le Trapa verbanensis se nomme Lagana sur le lac Majeur et sur le lac de Varèse, et vulgairement aussi Châtaigne du lac et Châtaigne d'eau (Castagna del lago, Castagna d'acqua).

On le trouve en grande quantité dans la baie d'Angera, lac Majeur, là où le fond est visible.

Il végète admirablement sans aucun soin dans les jardins botaniques ; il est un peu moins productif que le Trapa natans.

Ses fruits mûrissent à la fin d'octobre, époque à laquelle on s'en procurerait aisément.

On les mange, soit verts comme des Noisettes, soit cuits ; ils exigent un assez longtemps de cuisson.

Ils ne sont pas très recherchés ; on les rencontre rarement sur les marchés.

Avec ces mêmes fruits, on confectionne des chapelets que l'on vend fréquemment à Arona, à Varèse, etc.

Nous avons immergé dans une mare des pieds enracinés de la Macre verbanaise que nous avait offerts M. Latour-Marliac, de Temple-sur-Lot. Ils ont bien végété et nous ont donné quelques fruits verts, le 15 septembre, époque à laquelle M. Lalour-Marliac obtenait, de son côté, une certaine quantité de fruits mûrs.

Le Trapa verbanensis a les feuilles plus grandes que celles du T. natans, bien connu dans nos régions de


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l'Ouest. Ses pétioles sont rouges; la variété est plus belle que le type.

Il existe une autre variété de Trapa natans que Areschoug a nommé T. natans, var conocarpa (1). Elle est originaire du lac Immeln, à Shonen, en Suède, et diffère du type par la façon dont s'insèrent les cornes, qui sont peu cohérentes, les latérales se détachant du fruit à mi-hauteur, les médianes au quart inférieur : le fruit est donc nu sur une grande partie de sa hauteur.

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(1) Mémoires de l'Académie royale des Sciences de Stockholm, 1874.