Ciboule catawissa (Potager d'un curieux, 1899)

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Chucklusa
Potager d'un curieux, Introduction
Claytone perfoliée


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Nom accepté : Allium proliferum


CIBOULE CATAWISSA


Oignon Catawissa.


Allium fistulosum L., var.


Fam. des Liliacées.


Très grande Ciboule, vivace, bulbifère, c'est-à-dire produisant de petites bulbilles au lieu de fleurs, à la manière de l'Oignon Rocambole. Plantées au printemps ou à l'automne, car la plante est parfaitement rustique sous le climat de Paris, ces bulbilles donnent, la première année, des pieds à deux ou trois tiges surmontées de bulbilles qui, à peine constituées, développent elles-mêmes des tiges nouvelles couronnées de nouvelles bulbilles, lesquelles donnent très fréquemment naissance à un troisième étage de pousses, le tout s'élevant de 0m,75 à 0m,80.

Après un an ou deux ans, la végétation se modifie. Les touffes deviennent très vigoureuses, se composant de vingt à trente montants, dont chacun porte dix à vingt bulbilles, mais développant beaucoup moins souvent des tiges secondaires.

Le goût des bulbes et des pousses est à peu près celui de la Ciboule commune. Les bulbilles peuvent aussi être consommées, après en avoir cependant enlevé la


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première enveloppe, qui est très dure (Vilmorin-Andrieux et Cie).

L'Oignon Catawissa a été considéré jusqu'ici comme étant d'origine américaine, mais tout récemment, en parcourant le livre du docteur E. Bretschneider, intitulé : Early european researches into the Flora of China,

Fig. 17.— Ciboule Catawissa (Allium fistulosum).

Port de la plante.

nous avons eu la satisfaction de découvrir sa véritable patrie.

Un Français, nommé Louis Le Comte, jésuite, missionnaire en Chine en 1687, publia à Paris, en 1696, un ouvrage en deux volumes, intitulé : Nouveaux mémoires sur l'état de la Chine.

L'auteur, né en 1655, mourait à Bordeaux, en 1729.

Le Comte parle (1, 178) d'un Oignon chinois particulier dans les termes suivants : « J'y ai vu une espèce d'Oignon qui ne vient point de graine comme ceux


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d'Europe, mais, à la fin de la saison, on voit sortir de petits filaments sur la pointe ou sur la tige des feuilles,

Ciboule Catawissa.

Fig. 18. — Plante entière. Fig. 19. —Inflorescence.

au milieu desquelles se forme un Oignon semblable à celui qui germe dans la terre. Ce petit Oignon pousse avec le temps des feuilles comme celles qui le soutiennent, de manière néanmoins que leur grosseur et leur


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hauteur diminuent à mesure qu'ils s'éloignent de la terre. »

Cette description ne serait sans doute pas suffisamment probante, si le docteur Bretschneider n'ajoutait ce qui suit : « Cet Oignon paraît être celui qui avait été décrit sous le nom de Lou tz'tsung (Oignon poussant en étages), dans le Kiu huang pen ts'ao, publié à la fin du XIVe siècle. On y trouve aussi une bonne figure.

La description porte qu'au sommet des feuilles poussent de quatre à cinq petits Oignons, et que sur ceux-ci d'autres Oignons se produisent encore, formant ainsi de trois à quatre étages. Ces Oignons ne donnent pas de graines. »

L'Oignon Catawissa a été importé d'Amérique par M. A. de Lentilhac aîné, et mis en vente par M. Gagnaire fils aîné, horticulteur à Bergerac. Nous l'avons cultivé dès qu'il a été introduit et nous dirons plus loin ce que nous en pensons. M. Gagnaire s'exprime ainsi dans la Revue horticole, année 1875, page 57 :

« Personne n'ignore que l'Oignon qui se mange en vert au printemps, à Paris comme en province, est, d'un côté, le résultat des semis que les jardiniers exécutent dans le courant du mois d'août, tandis que, de l'autre, et notamment dans notre région, l'Oignon vert est obtenu en mettant en terre, en septembre et octobre, des bulbes impropres à la consommation, qui, au printemps, émettent trois ou quatre tiges vertes, quelquefois plus, que l'on détache de la souche selon les besoins de la maison ou de la vente.
Quels que soient les moyens employés, il n'en reste pas moins avéré qu'il faut semer, repiquer et planter annuellement à l'automne l'Oignon que l'on veut consommer en vert au printemps ; et si, d'un autre côté, il s'agit d'obtenir au jardin du petit Oignon pour confire, je n'ai pas à dire les soins que ce travail exige,


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sans compter qu'il n'est pas toujours facile d'arriver à des résultats satisfaisants. Or, avec l'Oignon Catawissa, ces inconvénients disparaissent, puisqu'il possède la faculté de donner à chaque printemps, et pendant trois ou quatre ans, des Oignons verts en abondance, en été des bulbilles en quantité pour confire, et qu'il ne demande d'autre culture que celle que je vais signaler.
L'Oignon Catawissa est une plante potagère, à souche vivace, émettant à la base, au printemps, de vingt à trente tiges, grosses comme des Poireaux, longues, tendres et excellentes à manger en vert ; plus précoce d'une quinzaine de jours ou même d'un mois que les Oignons plantés à l'automne. On le multiple de bulbilles que l'on met en place depuis le mois d'octobre jusqu'en février et que l'on traite de la manière suivante : « Le terrain destiné à l'Oignon Catawissa ayant été travaillé et copieusement amendé préalablement à l'aide d'une forte couche de fumier ou d'engrais, on trace au cordeau plusieurs sillons espacés de 0m,40 à 0m,50 chacun, dans lesquels on place les bulbilles, que l'on distance également de 0m,40 à 0m,50 les unes des autres. Cette distance, de laquelle on peut tirer aisément parti la première année en cultivant entre les rangs des Chicorées, des Laitues, des Carottes, etc., est indispensable par la suite à cause du développement que ne manquent pas de prendre les souches à la deuxième année de plantation. Les bulbilles mises en terre d'octobre à février pousseront vigoureusement au printemps, mais elles ne donneront cette première année qu'une seule tige, que l'on maintiendra à l'aide d'un petit tuteur. Dans le courant de l'été, celle tige produira au sommet un ou deux étages de bulbilles que l'on utilisera pour la plantation, ou desquelles on tire


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parti en les confisant au vinaigre, à la manière des Cornichons.
La seconde année est celle de la première récolte. Dès la fin de février jusqu'à la fin d'avril, quelquefois même jusqu'en mai, à la place des bulbilles que l'on a plantées l'année précédente, on trouve une touffe d'Oignons verts, gros comme des Poireaux, contenant de vingt à trente tiges d'une saveur et d'une qualité qui ne le cèdent en rien aux meilleurs Oignons cultivés ; et comme avec cent touffes d'Oignons Catawissa un ménage ordinaire ne consommera pas, au printemps, les tiges vertes qu'elles fournissent, celles qui restent aux pieds se développent, atteignent une hauteur de 0m,80 à 1 mètre et se couronnent au sommet, en été, d'un ou deux étages de bulbilles que l'on utilisera comme je l'ai indiqué ci-dessus.
A partir de ce moment les touffes d'Oignons Catawissa produiront pendant deux, trois ou même quatre ans, et à chaque printemps, des tiges en abondance, en été des bulbilles en quantité, et cela sans autres soins que quelques binages appliqués pendant le cours de la végétation et un bon labour au printemps, un peu avant l'apparition des tiges.
L'Oignon Catawissa est d'une rusticité sans égale, puisqu'il supporte sans altération 20 à 30 degrés au-dessous de zéro. »

La note de M. Gagnaire est suivie de quelques observations de M. Carrière, qui a reconnu que l'Oignon Catawissa est absolument distinct de l'Oignon Rocambole, ce qui était contesté.

Nous n'ajouterons rien à ce qui précède, relativement à la culture de l'Oignon Catawissa, si ce n'est pour l'approuver. Quant à ses usages, il en est dont nous ne pouvons ni reconnaître, ni nier l'importance. Nous savons qu'il


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se consomme une certaine quantité d'Oignons verts, mais nous n'en avons jamais mangé et nous n'avons jamais vu personne en manger autour de nous. Nous n'avons même pas eu la pensée d'employer en cet état le Catawissa. Nous ne savons donc pas si ses tiges ont la saveur de l'Oignon commun, mais nous pouvons affirmer avec M. Gagnaire que ses souches sont d'une grande fécondité.

Nous nous bornerons à apprécier le mérite et l'utilité de ses bulbilles. L’Allium chinois a une saveur qui lui est propre et qui n'est précisément ni celle de l'Oignon, ni celle de la Ciboule, ni celle de l'Échalote ; c'est ce qui nous en fait conseiller la culture. En effet, les bulbilles du Catawissa, confites dans le vinaigre, sont excellentes et diffèrent de toute préparation analogue.

De plus, la plante est très curieuse.

D'après le baron von Mueller (Select extratropical plants), l’Allium canadense Kalm. (Wild Garlic), espèce originaire de l'Amérique du Nord, pourrait être cultivé ou naturalisé dans les prairies humides à cause de ses bulbilles aériennes qui sont très recherchées pour la préparation de Pickles d'un parfum supérieur.