Olivier (Cazin 1868)

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Oignon
Cazin, Traité des plantes médicinales, 1868
Onoporde


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Nom accepté : Olea europaea


OLIVIER. Olea europea. L.

Olea sativa. Tourn., Black.

Olivier d'Europe, — olivier cultivé, — olivier franc, — boutaillon, — bouteillon, — boucellaou, - mouraou, — ampoulaou.

JASMINACÉES. — OLÉINÉES. Fam. nat. - DIANDRIE MONOGYNIE. L.


L'olivier, arbre de grandeur médiocre, dont l'origine se perd dans la plus haute antiquité (et auquel la lutte de Minerve et de Mars assigne une origine athénienne), croît aujourd'hui spontanément dans les montagnes de l'Atlas et est cultivé en Italie, en Espagne, en Languedoc, en Provence (où il offre de nombreuses variétés, qui sont l’olea angulosa, subrotunda, amygdalina, cranimorpha, sphærica, oblonga, viridula, precox, racemosa, atro-rubens, variegata, odorata, hispanica, regia, atro-virens, alba, ayant toutes leur nom patois, qu'il serait trop long d'énumérer ici).

Description. — Racines en partie droites, en partie rampantes, fermes, dures. - Tige en général peu élevée ; écorce lisse, cendrée; bois jaunâtre. — Feuilles opposées, persistantes, d'un vert tirant sur le jaune au-dessus, blanchâtres au-dessous. - Fleurs monopétales blanches, disposées en petites grappes axillaires (juillet-août). — Calice à quatre dents. — Corolle à quatre divisions. — Deux étamines. — Un ovaire. — Un style simple très-court. — Un stigmate épais bilobé. — Fruit nommé olive, ovale, charnu, vert d'abord et jaune à la maturité, renfermant un noyau osseux, biloculaire.

Parties usitées. — Les feuilles, l'écorce et les fruits ou olives.

Récolte. — La culture de l'olivier et la récolte des olives sont du ressort de l'agriculture. On cueille les olives vertes à la main en juin et juillet, et on leur fait subir diverses préparations pour pouvoir les servir sur table.

Propriétés chimiques; usages économiques. — Les feuilles et les écorces sont inodores, d'une saveur âpre et amère. Les feuilles analysées par Pelle-


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tier[1] lui ont fourni une matière acide colorante, de l'acide gallique, une matière grasse, de la chlorophylle, de la cire végétale, de l'acide malique, de la gomme, de la fibre ligneuse. Pallas[2] a trouvé, dans les feuilles et dans l'écorce, une matière cristalline ou olivile, dans laquelle résident, suivant lui, les propriétés actives ; un principe amer acide, une résine noire, un extrait gommeux, une matière colorante verte, du ligneux.

L'olive fournit une huile précieuse pour l'économie domestique et pour la pharmacie, où elle sert pour la composition de toutes les huiles officinales. Elle est composée de 28 parties de stéarine et de 72 d’élaïne ou oléine difficile à en séparer. Elle n'est pas siccative et rancit moins facilement que l'huile d'amandes douces. Sa pesanteur spécifique est de 0.9153.

Outre son usage alimentaire et pharmaceutique, on 1'emploie dans la fabrication des savons, dans l'éclairage, dans le lainage, etc. D'après Pommier[3], battue avec le vin et filtrée, cette huile lui ôte son goût de fût.

(Sans sortir des limites de notre travail, nous pouvons citer le principe doux des huiles, la glycérine, renvoyant pour les détails sur cette substance si intéressante, au point de vue médical et au point de vue chimique, aux publications de Démarquay[4] et de Cap et Garot[5].

L'acide olivique est un produit très-mal connu et ne consiste probablement qu'en un extrait des fruits de l'olivier.)

Le tronc des vieux oliviers laisse exsuder une matière particulière d'un brun rougeâtre, nommée gomme ou résine d'olivier, gomme lecca, presque entièrement formée d'olivile, et contient une autre substance à laquelle Pelletier donne le nom de résine d'olivier.

(L'olivile (C28H1S010 ou suivant Pelletier C12 H9 O4) est blanche, d'une saveur amère, douceâtre, cristallisable en lamelles ou aiguilles, fusible à + 70 degrés, neutre, soluble dans l'eau et l'alcool chauds.)

Les feuilles d'olivier sont dans quelques pays employées au tannage des cuirs, ce qui suppose la présence du tannin et de l'acide gallique, que l'analyse n'y démontre pas d'une manière sensible. (Landerer en a extrait un corps particulier improprement nommé olivine[6]. Ce corps, blanc, cristallisé est soluble dans les acides, mais ne forme pas avec eux de sels cristallisables.)


PRÉPARATIONS PHARMACEUTIQUES ET DOSES.


A L'INTÉRIEUR. — Décoction de feuilles, écorces, olives vertes, 15 a 60 gr. par kilogramme d'eau.
Ecorce ou feuilles pulvérisées, de 4 à 24 gr. dans un véhicule approprié.
Teinture alcoolique d'écorces (1 sur 8 d'alcool à 32 degrés), de 2 à 4 gr., en potion.
Extrait d'écorces (1 sur 3 d'alcool à 32 degrés), 2 à 4 gr., en pilules ou dans un liquide.

Sirop d'écorces (1 sur 16 d'eau et 12 de sucre), de 30 à 60 gr., seul ou en potion.
Huile d'olives, de 16 à 60 gr. et plus, pure ou mêlée à l'eau par un mucilage.
A L'EXTÉRIEUR. — 30 à 120 gr. en lavement, frictions, liniment, etc. ; le marc en topique.
L'huile d'olive entre dans la composition d'un grand nombre d'emplâtres, onguents, pommades, liniments, etc.


(Nous devons signaler un extrait acide obtenu par Lhoste en traitant l'écorce, les feuilles et les fruits d'une variété, l’oléaster, par l'acide sulfurique, et en faisant évaporer à siccité. Nous n'avons aucune observation par devers nous qui nous donne confiance dans ce produit peu expérimenté et pour lequel on a proposé le nom d’oleasterium.

L'écorce et les feuilles d'olivier sont amères, toniques, astringentes et fébrifuges. On les a considérées comme propres à remplacer le quinquina, non-seulement dans les fièvres intermittentes, mais aussi dans les fièvres typhoïdes et dans les maladies atoniques où l'usage de l'écorce du Pérou est indiqué.

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  1. Journal de pharmacie, octobre 1823.
  2. Journal des sciences médicales, t. XLIX, p. 257.
  3. Journal de chimie médicale, 1827, t. III, p. 516.
  4. De la glycérine et de ses applications, etc., 1863.
  5. Mémoire sur la glycérine et ses applications à l'art médical. Paris, 1864.
  6. (Le corps qui porte véritablement le nom d’olivine est une résine vert olive n'ayant aucun rapport avec 1'olivier, et résultant de l'action de l'acide sulfurique sur la salicine.)


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Ce fébrifuge indigène, écorce et feuilles, qui était connu de quelques médecins espagnols, et dont Bidot, en France, a le premier fait mention, paraît le plus digne de suppléer au quinquina dans les départements du Midi, où on peut se le procurer facilement.

Plus tard, Pallas eut occasion d'administrer l'écorce d'olivier aux soldats de l'expédition de Morée. Vingt malades atteints de fièvres tierces et quotidiennes guérirent tous. Ce médecin administrait trois ou quatre fois la teinture en potion, comme on vient de l'indiquer, ou bien, l'extrait amer à la dose de 6 à 18 décigrammes. Les propriétés fébrifuges de l'écorce d'olivier ont été confirmées par Casale[1] ; par Cuynat, qui a publié dans le Précis analytique des travaux de la Société de médecine de Dijon (1837), quatorze observations de fièvres intermittentes de différents types, guéries par l'usage de l'extrait de l'écorce d'olivier, administrée à la dose de 2 à 4 gr. Giardarou, médecin à Sadenico[2], a préconisé les feuilles en décoction et en poudre à la dose d'une once et demie (poids d'Autriche) en six parties. Ce médecin a administré la gomme d'olivier dans les mêmes cas avec plus de succès encore à une once et demie divisée en six portions, à prendre de deux heures en deux heures, en bols avec suffisante quantité d'eau, de manière que tout soit pris trois heures avant l'accès ; son action est plus marquée, quoiqu'à dose moindre, que celle des feuilles en décoction et en poudre.

(Aran a, dans ces derniers temps, expérimenté avec succès l'extrait hydro-alcoolique des feuilles d'olivier pour s'opposer au retour des fièvres d'accès et pour combattre les fièvres saisonnières).

Celse[3] employait avec succès à l'extérieur les feuilles d'olivier bouillies dans du vin, contre la pourriture des chairs. D'après Casale[4], elles ont arrêté, employées à l'extérieur, les progrès de la gangrène, qui avait résisté à d'autres moyens.

L'huile d'olive est adoucissante, émolliente, laxative, anthelminthique. On l'emploie cependant rarement pure à l'intérieur dans les maladies inflammatoires, parce que, séjournant dans les voies digestives, elle peut y acquérir des qualités irritantes en s'y rancissant. On l'emploie plus particulièrement dans les empoisonnements par les substances âcres et corrosives, pour en diminuer l'activité et calmer en même temps l'irritation qu'elles ont produites. On peut l'employer en émulsion comme l'huile d'amandes douces, dans les toux sèches avec irritation, dans la strangurie et les douleurs néphrétiques, les tranchées, le volvulus, etc. Elle paraît, prise pure, comme la plupart des huiles fixes, exercer une action délétère sur les vers intestinaux, dont elle provoque souvent l'expulsion. Pour prévenir le vomissement, qu'elle occasionne quelquefois lorsqu'elle est prise à haute dose, on lui associe une certaine quantité d'un acide végétal, comme le suc de citron, qui lui-même est vermicide, ou autant de vin. Labillardière, membre de l'Institut[5], a rapporté qu'ayant vu faire usage de l'huile d'olive contre le ver solitaire, et s'en trouvant lui-même attaqué, il en prit environ 750 gr. par 125 gr. de quart d'heure en quart d'heure, ce qui lui fit rendre un tænia au bout de vingt-quatre heures. Les lavements d'huile d'olive conviennent dans les coliques qui suivent les accouchements laborieux, dans celles qui accompagnent les hernies, ou qui sont produites par la rétention des matières stercorales durcies. Dans un cas de cette dernière espèce, chez un vieillard habituellement constipé, je ne suis parvenu à calmer les douleurs et à provoquer l'expulsion des fèces accumulées dans le gros intestin, qu'en

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  1. Annales de médecine pratique de Montpellier, t. XXV, p. 386.
  2. Annali universali di medicina, juin 1831.
  3. Lib. V, cap. XXII.
  4. Annales de médecine pratique de Montpellier, t. XXV, p. 386.
  5. Bulletin de la Société médicale d'émulation, 1824.


OLIVIER. 703

injectant au-dessus, au moyen d'une longue canule de gomme élastique, 120 gr. d'huile d'olive d'heure en heure. L'expulsion des matières s'est opérée après la quatrième injection. J'ai pu prévenir de nouveaux accidents par l'usage, trois fois par semaine, de la décoction miellée de mercuriale annuelle à la dose d'une tasse. Delotz)[1] a employé avec succès l'huile d'olive à haute dose dans un cas très-grave d'invagination intestinale.

Les anciens faisaient un grand usage des onctions d'huile d'olive ; ils s'en frottaient le corps en sortant du bain pour assouplir les muscles et les articulations, et rendre la peau moins sensible à l'impression subite d'un air frais. C'est en se frottant tout le corps d'huile que les athlètes se préparaient à la lutte. L'empereur Auguste demandait au centenaire Romulus Pollion comment il avait fait pour conserver jusque dans un âge avancé la vigueur de corps et d'esprit qu'il montrait : « C'est, dit le vieillard, en usant habituellement de vin miellé à l'intérieur et d'huile à l'extérieur : intus mulso, foris oleo. »

Les onctions d'huile étaient aussi fréquemment employées dans le traitement de plusieurs maladies. Dioscoride et Celse parlent de leur usage contre l'hydropisie. Forestus, Olivier, Storck, Gardane, rapportent avoir vu plusieurs fois l'ascite et l'anasarque se dissiper par ces onctions répétées plusieurs fois par jour. Bien qu'elles n'aient pas eu le même succès entre les mains de Tissot et de plusieurs autres praticiens, au nombre desquels je puis me compter, on ne doit pas y renoncer avant de les avoir de nouveau essayées.

(Chez les enfants à peau mince, je mêle souvent à parties égales l'huile d'olives et l'huile de croton, pour atténuer l'effet trop irritant de cette dernière.

L'huile d'olives a été préconisée en onctions douces sur tout le corps, après les fièvres éruptives ; elle modère le prurit, souvent si incommode, qui suit la desquamation.

Dans les brûlures, les mêmes onctions sont d'un effet très-calmant ; je leur préfère encore les bains d'huile d'olives. Tissot cite un remède populaire employé avec succès dans ces cas, c'est le mélange d'un blanc d'œuf et lie de deux cuillerées à potage d'huile.)

La réputation dont l'huile d'olive a joui, appliquée à l'extérieur comme antidote, est plus douteuse. De ce que les accidents produits par la morsure de la vipère se sont dissipés après l'usage des onctions d'huile, peut-on raisonnablement attribuer à ces onctions cette heureuse solution quand on la voit fréquemment s'opérer par les seuls efforts de la nature ? Cependant Murray et Alibert citent des faits curieux à l'appui de cette opinion. Alibert pense qu'on ne peut révoquer en doute les effets salutaires des frictions huileuses dans beaucoup de circonstances où les morsures avaient été faites par des serpents de diverses espèces ; il croît également que les mêmes onctions sont efficaces contre la piqûre des différents insectes. Dusourd[2] a obtenu des effets remarquables de l'huile d'olives employée à l'intérieur et à l'extérieur dans les cas de morsure de vipère.

(Evidemment, dans tous les cas, c'est par la vertu résolutive que l'huile d'olives a pu, en diminuant l'œdème, amener une certaine amélioration.)

Les onctions de cette huile, proposées par Delpech contre la gale, n'ont pas non plus les bons effets qu'on leur avait attribués. Je les ai employées deux fois sans succès.

Le marc ou magma, résidu des olives exprimées, paraît agir sur la peau comme irritant. On l'a recommandé contre le rhumatisme chronique, la

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  1. Abeille médicale, t. VIII, p. 216.
  2. Bulletin général de thérapeutique, t. XXXII, p. 489.


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goutte, la paralysie. Son application sur tout le corps à la fois n'est pas, dit-on, sans danger.