Carotte (Cazin 1868)

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Carline
Cazin, Traité des plantes médicinales, 1868
Caroubier


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Carotte

Nom accepté : Daucus carota


CAROTTE. Daucus carotta. L.
Ombellifères. — Daucinées. Fam. nat. — Pentandrie digynie. L.


La carotte, généralement cultivée, éprouve sous cette influence une heureuse modification dans le volume de ses racines, qui deviennent très-grosses. C'est dans cet état qu'on l'emploie aujourd'hui comme aliment et comme médicament. Elle est pour l'homme une nourriture saine et abondante et convient également aux bestiaux. Elle a produit plusieurs variétés qui donnent des racines plus ou moins volumineuses et de diverses couleurs ; il y en a de rouges, de jaunes, de blanches et même de violettes. La grosse rouge et la violette ont une saveur aromatique assez pénétrante ; la jaune et la blanche sont plus sucrées.

La Description, la Culture et la Récolte de la carotte sont trop connues pour que nous ayons à nous en occuper.

Parties usitées. — La racine et les fruits.

Propriétés physiques et chimiques ; usages économiques. — Suivant Bouillon-Lagrange, la carotte rouge (racine) fournit, à l’analyse, du sucre liquide, incristallisable, de la fécule amilacée, du malate acide de chaux, et une matière jaune laissant des taches sur le papier, insoluble dans l'eau, soluble dans l'alcool et dans les huiles, n'ayant été trouvée jusqu'à présent que dans cette racine, qui lui doit sa couleur.

« Les carottes, dit Berzélius, ont été analysées par Vauquelin et par Wackenroder. Elles contiennent, outre la fibrine, un suc jaune dans lequel on trouve du sucre de canne cristallisable et du sucre incristallisable, un peu d'amidon, de l'extractif, du gluten, de l'albumine, une matière colorante cristallisable appelée carottine (C20 H16), de l'huile volatile, de l'acide pectique et de l'acide malique, enfin une certaine quantité des sels qu'on rencontre ordinairement dans les racines. Les données suivantes sont tirées du travail de Wackenroder. Le suc exprimé des carottes est d’un rouge de brique et trouble ; son odeur est analogue à celle des carottes, sa saveur est douce et un peu âpre ; il se coagule bien au-dessous de 100 degrés. Le coagulum est jaune, et, après dessiccation, son poids est égal à 0.629 du poids du suc ; ces 0.629 de matière sont composés de 0.435 d'albumine végétale, de 0.10 d'huile grasse, de 0.034 de carottine et de 0.06 de phosphates terreux. Soumis à la distillation, le suc donne 1.8700 des poids d’une huile volatile. Cette huile est incolore, d'une odeur de cannelle pénétrante, d'une saveur forte, longtemps persistante et d'une densité de 0.8865 à la température de 12 degrés. Elle est peu soluble dans l’eau, très-soluble dans l'alcool et dans l'éther. Le sucre contenu dans le suc est du sucre de canne ; si on fait fermenter ce sucre, on obtient un résidu de sucre de manne. Vauquelin et Wackenroder assurent qu'ils n'ont pu découvrir de sucre de manne dans le jus avant la fermentation du sucre de canne. La substance analogue au gluten que fournit la carotte diffère du gluten ordinaire par son insolubilité dans l'alcool bouillant.

On rôtit la racine de carotte pour la mêler au café ou à la chicorée en diverses proportions. Cette même racine, comprimée, séchée ou réduite en poudre, se conserve pour en faire des potages et des ragoûts.

Forster, Hunter, Horby, etc., ont retiré de bonne eau-de-vie de la carotte.

Le fruit de la carotte est aromatique et contient une huile volatile abondante. Il est une des quatre semences chaudes mineures ; sa décoction offre un principe amer et du tannin. Il communique à la bière une saveur piquante et une qualité supérieure.

On substitue parfois la semence de carotte à celle de Daucus de Crète (athamanta cretensis, L.), quoiqu’elle soit fort différente.


PRÉPARATIONS PHARMACEUTIQUES ET DOSES.


A L'INTÉRIEUR. — Décoction des racines, 30 à 100 gr. par kilogramme d'eau.

Suc des racines, 30 à 100 gr. pur ou délayé dans l'eau.


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Sirop (1 de suc sur 2 d'eau et 4 de sucre), de 30. à 100 gr.
Infusion des fruits, comme celles d'anis, de fenouil, etc.
On peut faire un sirop pectoral avec la substance sucrée seule de la carotte ; on la réduit en pâte, on en exprime le jus, et on fait évaporer à une douce chaleur. Ce sirop

tient lieu de sucre et de miel, et se prend par cuillerées. I1 peut être très-utile chez les indigents des campagnes.
A L'EXTÉRIEUR. — Pulpe en cataplasme, suc pour injection, etc. (Il faut employer la pulpe fraîchement faite ; car il ne tarde pas à s'y produire de la fermentation acétique, lorsqu'elle est un peu vieille.)


La racine de carotte est émolliente, résolutive, diurétique, vermifuge, antiseptique. Suivant Barbier, d'Amiens, le suc de carotte ne recèle qu'une propriété émolliente, et peut convenir dans les irritations des voies digestives, dans les phlogoses et les ulcères simples de l'estomac, du duodénum, les irritations du foie, etc. La décoction de carotte jaune est un remède populaire dans la jaunisse, sans doute à cause de l'analogie de couleur et comme signature, bien qu'elle puisse être de quelque utilité comme simplement émolliente quand il y a irritation gastro-hépatique.

J'ai vu employer avec succès, dans l'extinction de voix, dans les toux opiniâtres, la phthisie, l’asthme, etc., le suc de carotte ainsi préparé : on fait cuire deux ou trois carottes rouges dans l'eau pendant un quart d'heure. On les râpe ensuite entièrement, et l'on tord la pulpe dans un linge. On ajoute par verre de suc extrait, deux verres d'eau pure. Cette dose se prend tiède dans la journée, en trois ou six fois. La décoction de cette racine a été recommandée par Scholer (Grantz) contre la toux des enfants et la phthisie ; Bremser[1] rapporte que, dans plusieurs cantons de l’Allemagne, on fait manger des carottes crues aux enfants vermineux. Dax[2] vante également les propriétés vermifuges de cette racine, déjà très-bien appréciée sous ce rapport par Lachenal, Mellin, Rosen et Vanden Bosch. Ce remède est employé dans nos campagnes. Je l'ai vu souvent réussir. Son effet anthelminthique a été aussi constaté par Dubois, de Tournay. Un médecin de campagne m'a dit qu'il faisait toujours manger des carottes crues pendant trois ou quatre jours aux enfants ayant des vers intestinaux, avant de leur administrer d'autres vermifuges plus énergiques ; l'effet de ceux-ci est alors plus certain et plus complet. L’effet des vermifuges est variable ; tel échoue chez un sujet, qui réussit chez un autre. Desbois, de Rochefort, a vanté la carotte contre les engorgements glanduleux et les scrofules. Il la considère comme un bon fondant du carreau chez les enfants.

L'emploi des carottes comme moyen curatif dans certaines maladies du cheval est assez répandu dans les campagnes. On lui attribue la propriété de rendre le poil lisse et beau. On en fait usage avec succès dans les affections pulmonaires chroniques, dans les toux opiniâtres, la pousse, la constipation, les affections du système lymphatique, etc. On les donne coupées en petits morceaux, seules ou mêlées au fourrage. La thérapeutique comparée offre au médecin observateur des faits intéressants et dont il peut tirer parti.

La carotte a été employée à l'extérieur, avec plus ou moins d'avantage, dans les affections cancéreuses. Sultzer[3] annonça en 1766 que la pulpe fraîcbe de cette racine lui avait réussi pour guérir des cancers ulcérés, notamment des cancers du sein. Bouvart, Desbois de Rochefort, Bouillon-Lagrange[4], Bridault, dans un ouvrage spécial[5], ont vanté la pulpe de carotte comme le topique le plus convenable aux affections cancéreuses ; mais il résulte des observations de Bayle et de Gayol[6], que ce remède est

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  1. Traité des vers intestinaux, p. 409.
  2. Annuaire de Montpellier, an XIII, p. 120.
  3. Ancien Journal de médecine, t. XXIV, p. 68.
  4. Journal de pharmacie, 1re série, t. V, p. 256.
  5. Traité sur la carotte, etc. La Rochelle, 1802.
  6. Dictionnaire des sciences médicales, t. III, p. 638.


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sans efficacité contre les affections cancéreuses, mais qu'il peut améliorer et même guérir plusieurs affections dartreuses, scrofuleuses ou autres qui ont parfois toutes les apparences du cancer. Larroque[1] dit avoir obtenu la résolution de tumeurs cancéreuses, en y appliquant tous les deux ou trois jours trois ou quatre sangsues, et deux ou trois fois dans la journée des cataplasmes de carottes crues. Tardieu[2] a traité avec avantage des ulcères et un engorgement carcinomateux du col de l'utérus, par des injections de jus de carotte crue, combinées avec un traitement antiphlogistique. « La carotte, dit Roques, appliquée sur les ulcères cancéreux, ne les guérit point, mais elle calme les douleurs lancinantes, et plus d’un malade s’est trouvé soulagé après l’application d'un cataplasme de carotte. C'est un remède populaire qu'un très-grand chirurgien, le professeur Boyer, employa dans sa pratique. Pouget, mon ancien disciple, s'en sert également pour calmer l'irritation excessive de ces ulcérations incurables. Quand la carotte ne suffit point, il arrose le cataplasme avec une légère décoction de feuilles de belladone. » Ricord[3] affirme que, dans des cas rebelles de chancre phagédénique, les cataplasmes de pulpe de carotte ont quelquefois réussi.

Walker[4] a rapporté ce qu'une expérience de dix années lui avait appris sur les bons effets de la pulpe de carotte appliquée sur les ulcères putrides et scorbutiques. On se trouve fort bien, dit Hufeland, de la pulpe de carotte fraîche, fréquemment renouvelée, pour panser les ulcères scorbutiques intérieurs. Les applications de carotte, suivant Roques, apaisent le prurit insupportable causé par les dartres. On lave fréquemment la partie malade avec une forte décoction de cette racine, ou bien on applique sa pulpe cuite en forme de cataplasme. Dubois, de Tournay, a guéri en peu de jours, au moyen de cataplasmes de pulpe de carotte, un petit garçon, âgé de quatorze ans, atteint depuis deux mois d’eczéma rubrum.

La pulpe fraîche de carotte est un remède vulgairement employé dans les campagnes contre la brûlure. Je l'ai vu fréquemment réussir dans les brûlures au premier et au deuxième degré : il apaise la douleur et prévient la production des phlyctènes.

La semence de carotte, que Barbier assimile sous le rapport des propriétés thérapeutiques à celles de fenouil et d'anis, augmente, dit-on, la sécrétion du lait ; effet qu'elle peut produire : 1° en excitant directement l'action secrétoire des organes mammaires ; 2° en augmentant l'appétit, en rendant les digestions meilleures, en faisant pénétrer dans le sang une plus grande proportion des principes propres à la formation du lait. L'huile essentielle est absorbée, et ses molécules passent dans le liquide nutritif que préparent les mamelles.

Les Anglais boivent l’infusion théiforme de graines de carotte coumme stimulante. On la donne parfois comme diurétique, dans les coliques népbrétiques, pour expulser les graviers[5].


Carotte sauvage

CAROTTE SAUVAGE. (Daucus silvestris vulgaris. — Pastinaca silvestrisChyronis. — Staphylinus græc.) Panais sauvage à petites feuilles, de Dioscoride. Se trouve partout dans les prés et le long des chemins. Elle ressemble au panais.

Description. — Racine plus petite, et plus âcre. — Tiges cannelées, velues, remplies de moelle, rameuses. — Feuilles très-découpées, velues en dessous. — Fleurs en ombelle, celle du milieu ordinairement rouge. — Graines arrondies, cannelées, d’une odeur pénétrante.

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  1. Journal hebdomadaire de médecine, septembre 1830.
  2. Journal de médecine et de chirurgie pratiques, année 1835.
  3. Traité des maladies vénériennes.
  4. Philosophical Magazine et Annales de littérature étrangère, t. XIII, p. 507.
  5. Ancien Journal de médecine, t. XXVI, p. 526.


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Sa racine est diurétique. Buchan la prescrit en décoction adoucie avec le miel contre la gravelle. Elle m'a réussi dans un cas d'anasarque, où elle a produit une diurèse des plus abondantes ; le malade était dans un état d'asthénie qui a pu en favoriser l'effet. J'ai aussi administré l'infusion de graines de carotte sauvage comme diurétique ; elle a un effet assez prononcé, et convient toutes les fois qu'un état inflammatoire n'en contre-indique pas l'usage.