Capucine tubéreuse (Potager d'un curieux, 1899)

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Canna comestible
Potager d'un curieux, Introduction
Carvi de Gairdner


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Nom accepté : [[]]


CAPUCINE TUBÉREUSE


Tropæolum tuberosum Ruiz et Pav., Fl. per., 314 ; Bot. Mag., tab. 3714 ; Fl. des serres, 5,432 ; Belg. hort., 2, 36.


Fam. des Tropéolées.


Racines tubéreuses ; tiges nombreuses, rameuses, glabres, de 0m,50 à 0m,60 de hauteur. Feuilles cordiformes à la base, à 5 ou 7 lobes entiers, échancrés, quelquefois bilobés ; pétioles deux fois plus longs que le limbe, tortillés en forme de vrille ; pédoncule beaucoup plus long que la feuille ; calice rouge cramoisi, plus court que l'éperon ; pétales d'un jaune orangé, dentés, striés de noir sur l'onglet, à peu près aussi longs que les sépales. Fleurit en octobre.

Tubercule piriforme, presque sphérique, atténué à la base, variant, comme grosseur, depuis celle d'une Châtaigne jusqu'à celle d'une Poire de moyenne dimension.


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Il est d'une couleur jaune pâle, bigarrée de taches sanguines. Sa surface est couverte de mamelons peu saillants.

« On dit que les tubercules de cette plante sont alimentaires dans l'Amérique méridionale. Ici, on n'a pu, jusqu'à présent, en tirer parti. J'ai essayé de les mariner au vinaigre comme les Cornichons, mais sans avoir été satisfait du résultat. Un abonné de la Revue horticole

Fig. 13. — Capucine tubéreuse (Tropæolum tuberosum Ruiz et Pav.).

a eu la même idée et en a apprécié autrement le produit. Que faut-il en conclure ? C'est encore apparemment qu'il ne faut pas discuter des goûts, ou bien que mon terrain ne convenait pas à la plante. Notre abonné a laissé mariner ses tubercules pendant trois mois, n'a ajouté aucun assaisonnement, et a trouvé que, « dans cet état, ils offraient une espèce de Cornichons beaucoup plus agréables au goût que les véritables, outre que le vinaigre a acquis un parfum convenable pour servir dans les sauces et dans les salades. »


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« La culture ordinaire de la Pomme de terre convient à cette plante, que l'on butte légèremeut. Les tubercules commencent seulement à se former en septembre, et l'on ne doit les récolter qu'au dernier moment où l'on peut le faire pour leur éviter l'effet de la gelée. » (Capucine tubéreuse, par Neumann, Rev. hort., 1845-46, p. 17.) « La Capucine tubéreuse, Tropæolum tuberosum, ou Ysaño (pron. Ysagno), est regardée par tout le monde en Europe comme un légume si détestable qu'il n'y a absolument aucun parti à en tirer. En effet, lorsqu'on tire du sol les tubercules de l’Ysaño, ils sont d'une âcreté des plus désagréables, âcrelé qui est accompagnée de l'odeur particulière à toute espèce de Capucine.

« Eh bien ! en Bolivie, on a trouvé le moyen de faire disparaître ces défauts, et on a réussi à faire de l’Ysaño, sinon un légume usuel, du moins un légume très comestible.

« La coction ne suffit pas pour produire le résultat désiré ; on y joint la congélation.

« C'est donc cuits et gelés que l'on doit manger les tubercules du Tropæolum, et encore faut-il les manger avant qu'ils ne dégèlent, c'est-à-dire croquants. A cet état, je puis affirmer, car j'en ai fait l'essai maintes fois, qu'ils constituent un mets assez agréable.

« Il n'y a guère de jour qu'on ne voie sur le marché de La Paz une ou deux rangées de marchandes qui ne vendent autre chose que ces Ysaños gelés, ou Taiachas, comme on les appelle, qu'elles protègent contre l'action du soleil en les enveloppant d'une étoffe de laine ou de paille. Les femmes de La Paz en sont toutes extrêmement friandes et elles ont l'habitude de les prendre comme rafraîchissement pendant la chaleur du jour, en les trempant dans de la mélasse. » (Note de M. Weddell, Rev. hort., 1852, p. 148.)


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Que les tubercules de Capucine, gelés et trempés dans la mélasse, soient un agréable rafraîchissement pendant les chaleurs de l'été, nous n'avons garde de le contester, mais nous n'espérons pas que nos Françaises se le fassent jamais servir chez Tortoni.

Nous serions - donc encore en présence d'un beau tubercule, facilement obtenu, mais sans emploi, si l'abonné de la Revue horticole, que cite plus haut Neumann, ne nous enseignait pas l'usage que nous en pouvons faire.

Il y a quelques années déjà, nous avons confit dans le vinaigre les tubercules de la Capucine, et le résultat nous a pleinement satisfaits. Ils ont été dégustés par notre famille et par nos amis, et notre préparation a été unanimement approuvée.

Nous étions loin de croire alors que nous avions été devancés et que trente ans auparavant, l’abonné avait confit ces tubercules dans le vinaigre, sans addition d'aucun condiment, et avait fait connaître le succès de sa tentative.

Entre l'opinion défavorable de Neumann et celle de l'abonné, nous pouvons donc nous prononcer, et nous le faisons sans hésitation : l’abonné a raison, cent fois raison.

Nous devons dire que nous avons préparé les tubercules de Capucine comme toutes nos conserves au vinaigre, en leur adjoignant l'Estragon, la fleur de Sureau et le Piment. Ils teignent le vinaigre en rose, mais cette coloration ne se maintient pas longtemps.

La Capucine tubéreuse, confite dans le vinaigre, conserve, un peu atténuée, la saveur qui lui est propre, et c'est un avantage que ne possèdent pas les légumes qu'on associe habituellement aux Cornichons.


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Nous avons proposé (1) une nouvelle composition de Pickles dans laquelle entre à juste titre la Capucine tubéreuse, composition qui comprend : La Ciboule de Chine ou Oignon Catawissa ; Le Concombre angourie des Antilles ; Le Miôga, du Japon ; Le Stachys tubéreux (Crosne), de Chine ; La Capucine tubéreuse.

Nous croyons qu'à cette liste on pourra ajouter les jeunes fruits très amers des Momordica Charantia, M. Balsamina et M. muricata ; le premier se mange en Chine et Cochinchine, et les deux derniers sont égament comestibles. Le M. muricata se prépare de diverses façons, à la Réunion, pour la table, et entre dans la composition des Acharts.

Les marchands de comestibles vendent la Capucine tubéreuse pour être employée en hors-d'œuvre.

Dans les dîners qui leur sont commandés, ils la présentent dans les raviers, coupée en rondelles extrêmement minces et assaisonnées, comme le Céleri, avec sel, huile, vinaigre et moutarde.

Il est bon que ce hors-d'œuvre soit préparé quelques heures d'avance.

La culture de la Capucine tubéreuse est des plus simples. On plante ses tubercules au commencement du mois de mai, en pleine terre, à 80 centimètres de distance en tous sens ; on bine la plantation jusqu'au moment où ses tiges, en s'étendant sur la terre, la couvrent entièrement. Avant la plantation, nous mêlions les tubercules en végétation dans des godets que nous plaçons sous des châssis, comme on le fait pour les

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(1) Nouvelle composition de Pickles (Bull. de la Soc. nat. d'Accl., 1883, p. 235).


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Cannas et les Dahlias. Cette pratique nous donne d'excellents résultats.

Les feuilles gèlent avant que les tubercules soient entièrement formés; nous employons à couvrir les plantes, dès le commencement d'octobre, les châssis qui, à cette époque, n'ont plus d'emploi. L'arrachage ne doit se faire que dans le courant de novembre.

Les tubercules des Tropæolum polyphyllum Cavan., et edule Paxt. des Andes du Chili, sont, dit-on, également comestibles. Enfin, d'après F. Mueller (Select extratropical plants), ceux du T. sessilifolium Pœpp. et Endl., autre espèce chilienne, seraient les plus volumineux et les meilleurs. Au Brésil et au Paraguay, on mange comme herbe potagère les feuilles et les tiges charnues du T. pentaphyllum Lamk.