Véronique (Cazin 1868)
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Véronique officinale
Nom accepté : Veronica officinalis
Veronica mas supina et vulgatissima. C. Bauh., Tourn. — Veronica vulgatior folio rotundiore. J. Bauh. — Veronica vera et major. Ger. — Veronica mas vulgaris supina. Park.
Véronique officinale, — véronique mâle, — thé d'Europe, — herbe aux ladres.
PERSONNÉES. — VÉRONICÉES. Fam. nat. — DIANDRIE MONOGYNIE. L.
La véronique (Pl. XL), plante vivace, se trouve dans toute la France ; elle croît dans les bois sablonneux, sur les coteaux arides, dans les bruyères. Les chevaux, les vaches, les moutons la broutent.
Description. — Racine longue, rampante, fibreuse, naissant sur la souche ou des parties de la tige qui rampent sur le sol, ce qui donne à la véronique tous les caractères d'une plante traçante. — Tiges souvent rampantes, quelquefois dressées, dures, cylindriques, velues, longues d'environ 2 décimètres, divisées vers la base en rameaux semblables aux tiges. — Feuilles opposées, médiocrement pétiolées, ovales ou un peu aiguës, dentées en scie à leurs bords. — Fleurs petites, d'un bleu pâle, disposées le plus souvent en deux grappes latérales, axillaires, pubescentes, droites, longues de 8 à 12 centimètres (juin-août). — Calice à quatre lobes inégaux. — Deux étamines. -Un style. — Fruit : capsule ovale, comprimée, échancrée en cœur au sommet, à deux loges renfermant plusieurs semences arrondies.
Parties usitées. — Toute la plante, et notamment les feuilles et les sommités fleuries.
Récolte. — La récolte se fait pendant tout le temps de la floraison, et même encore un peu après. On récolte la plante entière avec la racine, si l'on veut faire usage de cette dernière. On doit rejeter toutes les feuilles rouges ou noires. La dessiccation ne lui fait rien perdre de ses propriétés.
[Culture. — Les véroniques ne sont cultivées que dans les jardins botaniques. On les multiplie par graines ou par boutures.]
Propriétés physiques et chimiques ; usages économiques. — La véronique est inodore, d'une saveur amère, un peu chaude et styptique. Son eau distillée est très-faiblement aromatique. Cette plante paraît contenir de l'extractif et du tannin ; mais ce dernier principe y est en petite quantité. Cependant, suivant Roques[1], son infusion, qui est jaune et rougeâtre, noircit par le sulfate de fer. L'eau et l'alcool se chargent également de ses principes actifs. Son extrait alcoolique est beaucoup plus amer que son extrait aqueux. Cette remarque, due à Cartheuser, décèle une propriété tonique dont la médecine usuelle peut tirer parti.
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- ↑ Plantes usuelles, t. III, p. 39.
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La véronique est légèrement tonique et excitante. Elle a été employée dans les catarrhes pulmonaires chroniques, la dyspepsie, les flatuosités, etc. Elle provoque, dit-on, la sécrétion de l'urine et facilite l'expectoration.
Frédéric Hoffmann[1] a proposé de remplacer le thé par cette plante. Le conseil de ce célèbre médecin eut du retentissement, et l'on s'empressa dans toute l'Allemagne de répandre l'usage du thé d'Europe. L'infusion théiforme de véronique, un peu âpre, a pu charmer les palais allemands ; nous n'y avons pas trouvé en France cette astriction aromatique, ce parfum spécial qui, dans le thé, flatte si agréablement le goût. Roques a proposé comme plus agréable le thé indigène suivant : Feuilles de véronique, 60 gr.; feuilles de mélisse et sommités de botrys, de chaque 30 gr. Ces plantes, cueillies dans leur floraison, au moment où le soleil a entièrement dissipé la rosée du matin, sont hachées bien menu, bien séchées à un soleil vif, et, après dessiccation parfaite, enfermées dans une boîte au thé. L'infusion théiforme de ce mélange, édulcorée avec du sucre, favorise la sécrétion rénale, stimule les voies digestives, provoque la transpiration, et peut, suivant Roques, remplacer le thé de la Chine et du Japon, sinon dans les soirées, du moins au lit du malade.
La véronique doit être mise au nombre de ces plantes auxquelles on a attribué une foule de vertus contradictoires. Fr. Hoffman la recommande dans la phthisie, qu'il assure avoir vu guérir par l'usage prolongé de cette plante en décoction dans le lait, le catarrhe pulmonaire chronique, l'engouement des bronches, l'asthme humide. Si l'on en croit Johan Franke[2], auteur aussi prodigieux d'érudition que dépourvu de goût et de jugement, cette plante peut suffire seule à toutes les indications et guérir toutes les maladies.
J'ai assez fréquemment employé la véronique comme léger tonique dans la convalescence des fièvres muqueuses, dans tous les cas où il faut arriver graduellement à des stimulants plus énergiques. L'infusion concentrée de cette plante m'a paru favoriser l'expectoration dans les bronchites et l'asthme.
On a mis en usage à l'extérieur la décoction ou l'eau distillée de véronique contre la gale, la gratelle (prurigo, lichen), les ulcères des jambes, et même contre le cancer. Cesalpin, Fuchsius et Liébaut assurent qu'un roi de France fut guéri de sa lèpre par des fomentations préparées avec cette plante. Il ne faut pas moins se défier des panégyristes des médicaments que de ceux des héros, dit le judicieux Haller. Les éloges pompeux prodigués à des plantes inertes ou dont on a exagéré les vertus n'ont pas peu contribué à discréditer la thérapeutique végétale. Si on se fût renfermé dans les limites d'un raisonnement fondé sur la rigoureuse observation des faits, la pénurie où nous croyons être à cet égard, et qui nous porte à payer chèrement les secours de l'étranger, n'eût jamais existé que pour un petit nombre de substances.
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- ↑ Diss. de infus. veronicæ efficacia preferendæ theæ. Halæ, 1693.
- ↑ Polychresta herba veronica. Ulmæ, 1694.
Véronique petit-chêne
Nom accepté : Veronica chamaedrys
VÉRONIQUE PETIT CHÊNE. (Veronica chamædrys. L. ; chamædrys spuria minor rotundifolia. C. Bauh. ; chamædrys spuria latifolia sive fœmina. J. Bauh. ; chamædrys sylvestris. Ger. ; chamædrys spuria sylvestris. Park.) — Cette jolie plante, qu'il ne faut pas confondre avec le teucrium chamædrys, se trouve au printemps dans les haies, les prés, les bois.
Description. ~ Racines comme sarmenteuses. — Tiges de 20 à 25 centimètres, droites, grêles, cylindriques, simples ou rameuses, distinguées par leurs poils constamment rangés en deux lignes opposées qui descendent d'une feuille à l'autre. — Feuilles opposées, ovales, cordiformes, dentées, ridées, un peu velues à leurs deux faces. — Fleurs bleues, assez grandes, disposées en grappes latérales et axillaires. — Calice à fo-
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lioles pubescentes, lancéolées et presque égales entre elles. — Capsule comprimée, plus courte que le calice, partagée à son sommet en deux lobes arrondis.
Véronique en épi
Nom accepté : Veronica spicata
VÉRONIQUE A ÉPI. (Veronica spicata. L. ; veronica spicata minor. C. Bauh. ; veronica spicata recta minor. J. Bauh. ; veronica assurgens sive spicata. Ger. ; veronica mas erecta. Park.) — Cette jolie espèce orne les pâturages et les bois.
Description. — Tige un peu couchée à sa base, puis ascendante, très-simple légèrement velue. — Feuilles oblongues, obtuses, crénelées, d'un vert pâle, beaucoup plus petites à la partie supérieure de la tige. — Fleurs ordinairement bleues, quelquefois blanches, réunies en épi terminal, accompagnées à leur base de petites bractées lancéolées, de la longueur du calice. — Capsules ovales, en cœur, comprimées, un peu ciliées.
Véronique germandrée
Nom accepté : Veronica teucrium
VÉRONIQUE GERMANDRÉE. — VÉRONIQUE TEUCRIETTE. (Veronica teucrium. L. ; veronica supina, facie teucrii pratensis. Lob., Tourn.) — Elle est commune sur les pelouses et au bord des bois, où elle croît en touffes.
Description. — Tige de 20 à 25 centimètres, un peu couchée, cylindrique, simple ou rameuse, un peu velue, d'un vert blanchâtre. — Feuilles opposées, ovales, pointues, quelquefois obtuses, sessiles, profondément dentées en leurs bords, d'un vert foncé en dessus, blanchâtres et un peu velues en dessous. — Fleurs grandes, d'une belle couleur bleue, un peu veinées de rouge, disposées en grappes axillaires sur des pédoncules pubescents. — Calice légèrement velu, à quatre découpures étroites, inégales. - Capsules un peu renflées, échancrées au sommet en deux lobes courts et arrondis.
Cette espèce, qui a un peu plus d'amertume que les autres véroniques, auxquelles elle peut être substituée dans les pays où elle abonde, a été employée avec quelque succès dans les fièvres intermittentes simples.
[Nous citerons encore les véroniques mouron (V. anagallis L.) et à feuilles de lierre (V. hederæfolia L.]