Strychnos erichsonii (Pharmacopées en Guyane)
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Sommaire
Strychnos erichsonii M. R. Schomb. ex Progel
Synonymies
- Strychnos bovetiana Pires ;
- Strychnos urbanii Barb. Rodr.
Noms vernaculaires
- Créole : dobouldoi [dobouldwa], dobouldoi rouge [dobouldwa-rouj], daboudoi [daboudwa].
- Wayãpi : wɨlamo’ɨ.
- Palikur : ihip iβatye.
- Aluku : makuende tetei, dobudwa.
- Saramaka : ledi dobuldwa.
Écologie, morphologie
Liane assez fréquente en forêt primaire.
Collections de référence
Grenand 1492, 1672 ; Moretti 489, 783, 1079.
Emplois
Cette liane est un aphrodisiaque réputé chez les Saramaka du Surinam et les Aluku du Maroni (FLEURY, 1991), d’où il est passé chez les Créoles de Guyane. Les guérisseurs distinguent plusieurs variétés : dobouldoi rouge, dobouldoi blanc, correspondant peut-être à des variétés de cette espèce ou à d’autres espèces de Strychnos. La plus réputée est le dobouldoi rouge. L’écorce est mise à macérer dans le rhum (tafia). Cette drogue est considérée comme plus efficace que le bois bandé (cf. Ptychopetalum olacoides, Olacacées), les deux plantes intervenant souvent dans la même préparation [1].
Étymologie
- Créole : de l’anglais devil doer, « faiseur de diableries », plante utilisée pour les rituels magiques et comme aphrodisiaque en Guyana (DANCE, in ROTH, 1924). En Guyana, ce nom est appliqué à la présente espèce ainsi qu’à Strychnos mitscherlichii M. R. Schomb. (VAN ANDEL, 2000).
- Wayãpi : wɨla, « arbre » et mo’ɨ, « perle », car on monte les graines en collier.
- Palikur : de ihip, « liane » et iβatye, « dure », en raison de la dureté de la tige.
Chimie et pharmacologie
Les alcaloïdes de cette espèce sont déjà signalés par KING (1949) comme étant très instables. Nous avons pensé qu’il pouvait être intéressant d’entreprendre leur étude et celle de leurs propriétés pharmacologiques : huit alcaloïdes ont été isolés des écorces de tige. Les alcaloïdes séparés sont : désacétyl diaboline, diaboline, 11-méthoxy diaboline, henningsanine, condensamine, 17-0 éthyl diaboline, 11-0 méthyl 17-0 éthyl diaboline et un alcaloïde original, l’érichsoniine (du type vobasine). L’étude pharmacologique menée par le laboratoire Roger-Bellon a montré que les activités rencontrées sont dues à la présence des dérivés de la diaboline. L’érichsoniine s’est avérée atoxique et inactive. L’extrait des feuilles est analgésique (test de Siegmund), tandis que les écorces de tige augmentent la motilité (S.N.C.) ; elles sont de plus spasmolytiques (FORGACS et al, 1986).
La toxicité de cette espèce est faible pour un Strychnos à alcaloïdes : DLO > 1 mg/kg par voie orale et pour les différents extraits préparés [2] ; cependant, compte tenu d’une possible variation saisonnière de la teneur en certains alcaloïdes toxiques, son usage comme aphrodisiaque n’est sans doute pas sans danger.
Tests chimiques en fin d’ouvrage.
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- ↑ L’usage de cet aphrodisiaque, bien que limité en Guyane française, tend à se répandre et il convient d’informer l’éventuel utilisateur des risques que cette pratique lui fait encourir. La plante peut être confondue avec d’autres espèces du même genre beaucoup plus toxiques, ou avec d’autres espèces présentant les mêmes caractères foliaires et entrant dans la préparation du curare. Un informateur, pourtant grand connaisseur de la flore, nous a montré comme dobouldoi une liane de la famille des Ménispermacées, Abuta rufescens Aublet, espèce à alcaloïdes toxiques et curarisants, semblable aux Strychnos par l’aspect des feuilles.
- ↑ Pourtant SCHULTES et RAFFAUF (1990) indiquent que cette espèce est l’une des sources principales de curare chez les Amérindiens du nord-ouest amazonien (Desana, Karijona, Kofan, Maku, Makuna, Tikuna et Yukuna).