<center>'''MILLEFEUILLE'''. ''Achillea millefolium''. L.
''Millefolium vulgare album''. C. Bauh. , Tourn. — ''Millefolium stratiotes pennatum terrestre''. J. Bauh. — ''Stratiotes millefolia''. Fuchs. - ''Achillea''. Dioscoride. — ''Chyliophylium''. Trill. ''Carpentaria''. Lem.
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'''Description'''. — Racine traînante, noirâtre, fibreuse. — Tiges droites veluescannelées, hautes de 50 à 60 centimètres. — Feuilles longues et étroites, pubescentes, à découpures nombreuses, sessiles, alternes, d'une odeur aromatique.— Fleurs blanches ou rosées, en capitules petits et nombreux, formant des corymbes terminaux compactes (juin-juillet-août). — Calice composé d'écailles imbriquées, très-serrées, renfermant dans le centre des fleurons tubuleux, hermaphrodites, à cinq lobes, au nombre de six à huit, et, à la circonférence, des demi-fleurons femelles fertiles, peu nombreux et à trois dents. — Cinq étamines. — Un style. — Deux stigmates. — Réceptacle près plan.— Fruits : akènes ovoïdes dépourvus d'aigrette.
'''Parties usitées'''. — Les feuilles, les sommités fleuries, la racine.
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en médecine, Teissier, abordant les considérations et les faits cliniques oui font l'objet de son mémoire, spécifie les cas dans lesquels on peut employer avec succès la millefeuille. « Il ne s'agit ici, dit-il, ni des hémorrhoïdesfluentes ordinaires, que le praticien doit ordinairement respecter et pour lesquelles il ne doit intervenir que lorsqu'elles sont douloureuses. Il ne s'agit pas non plus de ces hémorrhoïdes dégénérées dont on ne peut avoir justice que par une opération chirurgicale, c'est-à-dire qu'à la condition de les détruire par le bistouri ou par les caustiques. Nous voulons parler surtout de ces hémorrhoïdes sans lésions profondes de l'intestin, qui laissent cependant écouler une quantité considérable de sang, qu'on peut évaluer, sans exagération, chez quelques sujets, à une demi-verrée, une verrée, un demi-litre et même un litre par jour, et qui jettent les malades dans un état dedébilité extrême et d'anémie véritable. » Teissier oppose aussi avec efficacité la millefeuille aux hémorrhoïdes anciennes dont le flux n'est pas seulement sanguin, mais encore muqueux ou puriforme, et constituant une blennorrhée anale, qui entraîne, quand elle est abondante, une débilité déplorable et les symptômes de la cachexie. Ce praticien distingué apprécie ensuite la médication recommandée contre ces deux espèces d'hémorrhoïdes anormales, et qui consiste surtout dans l'usage des astringents et du froid, tant à l'intérieur qu'à l'extérieur (boissons faites avec les acides minéraux et végétaux, ratanhia, bistorte, cachou, quinquina, écorce de chêne, alun en pilule ou en solution, seigle ergoté, etc. ; lavements froids et lotions fraîches avec l'eau albumineuse ; solution d'acétate de plomb, de sulfate de fer, d'alumine, etc.). Cette médication n'est pas rejetée d'une manière absolue par l'auteur ; il pense, au contraire, qu'elle peut trouver son application dans certaines circonstances ; mais il croit aussi avec raison qu'il y a inconvénient à supprimer par des astringents très-énergiques, appliqués localement ou par des lavements d'eau glacée, des écoulements hémorrhoïdaux rouges ou blancs un peu considérables, lors même qu'ils sont liés à une exhalation passive.
Il est préférable et plus rationnel, en pareils cas, de recourir à des moyens moins répercussifs. La millefeuille, par une action élective, à la fois tonique, astringente et même sédative, remplit parfaitement l'indication.
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Mme D***, de Boulogne-sur-Mer, âgée de quarante-quatre ans, tempérament lymphatico-nerveux, constitution grêle et délicate, n'ayant eu qu'un enfant aujourd'hui âgé de dix-sept ans, était atteinte depuis plusieurs années detumeurs hémorrhoïdales qui sortaient à chaque défécation. Le volume graduellement augmenté de ces tumeurs produisait en même temps la chute péniblement réductible du rectum, et, par suite de l'irritation du col de l'utérus, une menstruation métrorrhagique qui durait dix à douze jours. Des topiques astringents (pommade de ratanhia, lotions alumineuses, etc.), les douches ascendantes froides, la pommade de belladone, l'onguent populéum, etc., n'avaient apporté que peu ou point de soulagement. La malade, affaiblie et découragée, alla à Paris consulter MM. Gendrin et Barthe, qui ne trouvèrent d'autre moyen de salut que la destruction des tumeurs hémorrhoïdales, soit par la cautérisation, soit par l'écrasement linéaire, mais l'état de faiblesse et d'anémie, l'extrême irritabilité du système nerveux, le refus formel de la chloroformisation, firent différer l'opération, et l'on s'en tint seulement à la continuation de l'emploi journalier des douches d'eau froide, qui, parmi les moyens employés, avaient seules procuré du soulagement.
Mme D*** revint à Boulogne. Appelé le 7 mars 1857, je la trouve dans l'état suivant : tumeurs hémorrhoïdales volumineuses formant bourrelet, chute du rectum à chaque garde-robe et même par la marche, nécessitant depuis longtemps un suppositoire métallique contentif, mais dont la présence ne peut plus être supportée à cause de la douleur ; rupture d'une veine donnant issues chaque fois que la malade va à la selle, à un demi-verre de sang (environ 80 à 100 gr.) ; pâleur, infiltration cachectique, débilité, pouls faible, abattement moral, insomnie ou sommeil pénible, sensibilité extrême ; appétit ; digestions rarement difficiles ; menstruation très-abondante depuis près d'un, an, durant dix à douze jours, et constituant, les deux premiers jours, une véritable hémorrhagie ; obligation de garder presque constamment le lit. Je prescris l'infusion de millefeuille à la dose de 20 gr. pour 500 gr. d'eau bouillante, à prendre en trois fois chaque jour. Dès le troisième jour du traitement, l'écoulement sanguin hémorrhoïdal est diminué de moitié. La malade éprouve, dit-elle, une amélioration sensible du côté des nerfs : elle est plus calme et dort plus paisiblement. Le sixième jour, l'écoulement sanguin est réduit à environ une cuillerée à bouche ; la réduction du rectum, auparavant très-pénible, devient graduellement plus facile et moins douloureuse : il y a plus de ton et un peu moins de volume dans les parties affectées. Le dixième jour, apparition normale des règles, sans hémorrhagie ; elles ne durent que cinq jours. Le vingtième jour, Mme D***, moins faible, peut rester levée une grande partie de la journée. La constipation est combattue par une très-légère dose de magnésie calcinée. Le volume du bourrelet hémorrhoïdal est diminué d'environ un tiers et la chute du rectum beaucoup moins considérable n'offre plus que peu de difficulté dans la réduction. Mme D*** reprenant de plus en plus ses forces et de gaîté habituelle, se livre à ses occupations ordinaires, continue l'usage de la millefeuille, plutôt, dit-elle, par reconnaissance que par nécessité, sans renoncer toutefois à l'opération qui pourra, lorsqu'elle se trouvera assez forte pour la supporter, la débarrasser complètement de son affection hémorrhoïdale.
un plein succès. Le même traitement fit rapidement cesser les convulsions survenues chez les enfants pendant la dentition. Richard prescrit encore l'infusion de cette plante en boisson, en lavements et en topique sur le ventre chez les jeunes filles dont la menstruation est difficile et douloureuse, chez les femmes récemment accouchées et tourmentées de coliques, et cette pratique lui réussit toujours.
La millefeuille a été employée autrefois à l'extérieur comme vulnéraire. Le nom qu'elle porte vulgairement (herbe aux charpentiers) lui vient de sa vertu supposée de guérir les plaies récentes. Les paysans retardent la guérison de leurs coupures mal réunies en y appliquant cette herbe ; mais comme ils guérissent par les efforts de la nature, malgré cette application, ils lui attribuent le merveilleux travail de la cicatrisation. Mais il n'en estpas de même des ulcères sanieux et atoniques ; le suc, l'infusion aqueuse ou vineuse de millefeuille, les raniment, les détergent et les disposent à la cicatrisation. Cette plante, contusée et appliquée sur le périnée, augmentela tonicité de la peau de cette partie, et cicatrise promptement les crevasses ou les gerçures que la marche occasionne. Dubois a observé que la décoction de millefeuille dans la bière guérit d'une manière rapide les gerçures qui surviennent à la peau de diverses parties du corps, notamment celles qui ont leur siège au pourtour du mamelon des nourrices. On applique sur la partie malade des compresses trempées dans cette décoction. Le suc, la décoction ou l'infusion de millefeuille en topique, étaient regardés par Stahl comme un remède spécifique contre les hémorrhoïdes. En injection, ces préparations conviennent dans la leucorrhée et les flux muqueux ou mucoso-purulents du rectum. Hanin recommande contre la leucorrhée des injections dans le vagin avec une décoction composée de millefeuille, de trèfle d'eau et de mélilot ; on y ajoute, quand l'écoulement est moins abondant, et à la fin du traitement, des roses de Provins et du gros vin. On prépare avec la millefeuille des fumigations et des bains aromatiques et sédatifs. Elle est, dit-on, un excellent remède contre la gale des moutons.
(Matthiole recommande contre les maux de dents de mâcher l'herbe de millefeuille ; l'abondante sécrétion de salive qui s'ensuit peut, jusqu'à un certain point, amener du soulagement.)
'''MILLEFEUILLE NOBLE ''' (''Achillea nobilis'', L.). — Croît dans le Piémont, dans la Provence, le Languedoc, le Dauphiné, les Pyrénées ; on la trouve sur les collines, dans les terrains un peu sablonneux. Paraît un peu plus énergique que l'espèce précédente.
'''Description'''. — Tige ronde, non sillonnée, pubescente, haute de 30 à 36 centimètres. — Feuilles bipennées, cotonneuses, à lanières écartées, pointues, étroites, dentées en scie. — Fleurs en corymbe à l'extrémité des rameaux ; disque jaunâtre, demi-fleurons blancs, courts, échancrés au sommet et peu nombreux.
Odeur aromatique, camphrée, saveur amère.
[[Catégorie:Cazin 1868]]