Le saule blanc est un arbre très-commun le long des routes, près des villages, au bord des ruisseaux, des rivières, dans les terrains humides et marécageux.
'''Description'''. — Racine dure, ligneuse, blanchâtre. — Tronc droit, revêtu d'uneécorce un peu cendrée, s'élevant de 15 à 20 mètres quand on le laisse croître, au lieude le tailler en boule. — Feuilles alternes, velues, blanchâtres, pétiolées, lancéolées,dentées en scie, paraissant après la floraison. — Fleurs dioïques, en chatons écailleux,ovoïdes ; les chatons mâles cylindriques, pédonculés, un peu velus, composés d'écaillesimbriquées, ovales, renfermant chacune deux étamines ; les chatons femelles grêles, alternes, à écailles oblongues, aiguës, munies d'un ovaire, d'un style et de deux stigmates. — Fruit : capsule uniloculaire, bivalve, polysperme, à graines munies d'une aigrette fine et nacrée (mars-avril).
'''Parties usitées.''' — L'écorce.
'''Récolte.''' - Il faut que l'écorce de saule soit prise sur des branches de deux, trois ou quatre ans, récoltées avant la floraison, desséchées promptement à l'étuve et conservées à l'abri du contact de l'air et de l'humidité. Cette écorce desséchée est roulée, d'une épaisseur variable, mais en général assez mince, d'un brun fauve.
['''Culture.''' - Le saule est très-répandu dans les bois. Il préfère les lieux humides,les bois, les fleuves, les bords des rivières et des ruisseaux, les marais ; on ne le cultive pas pour l'usage médical. On le propage par boutures, on coupe les pousses très-souvent
pour faire des liens (''S. babylonica'') ou des échalas. Il en résulte que le sommet du tronc prend un grand accroissement. C'est ce qu'on appelle cultiver en têtard.]
'''Propriétés physiques et chimiques'''. — L'écorce de saule est inodore, très-amère et un peu astringente. D'après Pelletier et Caventou, cette écorce contient une matière brun-rougeâtre, soluble dans l'alcool et peu soluble dans l'eau ; une matière grasse verte, une matière tannante qui ne précipite pas par l'émétique, et par conséquentdifférente de celle des quinquinas ; de la gomme et du ligneux. Ils regardent la matièrecolorante, jaune et amère, comme celle qui joue le plus grand rôle dans cette écorce. Le Roux, pharmacien à Vitry-le-Français, a découvert dans cette écorce un princine immédiat qu'il a nommé ''Salicine'', et dont Fontana, pharmacien à Lazzïa, près Vérone, Buchner et Regatelli avaient déjà signalé l'existence. Ce principe, retiré de l'écorce deplusieurs espèces de saule, est d'un aspect nacré, d'une saveur très-amère, un peu soluble dans l'eau froide, très-soluble dans l'eau chaude, insoluble dans l'éther et dans
les huiles volatiles, soluble dans les acides sans se combiner avec eux.
La salicine est un produit extrêmement intéressant au point de vue chimique ; elle peutêtre représentée par C<sub>26</sub> H<sub>18</sub> O<sub>14</sub> ; elle contient, en outre, six proportions d'eau ; elle fond au-dessous de 100° C. ; à + 17 degrés, l'eau en dissout 6 pour 100. L'acide azotique à chaud la transforme en acide benzoïque et en acide carbazotique (picrique) ; la synaptase le dédouble en ''saligénine'' = C<sub>14</sub> H<sub>8</sub> O<sub>4</sub> et en glycose. En effet :
C<sub>26</sub> H<sub>18</sub> O<sub>14</sub> (Salicine) + 4 HO = C<sub>14</sub> H<sub>8</sub> O<sub>4</sub> (Saligénine) + C<sub>12</sub> H<sub>14</sub> O<sub>14</sub> (Glycose) ; c'est par conséquent un glycoside.
La salicine traitée par l'acide sulfurique étendu la transforme en ''salirétine'' = C<sub>14</sub> H<sub>6</sub> O<sub>2</sub>, et l'acide sulfurique concentré en rutiline (C<sub>28</sub> H<sub>12</sub> O<sub>4</sub>). Par l'acide sulfurique et le bichromate de potasse, et à la distillation elle est transformée en essence de reine després ou acide salycileux = C<sub>14</sub> H<sub>6</sub> O<sub>4</sub>. La salicine est l'analogue de la phloridzine du pommier, et la populine du peuplier.
''Substances incompatibles''. — La gélatine, les carbonates de potasse et d'ammoniaque,l'eau de chaux, le sulfate de fer.
On fait avec les branches de saule des échalas, des cercles, du charbon pour lapoudre à canon, etc.
Extrait par infusion (1 sur 10 d'eau) ; — par
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décoction (1 sur 8 d'eau) ; — alcoolique (1 sur 5 d'alcool), de 1 à 2 gr., en pilules,bols, ou dans du vin, etc.<br \><br \>
A L'EXTÉRIEUR. — Décoction, pour lotions, fomentations, injections, gargarismes, cataplasmes, etc.
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les quotidiennes et quartes automnales, je porte la dose à 30, 60 et même 80 gr., divisée en quatre, cinq ou six prises pour chaque intervalle d'accès. C'est à l'élévation des doses, selon les cas, que je dois les succès constants que j'obtiens. La décoction et le vin que je fais préparer sont toujours très concentrés. Ainsi que le pratiquait Sydenham pour l'administration du quinquina, je fais reprendre l'usage de l'écorce de saule le huitième jour depuis la dernière dose, et je reviens jusqu'à trois ou quatre fois à cet usage en laissant toujours huit ou quinze jours d'intervalle ; quelquefois je donne alors le fébrifuge pendant trois ou quatre jours.
Dans les fièvres automnales rebelles, avec bouffissure, engorgement splénique, je me suis bien trouvé de l'addition de sel commun à l'écorce de saule, dans la proportion de 1 gr. pour 5 ou 6 gr. de poudre de cette écorce, administrés trois ou quatre fois dans l'intermission. Je mêle ce sel au vin de saule dans les mêmes proportions pour chaque dose de vin, au moment de son administration. J'emploie aussi, dans ces cas, le vin concentré de saule et d'absinthe, avec addition de cendre de genêt ou de genévrier. Lateinture d'écorce de saule, celle d'absinthe et de semences d'angéliqueme servent, mêlées, à composer un vin fébrifuge extemporané. J'ai mis en usage avec succès la formule suivante d'après Bouillon-Lagrange : écorce de saule blanc et racine de benoite, de chaque 30 gr. ; faites bouillir dans 1/2 litre d'eau et réduire à 400 gr. ; ajoutez : hydrochlorate d'ammoniaque 1 à 2 gr. ; sirop d'écorce d'orange 30 gr., à donner en deux fois au malade à une heure de distance. Cette dose doit être répétée deux ou trois fois dans l'intervalle des accès, suivant le type et l'intensité de la fièvre.
Dans les cas d'hydropisie accompagnant les fièvres intermittentes, j'ai associé avec avantage à l'écorce de saule la racine de raifort sauvage ou celle de bryone, à dose diurétique et légèrement laxative, les baies de genièvre concassées et la semence de moutarde blanche infusées dans le vin blanc, la bière ou le bon cidre.
J'ai employé l'écorce de saule avec un succès incontestable, comme moyen de préserver des fièvres intermittentes les habitants qui, constamment soumis aux influences marécageuses, en étaient atteints chaque année. Je pourrais citer vingt familles indigentes qui, par l'usage habituel, au printemps et en automne, de la décoction ou de la simple infusion à froid d'écorce fraîche de saule, se sont délivrées de ce fléau périodique et de la misère qui en était la conséquence. Je citerai, comme le plus remarquable, le fait suivant. La famille Pinchedé, composée du père, de la mère, et de huit enfants, habitant la vallée humide de la Liane (où ces fièvres sont devenuesendémiques depuis l'établissement de fossés qui longent le chemin de fer), et soumise, en outre, aux effets débilitants d'une position voisine de l'indigence, était atteinte chaque année, depuis cinq ans, de fièvres d'accès de divers types. Cette famille était littéralement ruinée par l'emploi réitéré du sulfate de quinine. Il m'a suffi, durant le printemps de 1847, de la mettre à l'usage d'une forte décoction de saule, et de revenir dans le cours de l'été, pendant deux ou trois jours, à cet usage, pour la préserver de l'intoxication paludéenne. Le même moyen, réitéré en 1848, a également réussi. De tels résultats, qu'il est d'autant plus facile d'obtenir que le saule croît en abondance dans les lieux ou sévissent généralement les fièvres intermittentes, sont de nature à fixer l'attention des philanthropes.
L'écorce de saule peut être administrée comme tonique dans tous les cas où l'emploi du quinquina est indiqué. J'ai fait cesser des diarrhées chroniques, des hémorrhagies passives, des leucorrhées, des gastralgies, par le seul usage de la décoction aqueuse, du vin, de la teinture ou de la poudre d'écorce de cet arbre. Lorsque, dans les diarrhées chroniques, il existe une grande susceptibilité des voies digestives jointe à la débilité, j'associe l'écorce de saule, en décoction ou en teinture, au sirop diacode administré à