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civilisation des survivances de coutumes du même genre ; l'énormité des repas pris à l'occasion de baptêmes ou de funérailles, le volume, excessif pour l'estomac, des repas pris lors de nos grandes fêtes religieuses. Et à cela s'ajoute le gaspillage de temps auquel donnent lieu les pèlerinages des catholiques. La contrepartie nous est fournie par les jeûnes que prescrivent les religions de caractère universel et qui semblent subsister tout exprès pour nous apprendre comment les populations primitives procédaient. Il suffit aux médecins de constater le fait démontré que ces jeûnes ont pour résultat de compromettre la nutrition, et agissent défavorablement sur le développement du corps (Morgulis, ''loc. cit.''). Les écoliers subissent une perte de poids, les adultes ont dans une certaine mesure des troubles scorhutiques, pellagreux, oculaires<ref>Nombreux renseignements dans Flinker (A. D.), ''Religiöse Fasten i. hygien. und sozialpolit. Beziehung. Vierteljahrsschr. öffenttl. Gesundspflege'', 40, 1908 345-359 ; Krünitz (J. G.), ''Ökonom-technolog. Enzyklopädie'', Bd. 12, 283, avec nombreux renseignements sur le XVIIIe siècle.</ref>. La population catholique jeûne environ 100 jours par an, les catholiques grecs bien plus encore, et il y a, dans le nombre, des journées d'inanition religieuse complète. S'agit-il de cérémonies commémorant des périodes de famine du passé ? Le jeûne est-il en rapport avec la constitution de provisions d'hiver, comme on le voit chez les animaux qui se montrent extrêmement économes de ces provisions ? Faut-il classer ce fait dans le ''filum'' des idées de la mortification, du renoncement méritoire, destiné à rendre l'âme plus libre ? Enfin il se peut très bien que l'usage du jeûne se rattache à des prescriptions hygiéniques ou fasse partie des idées très répandues que constituent les tabous.
On s'est peu occupé de toutes ces catégories de faits et pourtant le « côté idéal de la vie » mérite, bien entendu, une sérieuse attention. Hahn objecte à l'ethnologie sa tendance à considérer la notion d'utilité comme le seul ressort agissant de toute l'activité économique et surtout de tout « devenir » historique, comme si, selon la conception régnante au XIXe siècle, comme si toute chose se mesurait en fonction du succès, évalué lui-même en marks et en pfennigs, ou, mieux encore, en dollars, ce qui assimile une grande découverte philosophique ou physique à l'acquisition d'un sac de pommes de terre.