Lobélie (Cazin 1868)
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Lobélie
Nom accepté : Lobelia siphilitica
Rapuntium Americanum. Tourn.
Lobélie antisyphilitique, — cardinale bleue.
LOBÉLIACÉES. Fam. nat. — SYNGÉNÉSIE MONOGAMIE. L.
Cette lobélie (Pl. XXIV), trouvée par Kalm, élève de Linné, dans les forêts marécageuses de l'Amérique septentrionale, est cultivée depuis longtemps dans nos jardins sous la dénomination de cardinale bleue. Son nom scientifique lui vient de ce qu'elle a été consacrée à la mémoire du célèbre botaniste flamand Math. Lobel, médecin de Jacques Ier, roi d'Angleterre.
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Description. — Racine de la grosseur d'une plume à écrire, d'une couleur gris-jaunâtre, marquée de stries circulaires et longitudinales. — Tige droite, herbacée à peine rameuse, un peu anguleuse, s'élevant de 75 centimètres à 1 mètre de hauteur - Feuilles alternes, sessiles, ovales-lancéolées, dentées. — Fleurs médiocrement pédonculées, axillaires et solitaires ; — Galice à cinq découpures lancéolées, aiguës. — Corolle d'un beau bleu, un peu hérissée sur ses angles extérieurs. — Limbe bilahié, à cinq lobes, deux supérieurs, trois inférieurs plus grands. — Cinq étamines à anthères réunies. — Un ovaire inférieur. — Un stigmate souvent hispide et bilobé. — Fruit : capsule ovale, biloculaire, polysperme.
Parties usitées. — La racine.
Récolte. — Comme toutes les racines.
[Culture. — Cette plante, que l'on ne trouve guère que dans les jardins d'agrément, demande la terre de bruyère et une exposition semi-ombragée ; on la multiplie par semis en pépinière ou sur couche, par éclats de pieds ou par boutures des racines.]
Propriétés physiques et chimiques.— Cette racine est d'une saveur d'abord sucrée, puis un peu âcre et nauséeuse, laissant dans la bouche une impression durable. Elle exhale une odeur vireuse. Boissel[1], qui a analysé cette plante, y a trouvé une matière grasse de consistance butyreuse, une matière sucrée, du mucilage, du malate de potasse, des traces d'une matière amère très-fugace, quelques sels inertes et du ligneux.
La lobélie agit comme diurétique, sudorifique, etc., lorsqu'on la donne à faible dose ; mais, à hautes doses, elle devient éméto-cathartique. Depuis longtemps, les sauvages du Canada en employaient la racine contre les maladies vénériennes, lorsque l'anglais Johnson obtint leur secret à prix d'argent et le communiqua au voyageur Kalm. Suivant ce dernier[2] et d'autres auteurs, les symptômes les plus graves de la syphilis cèdent à son usage, et une guérison parfaite en est toujours le résultat. Les voyageurs s'accordent à dire que peu de médicaments produisent des effets aussi prompts et aussi heureux. Le traitement canadien était très-simple : on faisait bouillir les racines de quatre ou six lobélies, suivant la gravité ou l'ancienneté du mal, et le malade buvait le plus possible de cette décoction, qu'on employait aussi à l'extérieur pour déterger les ulcères. Le traitement durait quinze jours. Dans les affections syphilitiques opiniâtres, les Canadiens associent à la lobélie diverses autres plantes, et entre autres le renunculus abortivus, qui est beaucoup plus âcre.
Dupau[3] dit avoir vu cette substance, employée seule, guérir quelques malades. Les autres observations qu'il cite de malades auxquels il administrait en même temps le mercure, ne peuvent fournir aucune preuve en faveur de la lobélie. Essayée, il y a environ soixante ans, à Montpellier, elle n'a pas répondu aux espérances qu'elle avait fait concevoir. « On ne peut douter, dit Loiseleur-Deslongchamps, que cette lobélie, très-âcre, très-stimulante, ne puisse, comme plusieurs autres plantes congénères, avoir des propriétés énergiques dont il soit possible de tirer parti dans certains cas ; mais ces propriétés n'ont point encore été assez méthodiquement éprouvées. On doit désirer que quelque médecin observateur entreprenne celte tâche facile, puisque cette plante se cultive sans beaucoup de soins dans nos jardins. »
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- ↑ Journal de pharmacie, 1re série, t. X, p. 623.
- ↑ Description d'un spécifique contre le mal vénérien ; Mémoire de l'Académie de l'Académie de Stockholm, t. XII, 1750 ; Ancien Journal de médecine, t. XII, p. 174.
- ↑ Journal de Paris, 1780, n° 299.
Lobélie brûlante
Nom accepté : Lobelia urens
LOBÉLIE BRULANTE (Lobelia urens, L.). — Cette espèce croît spontanément en France, et même aux environs de Paris, dans les landes de marais, dans les prés humides de Saint-Léger et près de Fontainebleau. Loiseleur-Deslongchamps l'a trouvée abondamment dans le département de
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la Mayenne, où, dit-il, on peut la cultiver dans les lieux frais et humides de cette contrée.
Description. — Racine chevelue, fibreuse, blanche. — Feuilles radicales, elliptiques arrondies au sommet, lisses, crénelées ; les supérieures lancéolées, serraturées, sessiles, d'un beau vert, très-éloignées les unes des autres. — Fleurs irrégulières, bleues, en épi. — Calice à cinq divisions égales, rudes, subulées, droites. — Corolle infundibuliforme, divisions de la lèvre inférieure étroites, lancéolées, pendantes, tube anguleux. — Cinq étamines réunies par les anthères. — Fruit au-dessous de la corolle, contenant des semences extrêmement petites.
Toute cette plante contient un suc âcre, caustique, laiteux, à l'instar des euphorbes, dont l'action sur l'estomac produit des vomissements, des évacuations alvines, des douleurs intestinales plus ou moins violentes, suivant la dose ingérée. Des paysans qui, par erreur, en firent usage pour se guérir de la fièvre, la prenant pour la petite centaurée, avec laquelle elle a, quand elle n'est pas en fleur, quelques rapports de forme, en ont éprouvé, dit Bonté[1], de cruelles coliques, des superpurgations, des anxiétés, des spasmes et même des convulsions. La fièvre a été guérie chez plusieurs.
« En suivant, dit Bodart, la proportion de l'influence des climats sur les constitutions humaines et sur celle des végétaux, on est en droit d'espérer que la lobélie brûlante, sagement dosée et convenablement préparée, offrira des résultats analogues aux propriétés de la lobélie syphilitique et du gaïac, auquel nous proposons de la substituer... On pourrait essayer depuis 1/2 jusqu'à 1 grain de ce suc, tempéré avec quelque substance acide ou mucilagineuse, et augmenter peu à peu suivant l'effet... Nous avons déjà remarqué, ajoute le même auteur, que nous nous plaignons du trop peu d'énergie de nos productions indigènes ; nous nous croyons obligés d'aller chercher au delà des mers des moyens de guérison : la lobélie brûlante offre un des plus forts arguments que l'on puisse opposer à cette erreur. Loin d'être trop peu active, nous sommes persuadé qu'elle ne le cède en rien à la lobélie de la Virginie, et qu'on doit plutôt s'occuper d'enchaîner sa virulence que des moyens de l'augmenter. »
Malgré ces judicieuses réflexions, la lobélie brûlante est restée dans l'oubli, et aucun médecin n'en a fait le sujet d'expériences positives.
(On s'est beaucoup occupé, dans ces derniers temps, de la lobélie enflée (lobelia inflata) et de son alcaloïde la lobéline. Leur étude ne peut entrer dans notre cadre, à cause de leur provenance exotique.)
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- ↑ Ancien Journal de médecine, t, XIV, p. 350.