Dictame (Cazin 1868)

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Dentelaire
Cazin, Traité des plantes médicinales, 1868
Digitale


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Nom accepté : Origanum dictamnus


DICTAME DE CRÈTE. Origanum dictamnus. L.

Origanum creticum. Bauh. — Origanum creticum, latifolium tomentosum. Tourn. — Dictamnus creticus. Pharm.

LABIÉES. Fam. nat. — DIDYNAMIE GYMNOSPERMIE. L.


Cette plante vivace, si célèbre dans les temps héroïques de la Grèce, croît


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spontanément dans l'île de Crète, sur le mont Ida. Elle est cultivée dans nos jardins pour la beauté de ses fleurs et pour son odeur suave.

Description. — Racines grêles, d'un blanc grisâtre, composées de fibres nombreuses, filiformes, ramifiées. — Tige velue, tétragone, rameuse, de 30 centimètres environ. — Feuilles opposées, courtement pétiolées en bas, sessiles en haut, arrondies, ou un peu ovales en cœur, épaisses, entières, blanches et tomenteuses à leurs faces, cassantes, parsemées de petites vésicules noirâtres et toujours vertes. — Fleurs purpurines, en épis terminaux un peu pendants et touffus, quadrangulaires ; ayant des bractées purpurines, larges, ovales, glabres (juin-juillet). — Calice cylindrique à cinq dents. — Corolle labiée ; lèvre supérieure échancrée, l'inférieure à trois lobes. — Etamines, quatre didynames. — Ovaire à quatre lobes, style simple, stigmate légèrement bifide. Fruit : quatre akènes ovales, renfermées dans le fond du calice.

Parties usitées. — Les feuilles et les sommités.

Culture et récolte. — On le multiplie de drageons, de boutures et de graines. Elle aime les lieux secs, une température chaude et craint les gelées. C'est pourquoi, dit Dumont de Courset, elle ne passe pas l'hiver en pleine terre ; mais on la peut cultiver dans les départements méridionaux de la France, de même qu'elle réussit en Italie et en Espagne. Après la dessiccation, le dictame doit être conservé dans des boîtes bien closes, afin qu'il ne perde ni son odeur, ni sa vertu.

Propriétés physiques et chimiques. — Le dictame est d'une odeur fragrante, d'une saveur chaude, aromatique et amère. On en retire par la distillation une petite quantité d'huile volatile d'un jaune rougeâtre, d'un goût âcre-aromatique, et d'une saveur très-pénétrante qui passe presque en totalité dans la teinture alcoolique qu'on prépare avec cette plante. D'après Neumann et Virey, oette plante contient du camphre comme la plupart des labiées.


PRÉPARATIONS PHARMACEUTIQUES ET DOSES.

A L'EXTÉRIEUR. — Infusion, 4 à 15 gr. pour 500 gr. d'eau bouillante, à vase clos.
Poudre, 2 à 4 gr. et plus.
Teinture, 4 à 8 gr. dans une potion stimulante, ou antispasmodique.

Vin (2 sur 20 à 30 de vin blanc ; 3 jours d'infusion), 60 à 100 gr.
Le dictame fait partie du mithridate, de la thériaque, du diascordium, de la confection d'hyacinthe, etc.


Le dictame jouissait chez les anciens d'une grande célébrité comme vulnéraire. Les chèvres sauvages, selon Aristote, blessées par les flèches des chasseurs, mangent du dictame pour se guérir. Dioscoride rapporte le même fait. Pline, Cicéron, Apulée, racontent qu'il suffisait aux cerfs blessés d'en manger pour faire sortir les dards de leurs blessures et les guérir presque sur-le-champ. Virgile[1] nous a laissé une élégante description de cette plante cueillie par Vénus sur le mont Ida pour panser la blessure d'Enée.

On sait aujourd'hui à quoi s'en tenir sur les merveilleuses propriétés attribuées au dictame de Crète. L'action évidemment stimulante de cette plante sur l'estomac, sur la matrice et sur le système nerveux, l'ont fait employer avec avantage dans l'atonie des voies digestives, dans la gastralgie, dans l'aménorrhée asthénique, etc. Mais elle ne mérite aucune préférence sur la mélisse, les menthes, le romarin, la sauge, qui sont plus communs et moins difficiles à cultiver. Toutefois, l'opinion des anciens, qui attribuent au dictame la propriété d'accélérer les accouchements difficiles, de favoriser l'expulsion du placenta, et de provoquer les menstrues, révèle des propriétés beaucoup plus énergiques, dues, suivant Peyrilhe, au pays où cette plante croît spontanément. Hippocrate paraît en avoir fait usage, soit comme emménagogue, soit pour déterminer l'expulsion du foetus. Que de plantes autrefois vantées comme possédant des vertus merveilleuses, et que l'on regarde maintenant comme inertes ! Se trompait-on complètement alors ? ou se trompe-t-on complètement aujourd'hui ?... Non ; passez ces

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  1. Æneid., lib. XII, vers 412.


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opinions contradictoires au crible de l'expérience, il vous restera toujours un peu de bon grain.

A l'extérieur, on l'employait en cataplasmes sur les plaies, les ulcères et les contusions, comme un puissant résolutif.


DICTAME BLANC (Voyez FRAXINELLE).