Cajanus cajan (PROTA)
Introduction |
Cajanus cajan (L.) Millsp.
- Protologue: Publ. Field Columbian Mus., Bot. Ser. 2(1) : 53 (1900).
- Famille: Papilionaceae (Leguminosae - Papilionoideae, Fabaceae)
- Nombre de chromosomes: 2n = 22
Synonymes
- Cajanus indicus Spreng. (1826).
Noms vernaculaires
- Pois cajan, pois d’Angole, ambrevade (Fr).
- Pigeon pea, Congo pea, red gram (En).
- Ervilha do Congo, feijão guandu, ervilha de Angola (Po).
- Mbaazi (Sw).
Origine et répartition géographique
Le pois cajan est originaire de l’Inde, où sa culture remonte à des milliers d’années. Il est arrivé en Afrique vers 2000 av. J.-C. ou même avant, et un centre secondaire de diversité s’est développé en Afrique de l’Est. Avec les conquêtes et la traite des esclaves, il a gagné les Amériques, probablement aussi bien via l’Atlantique que le Pacifique. De nos jours, il est cultivé dans l’ensemble des régions tropicales, mais c’est surtout dans le sous-continent indien et en Afrique de l’Est qu’il est important. Il est inconnu à l’état sauvage, mais on le trouve souvent échappé des cultures et naturalisé.
Usages
En Afrique, les graines sèches de pois cajan s’emploient souvent dans des sauces en accompagnement d’aliments de base comme le manioc, l’igname et le riz. Les graines mûres se consomment frites ou cuites à l’eau, souvent après trempage, ou bien on les fait cuire en bouillie. Dans le sous-continent indien, le pois cajan est surtout utilisé comme légume sec, sous forme de “dal” (graines trempées, séchées, décortiquées et cassées), et les communautés indiennes vivant en Afrique conservent cet usage. La consommation des pois et des gousses immatures comme légume, en soupe ou en sauce, est courante dans de nombreux pays africains. La conservation des graines vertes, en boîte ou en surgelé, se pratique surtout en Amérique centrale. En Asie, on peut utiliser le pois cajan à la place du soja pour confectionner le tempeh ou le tofu.
Les parties végétatives constituent un excellent fourrage et les graines entrent aussi dans l’alimentation animale. Les sous-produits du dal (les téguments et les cotylédons brisés) s’emploient en Inde pour nourrir le bétail et les volailles, mais aussi au Kenya et au Malawi.
Le pois cajan est utile pour les haies et les brise-vent sur sols secs, ainsi que dans des systèmes agroforestiers (par ex. dans les systèmes de cultures en allées, où on le taille pour fournir un engrais vert). Il se cultive aussi comme plante d’ombre, de couverture, ou comme support pour la vanille. Grâce à son système racinaire étendu, l’azote qu’il fixe et le mulch que procurent ses feuilles tombées, le pois cajan améliore le sol. C’est l’un des hôtes du ver à soie (Madagascar) et de la cochenille à laque. Les tiges et les rameaux, en particulier ceux des cultivars à cycles moyen et long, sont utilisés pour confectionner des paniers, des toitures, des clôtures, et aussi comme combustible. Au Nigeria, les tiges servent au tuteurage de l’igname. Le pois cajan trouve tout un éventail d’applications en médecine traditionnelle. La diarrhée, la blennorragie, la rougeole, les brûlures, les infections oculaires, les douleurs d’oreille, les maux de gorge, les douleurs gingivales ou dentaires, l’anémie, les vers intestinaux, les vertiges et l’épilepsie se traitent avec des préparations de feuilles. Des préparations de racines se prennent pour soigner la toux, les problèmes gastriques et la syphilis. On applique de la cendre des tiges sur les plaies et on mastique les rameaux et les racines contre les douleurs dentaires. Les graines réduites en poudre s’appliquent en cataplasme sur les enflures. A Madagascar, on se sert des feuilles pour se nettoyer les dents.
Production et commerce international
D’après les statistiques de la FAO, la production mondiale de pois cajan en 1999–2003 s’élevait à 3,1 millions de t/an sur 4,3 millions d’ha ; l’Inde est le principal pays producteur (2,5 millions de t sur 3,4 millions d’ha). Les principaux producteurs d’Afrique tropicale, en 1999–2003, ont été le Malawi (79 000 t sur 123 000 ha), l’Ouganda (78 000 t sur 78 000 ha), le Kenya (59 000 t sur 152 000 ha) et la Tanzanie (47 000 t sur 66 000 ha). La production annuelle au Mozambique est évaluée à 40 000 t. Au niveau mondial, la superficie cultivée en pois cajan a connu une augmentation régulière, passant de près de 2,8 millions d’ha au début des années 1960 à environ 4,3 millions d’ha aujourd’hui ; la production est passée quant à elle de 1,5–2 millions de t à presque 3 millions de t sur la même période.
Le pois cajan est consommé surtout localement et seules des quantités limitées entrent sur le marché international, pour lequel on ne dispose pratiquement pas de statistiques. Mais il arrive qu’une demande à l’export encourage fortement sa culture. Au Malawi et au Kenya, on a estimé qu’entre 1996–1998, 65% de la production de pois cajan avait été autoconsommée, 10% s’était vendue sur les marchés intérieurs, et 25% avait été exportée. Pour la Tanzanie, ces quantités se montaient respectivement à 35%, 10% et 55%. L’Inde est de loin le plus important importateur, suivie par le Proche-Orient. Sur le marché indien, le pois cajan africain doit surtout affronter la concurrence du pois cajan du Myanmar et des pois canadiens et français. Le pois cajan fait l’objet d’un commerce important en Afrique, souvent informel, par exemple entre le Mozambique et le Malawi et entre la Tanzanie et le Kenya. Au nord de la Tanzanie, la plus grande partie de la production de pois cajan est vendue au Kenya, où elle est très prisée par la communauté indienne.
Propriétés
La composition des graines mûres crues de pois cajan, par 100 g de partie comestible, est : eau 10,6 g, énergie 1435 kJ (343 kcal), protéines 21,7 g, lipides 1,5 g, glucides 62,8 g, fibres alimentaires 15,0 g, Ca 130 mg, Mg 183 mg, P 367 mg, Fe 5,2 mg, Zn 2,8 mg, vitamine A 28 UI, thiamine 0,64 mg, riboflavine 0,19 mg, niacine 3,0 mg, vitamine B6 0,28 mg, folates 456 μg et acide ascorbique 0 mg. La composition en acides aminés essentiels, par 100 g de partie comestible, est : tryptophane 212 mg, lysine 1521 mg, méthionine 243 mg, phénylalanine 1858 mg, thréonine 767 mg, valine 937 mg, leucine 1549 mg et isoleucine 785 mg. Les principaux acides gras, par 100 g de partie comestible, sont : acide linoléique 778 mg et acide palmitique 307 mg (USDA, 2004). La méthionine est l’acide aminé limitant, suivi par le tryptophane et la thréonine. Les facteurs antinutritionnels chez le pois cajan nigérian comprennent une activité d’inhibition de la trypsine, des tanins et des phytates.
La composition des graines immatures crues, par 100 g de partie comestible, est de : eau 65,9 g, énergie 569 kJ (136 kcal), protéines 7,2 g, lipides 1,6 g, glucides 23,9 g, fibres alimentaires 5,1 g, Ca 42 mg, Mg 68 mg, P 127 mg, Fe 1,6 mg, Zn 1,0 mg, vitamine A 67 UI, thiamine 0,40 mg, riboflavine 0,17 mg, niacine 2,2 mg, folates 173 μg et acide ascorbique 39 mg (USDA, 2004). Les feuilles contiennent 15–24% de protéines brutes. Des extraits de graines de pois cajan se sont avérés avoir une action contre la falciformation des globules rouges. On a attribué cette activité à la présence de phénylalanine et d’acide hydroxybenzoïque ; des composés voisins ont un effet encore plus prononcé.
Description
- Arbuste ou sous-arbrisseau érigé, atteignant 4 m de haut, très souvent cultivé comme plante annuelle, à racines atteignant 2 m de profondeur ; tige érigée, côtelée, atteignant 15 cm de diamètre ; rameaux nombreux, élancés.
- Feuilles alternes, 3-foliolées ; stipules linéaires, de 2–4 mm de long ; pétiole de (1–)1,5–6(–8) cm de long, cannelé au-dessus ; rachis de 0,5–3 cm de long, légèrement ailé ; stipelles filiformes, de 1–4 mm de long ; pétiolules de 1–4 mm de long ; folioles elliptiques à lancéolées, de 2,5–13,5 cm × 1–5,5 cm, aiguës, couvertes de petites glandes jaunes, vertes au-dessus, d’un gris-vert argenté en dessous.
- Inflorescence : fausse grappe axillaire de 3,5–12 cm de long ; pédoncule atteignant 8 cm de long ; bractées caduques, ovales, d’environ 8 mm × 5 mm, aiguës.
- Fleurs bisexuées, papilionacées ; pédicelle de 0,5–1,5 cm de long ; calice campanulé, velouté jaunâtre et glanduleux, tube de (3–)4–5(–6) mm de long, lobes de 3–5(–7) mm de long ; corolle jaune ou crème, étendard presque rond, de 12–22 mm de diamètre, jaune-rouge, orangé ou violet sur le dos, ailes obovales, de 15–20 mm × 6–7 mm, jaunes, à onglet, pétales de la carène de 14–17 mm × 5–7 mm, jaune-vert, à onglet ; étamines 10, dont 9 fusionnées et 1 libre ; ovaire supère, 1-loculaire, style courbe.
- Fruit : gousse droite ou en faucille de 2–10(–13) cm × (0,5–)1–1,5 cm, poilue, glanduleuse-ponctuée, déhiscente en 2 valves qui s’entortillent en spirale, septée entre les graines, à (2–)4–9 graines.
- Graines globuleuses à ellipsoïdes ou un peu carrées, de 4–9 mm × 3–8 mm × 3–6 mm, blanches, crème, brunes, violacées à presque noires, unies ou marbrées.
- Plantule à germination hypogée ; premières feuilles simples.
Autres données botaniques
Le genre Cajanus comporte 34 espèces. On connaît deux espèces sauvages de Cajanus en Afrique : Cajanus kerstingii Harms originaire d’Afrique occidentale et Cajanus scarabaeoides (L.) Thouars présente le long des côtes africaines et malgaches, et plus à l’intérieur des terres dans certains endroits. La première espèce ne se croise pas avec Cajanus cajan, mais la deuxième peut produire avec lui des hybrides ; on en connaît des hybrides spontanés, mais ils sont rares. Bien que l’utilisation de Cajanus kerstingii en alimentation humaine et animale ne soit pas documentée, il pourrait avoir un intérêt similaire au pois cajan. Au Sénégal, les rameaux de Cajanus kerstingii sont employés dans la construction des murs de huttes temporaires. D’autres espèces apparentées du pois cajan se trouvent en Asie et Australie.
En Inde, on distingue chez le pois cajan 10 groupes de maturité, que l’on combine d’ordinaire en quatre catégories : les cultivars à maturité extra précoce, précoce, moyenne et tardive (120, 145, 185, et plus de 200 jours après le semis, respectivement).
Croissance et développement
Les graines de pois cajan germent à des températures comprises entre 19–43°C, mais le plus rapidement à 20–30°C. La levée est complète 2–3 semaines après le semis. Si le développement végétatif débute lentement, après 2–3 mois la croissance s’accélère. La floraison (de 50% des plantes) commence 56–210 jours après le semis ; la maturité de la graine est atteinte normalement entre 95–260 jours. Dans les régions humides, la floraison et la fructification peuvent se prolonger toute l’année. La structure de la fleur du pois cajan favorise l’autogamie, mais on a noté jusqu’à 82% d’allogamie, en fonction de la présence et de l’activité des insectes pollinisateurs. Les racines du pois cajan ont des nodosités et fixent l’azote en association avec des souches de Bradyrhizobium et de Rhizobium.
Ecologie
Le pois cajan est cultivé dans les régions tropicales et subtropicales entre les latitudes de 30°N et 30°S. Les températures moyennes optimales se situent entre 18–29°C ; le gel n’est pas toléré. Au-dessus de 29°C, l’humidité du sol et sa fertilité peuvent être des facteurs limitants. Les précipitations annuelles optimales sont de 600–1000 mm, mais le pois cajan supporte la sécheresse et peut être cultivé dans des régions où les précipitations sont inférieures à 600 mm. Il pousse également dans des régions où les précipitations annuelles sont supérieures à 2500 mm. La floraison est accélérée par les jours courts ; il existe très peu de types vraiment insensibles à la photopériode. En Afrique, le pois cajan est cultivé jusqu’à 2000(–2400) m d’altitude. Si sa culture est possible sur toutes sortes de sols, l’asphyxie racinaire ne lui convient pas. Des terres drainées à capacité de rétention d’eau intermédiaire et un pH de 5–7 lui sont favorables. Une salinité de 6–12 dS/m est tolérée par de nombreux cultivars.
Multiplication et plantation
Le pois cajan se multiplie par graines. Le bouturage réussit rarement. La longévité des graines dépend des conditions de stockage ; dans les banques de gènes, à température et humidité faibles, elles survivent pendant des décennies. Le poids de 1000 graines est de 30–280 g ; en Afrique, les cultivars à grandes graines sont les plus communs. Les modes de plantation varient largement et les graines peuvent se semer à la volée ou en lignes, avec des écartements de 40–200 cm × 20–180 cm. Les plants sont difficiles à repiquer. En Afrique et en Inde, le pois cajan se cultive souvent en association, habituellement avec des céréales, mais également avec le manioc et le cotonnier. Il est bien adapté aux systèmes de cultures associées en raison de sa croissance initiale lente, qui réduit la compétition avec la plante qu’il accompagne, et de sa maturité tardive, qui permet d’étaler les besoins de main d’œuvre au moment de la récolte. Après la récolte de l’autre culture, le pois cajan à cycle long continue à croître et à produire des graines, tout en protégeant le sol. Le pois cajan donne de bons résultats lorsqu’on le fait pousser en lignes uniques alternées avec deux lignes de céréales (du sorgho ou du mil par ex.) ou bien du cotonnier ou de l’arachide. En Ouganda et à l’île Maurice, on le fait généralement pousser pour améliorer le champ vers la fin d’un cycle de rotation.
Des cultures in vitro ont été initiées avec succès à partir de diverses sources de tissus, dont les feuilles, les pousses et les racines, et tant l’organogenèse que l’embryogenèse somatique sont possibles. On a également obtenu des plantes régénérées par culture de tissus et par différenciation directe à partir des feuilles.
Gestion
En tant que plante agricole, le pois cajan est considéré comme assez primitif ; les génotypes de grande taille en particulier sont assez encombrants à cultiver. Il est nécessaire de lutter contre les adventices en raison de la lenteur de la croissance au départ. La réponse aux engrais est rarement économique ; une fumure aux phosphates est généralement recommandée, à la dose de 20–100 kg/ha. Mais en Afrique tropicale, l’épandage d’engrais sur le pois cajan n’est pas courant. Les résidus d’azote laissés par une culture de pois cajan peuvent avoisiner les 40 kg/ha. En Inde, l’absorption en nutriments d’une culture de pois cajan produisant 1,2 t de graines et 6,3 t de paille par ha a été évaluée à 85 kg de N, 8 kg de P, 16 kg de K, 23 kg de Ca, 15 kg de Mg, 9 kg de S, 38 g de Zn, 31 g de Cu, 128 g de Mn et 1440 g de Fe par ha. Bien que le vent puisse coucher les plantes, le tuteurage ne se pratique pas. L’irrigation comme moyen ultime de sauver une culture peut être économique ; en agriculture intensive de cultivars à cycle court, l’irrigation peut s’avérer nécessaire. Le pois cajan se cultive également comme culture de repousse, par ex. en Afrique centrale et orientale. Mais pour une repousse rapide, il ne faut pas tailler les plantes à moins de 50 cm. On peut éliminer une partie des pousses pour diminuer la compétition.
Maladies et ravageurs
Les maladies fongiques du pois cajan les plus importantes en Afrique tropicale sont la cercosporose (Mycovellosiella cajani, synonyme Cercospora cajani), la fusariose (Fusarium udum) et l’oïdium (Leveillula taurica). Si dans les régions sèches la cercosporose n’a qu’un faible impact, dans les régions humides elle peut être à l’origine de graves pertes. On peut lutter contre elle en pulvérisant régulièrement des fongicides tels que le bénomyl et le mancozèbe, ainsi qu’en recourant à des semences exemptes de maladies et en choisissant des terres éloignées de pois cajan pérenne, qui peuvent constituer une source d’inoculum. On a identifié des lignées de pois cajan résistantes à la cercosporose. Les mesures de lutte préconisées contre la fusariose, propagée par la graine et par le sol, sont la culture associée, la rotation avec des céréales, la jachère, l’élimination des plantes malades, le traitement des semences aux fongicides, et le recours à des semences et des champs exempts de maladies ; mais la meilleure stratégie reste l’utilisation de cultivars résistants. Des lignées moyennement résistantes sont disponibles dans tous les groupes de maturité. La fusariose fait généralement plus de dégâts dans les cultures de repousses, et ce à partir de la seconde année. Contre l’oïdium, il est suggéré de recourir à des fongicides et de choisir des champs qui ne soient pas situés à proximité de pois cajan pérenne ; des lignées résistantes ont été repérées. Le virus de la mosaïque et de la stérilité du pois cajan (PPSMV), maladie principale du pois cajan en Inde, semble ne toucher que l’Asie. Le pois cajan est sensible aux nématodes à galles (Meloidogyne spp.) et aux nématodes réniformes (Rotylenchus spp.). Des lignées résistantes ont été identifiées en Inde.
Les insectes ravageurs sont importants dans toutes les régions où l’on cultive le pois cajan. Les plus importants sont les punaises suceuses de gousses (essentiellement Clavigralla spp.), les foreurs de gousses (dont Helicoverpa armigera et Maruca vitrata, synonyme Maruca testulalis) et les mouches des gousses du pois cajan (Melanagromyza chalcosoma). L’emploi d’insecticides est recommandé, mais la lutte chimique s’avère malaisée et onéreuse sur les plantes de grande taille à croissance indéterminée. On a repéré des lignées résistantes soit à Helicoverpa armigera soit à Melanagromyza chalcosoma, soit aux deux, ainsi qu’à Maruca vitrata ; toutefois ces résistances n’ont pas été incorporées dans des cultivars qui auraient des graines de saveur, de couleur et de taille acceptables pour les paysans. La lutte intégrée, qui fait appel à l’emploi d’insecticides de façon judicieuse, au recours à des cultivars tolérants ou résistants, à la mise en œuvre de pratiques agronomiques (date de plantation) et à la lutte biologique utilisant les prédateurs naturels, est actuellement à l’étude. La longue période de floraison du pois cajan fait que les dégâts causés par des ravageurs tels que Helicoverpa armigera et d’autres insectes foreurs, ainsi que par les mouches des fruits Agromyza, peuvent être compensés par de nouvelles vagues de croissance. Les bruches (Callosobruchus spp.) constituent d’importants ravageurs du pois cajan, qui infestent aussi bien les gousses au champ que les graines stockées. Une conservation dans des récipients propres et sous forme de pois cassés minimise ces attaques. Parmi les autres moyens de lutte, on peut citer le séchage au soleil, le traitement insecticide et la conservation en mélangeant les graines avec des cendres ou divers produits végétaux tels que des extraits ou des feuilles du tabac ou du nim (Azadirachta indica A.Juss.)
Récolte
Les gousses immatures de pois cajan se récoltent sur une longue période dans les jardins familiaux ou sur les cultures en haies, comme c’est l’usage en Afrique. Pour les graines mûres, on coupe généralement la plante au niveau du sol lorsque la plupart des gousses sont arrivées à maturité ; à ce stade il reste encore de nombreuses feuilles vertes. Un autre moyen est de cueillir les gousses mûres sur le pied, parfois en plusieurs passages étant donné que la plante mûrit souvent de façon inégale. La récolte mécanisée des gousses mûres est possible avec des moissonneuses-batteuses, mais seulement sur des cultivars de petite taille à maturité uniforme et à gousses situées au même niveau au-dessus du sol.
Rendement
En Afrique, les rendements en graines de pois cajan atteignent en moyenne 600 kg/ha, avec des variétés locales traditionnelles en culture associée. Pour l’Ouganda on a enregistré des rendements de 1000 kg/ha. Dans des conditions optimales et en culture pure, on peut atteindre 5000 kg/ha. Si les rendements sont faibles, ce peut être dû en partie au fait qu’une part considérable des graines est récoltée et consommée avant maturité. Les rendements en fourrage sont de 3–8 t/ha, mais dans certains essais on a obtenu 50 t/ha. Comme combustible, on obtient généralement 7–10 t/ha, mais des rendements atteignant 30 t/ha ont été enregistrés.
Traitement après récolte
Une fois séchées en plein air, les plantes de pois cajan entières sont battues d’habitude manuellement, ou par piétinement du bétail, puis on procède au nettoyage des graines. Les pois frais écossés sont vendus au marché comme légume. On peut transformer les graines sèches en pois cassés, par la voie humide après aspersion des tas de graines, ou par la voie sèche au moulin.
Ressources génétiques
Les collections de ressources génétiques du pois cajan au niveau mondial couvrent l’Inde et plusieurs pays africains, ainsi que certaines îles des Caraïbes. Plus de 13 000 échantillons de Cajanus cajan sont disponibles dans la collection de l’Institut international de recherche sur les plantes cultivées des zones tropicales semi-arides (ICRISAT, Patancheru, Inde), et divers sélectionneurs et instituts détiennent des lots de cette collection. Quelque 18 espèces sauvages de Cajanus et au moins 39 autres espèces de la sous-tribu Cajaninae y sont representées. Des espèces pérennes apparentées sont régulièrement cultivées dans le jardin botanique de l’ICRISAT, dont l’objectif est de couvrir la totalité des taxons et des régions de provenance. En Afrique tropicale, le National Genebank du Kenya de Kikuyu possède une collection de plus de 1200 entrées de pois cajan. Les graines de pois cajan sont orthodoxes en conservation.
Sélection
L’amélioration génétique du pois cajan, qui a débuté en Inde au début du XXe siècle, a porté essentiellement sur la sélection de variétés locales plus productives et à maturité précoce. C’est au début des années 1970, à l’Institut international d’agriculture tropicale (IITA), que des travaux concertés d’amélioration ont commencé, pour mettre au point des cultivars de petite taille à croissance déterminée. Au sein du système du Groupement consultatif de la recherche agronomique internationale (GCRAI), l’ICRISAT est désormais chargé de l’amélioration du pois cajan. Jusqu’à présent, les programmes nationaux de sélection en Afrique ont surtout compté sur les lignées et les sélections à partir des variétés locales produites par l’ICRISAT, mais certains pays (par ex. le Kenya, l’Ouganda et le Rwanda) ont mis au point leurs propres programmes de croisements.
L’amélioration génétique du pois cajan est surtout orientée sur des rendements élevés, et sur les préférences des consommateurs et des minotiers. Un rendement régulier peut être obtenu en sélectionnant pour l’insensibilité à la photopériode, la résistance aux maladies et ravageurs, et l’aptitude à la culture associée ainsi qu’aux récoltes multiples. On dispose aujourd’hui de génotypes améliorés pour la plupart de ces caractéristiques. La résistance existe chez les espèces apparentées sauvages et il y a des types prometteurs qui sont résistants aux maladies et ravageurs. En raison de la fréquence de la fécondation croisée, les méthodes traditionnelles pratiquées sur les plantes autogames, telles que la sélection généalogique, n’ont pas été très efficaces. De plus, la sélection est compliquée par une importante interaction génotype × environnement. Chez Cajanus cajanifolius (Haines) Maesen, une stérilité mâle génétique est disponible et on l’emploie dans les programmes de sélection d’hybrides. Cependant, les coûts de production de semences hybrides sont élevés, et on cherche une source de stérilité mâle cytoplasmique. Parmi les cultivars indiens à cycle court, on peut citer ‘Prabhat’, ‘T21’, ‘UPAS-120’ ; des cultivars à cycle moyen sont ‘C 11’, ‘BDN-1’, ‘Pusa Ageti’, ‘Sharda’ et plusieurs lignées ‘ICP’ mises au point par l’ICRISAT. Des cultivars hybrides sont également disponibles. Au Kenya, parmi les cultivars améliorés, on peut citer ‘NPP 670’, ‘KAT 60/8’ (tous deux mis au point au Kenya) et ‘ICPL 87091’. Ceux-ci sont toutefois plus sensibles aux insectes ravageurs que les variétés locales en raison de leur croissance déterminée et du fait qu’ils commencent à fleurir lorsque les populations de ravageurs sont importantes. Par ailleurs, les graines de ‘KAT 60/8’ et de ‘ICPL 87091’ sont relativement petites, ce qui en fait des produits moins prisés sur les marchés locaux que les grosses graines des variétés locales. Le cultivar ‘ICP 9145’, résistant à la fusariose et dérivé d’une variété locale recueillie au Kenya par l’ICRISAT, a été commercialisé avec succès au Malawi. Les lignées ‘ICPL 87’ et ‘ICPL 146’ sont recommandées en Tanzanie, au Malawi et au Zimbabwe comme cultivars aptes à la culture pure et aux récoltes multiples. Le transfert de la résistance aux insectes (à partir de Cajanus scarabaeoides (L.) Thouars), d’une teneur élevée en protéines (plusieurs espèces), d’une meilleure résistance à la sécheresse (Cajanus acutifolius (Benth.) Maesen), d’une tolérance à la salinité du sol (Cajanus albicans (Wight & Arn.) Maesen) ou du caractère annuel (Cajanus platycarpus (Benth.) Maesen) n’a pas encore été concrétisé. Des lignées tolérantes aux insectes ont cependant été identifiées.
Des plantes transgéniques de pois cajan, exprimant un gène du niébé inhibiteur de la protéase ou un antigène protecteur du virus de la peste bovine, ont été obtenues par transfert de gènes réalisé au moyen d’Agrobacterium ou à l’aide d’un bombardement de microparticules.
Perspectives
Si l’on connaît bien le pois cajan comme culture polyvalente, il faudrait encourager sa culture notamment dans les régions semi-arides, auxquelles il est bien adapté en raison de sa tolérance à la sécheresse et aux sols peu fertiles, ainsi que de sa capacité à reprendre suite à un stress environnemental ou biotique. Son potentiel important en matière de rendement en graines est prometteur dans des milieux plus favorables. Indiqué dans les systèmes agroforestiers, pour les jardins de petits producteurs et pour la culture en haies, le pois cajan convient aussi aux jachères améliorées de courte durée. Il s’adapte également dans les systèmes plus intensifs. Des cultivars à cycle court, insensibles à la photopériode, de petite taille, à port déterminé et à croissance rapide, possédant également un indice de récolte élevée, pourraient constituer l’idéotype à rechercher. A l’export (vers l’Inde principalement), le pois cajan africain doit faire face à une forte concurrence et à une productivité plus élevée ; des systèmes de commercialisation plus efficaces sont nécessaires afin qu’il reste compétitif sur ce marché.
Références principales
- Hillocks, R.J., Minja, E., Mwaga, A., Silim Nahdy, M. & Subrahmanyam, P., 2000. Diseases and pests of pigeonpea in eastern Africa: a review. International Journal of Pest Management 46(1): 7–18.
- lo Monaco, G., 2003. The competitiveness of African pigeonpea exports in international markets. Socio-economics and Policy Working Paper Series No 15. ICRISAT, Bulawayo, Zimbabwe. 24 pp.
- Nene, Y.L., Hall, S.D. & Sheila, V.K., 1990. The pigeonpea. CAB International, Wallingford, United Kingdom & ICRISAT, Patancheru, India. 490 pp.
- Reddy, M.V., Raju, T.N. & Lenné, J.M., 1998. Diseases of pigeonpea. In: Allen, D.J. & Lenné, J.M. (Editors). The pathology of food and pasture legumes. CAB International, Wallingford, United Kingdom. pp. 517–558.
- Silim, S.N., Mergeai, G. & Kimani, P.M. (Editors), 2001. Status and potential of pigeonpea in eastern and southern Africa. Proceedings of a regional workshop, Nairobi, Kenya, 12–15 September 2000. Gembloux Agricultural University, Gembloux, Belgium & ICRISAT, Patancheru, India. 228 pp.
- Silim, S.N., Tuwafe, S. & Singh, L. (Editors), 1994. Improvement of pigeonpea in eastern and southern Africa. Annual research planning meeting 1993, Bulawayo, Zimbabwe, 25–27 October 1993. ICRISAT, Patancheru, India. 146 pp.
- Singh, L., Silim, S.N., Baudoin, J.P., Kimani, P.M. & Mwang’ombe, A.W., 2001. Pigeon pea. In: Raemaekers, R.H. (Editor). Crop production in tropical Africa. DGIC (Directorate General for International Co-operation), Ministry of Foreign Affairs, External Trade and International Co operation, Brussels, Belgium. pp. 360–371.
- van der Maesen, L.J.G., 1985. Cajanus DC. and Atylosia W.& A. (Leguminosae): a revision of all taxa closely related to the pigeonpea, with notes on other related genera within the subtribe Cajaninae. Wageningen Agricultural University Papers 85–4. Wageningen Agricultural University, Wageningen, Netherlands. 225 pp.
- van der Maesen, L.J.G., 1989. Cajanus cajan (L.) Millsp. In: van der Maesen, L.J.G. & Somaatmadja, S. (Editors). Plant Resources of South-East Asia No 1. Pulses. Pudoc, Wageningen, Netherlands. pp. 39–42.
- Whiteman, P.C., Byth, D.E. & Wallis, E.S., 1985. Pigeonpea (Cajanus cajan (L.) Millsp.). In: Summerfield, R.J. & Roberts, E.H. (Editors). Grain legume crops. Collins, London, United Kingdom. pp. 658–698.
Autres références
- Akojie, F.O.B. & Fung, L.W.-M., 1992. Antisickling activity of hydroxybenzoic acids in Cajanus cajan. Planta Medica 58: 317–320.
- Aulakh, M.S., Sidhu, B.S., Arora, B.R. & Singh, B., 1985. Content and uptake of nutrients by pulses and oilseed crops. Indian Journal of Ecology 12(2): 238–242.
- Berhaut, J., 1976. Flore illustrée du Sénégal. Dicotylédones. Volume 5. Légumineuses Papilionacées. Gouvernement du Sénégal, Ministère du Développement Rural et de l’Hydraulique, Direction des Eaux et Forêts, Dakar, Senegal. 658 pp.
- du Puy, D.J., Labat, J.N., Rabevohitra, R., Villiers, J.-F., Bosser, J. & Moat, J., 2002. The Leguminosae of Madagascar. Royal Botanic Gardens, Kew, Richmond, United Kingdom. 750 pp.
- Ene-Obong, H.N., 1995. Content of antinutrients and in vitro protein digestibility of the African yambean, pigeon and cowpea. Plant Foods for Human Nutrition 48: 225–233.
- Gillett, J.B., Polhill, R.M., Verdcourt, B., Schubert, B.G., Milne-Redhead, E., & Brummitt, R.K., 1971. Leguminosae (Parts 3–4), subfamily Papilionoideae (1–2). In: Milne-Redhead, E. & Polhill, R.M. (Editors). Flora of Tropical East Africa. Crown Agents for Oversea Governments and Administrations, London, United Kingdom. 1108 pp.
- Hanelt, P. & Institute of Plant Genetics and Crop Plant Research (Editors), 2001. Mansfeld’s encyclopedia of agricultural and horticultural crops (except ornamentals). 1st English edition. Springer Verlag, Berlin, Germany. 3645 pp.
- Joshi, P.K., Parthasarathy Rao, P., Gowda, C.L.L., Jones, R.B., Silim, S.N., Saxena, K.B. & Jagdish Kumar, 2001. The world chickpea and pigeonpea economies: facts, trends, and outlook. ICRISAT, Patancheru, India. 62 pp.
- Kay, D.E., 1979. Food legumes. Crops and Product Digest No 3. Tropical Products Institute, London, United Kingdom. 435 pp.
- Mackinder, B., Pasquet, R., Polhill, R. & Verdcourt, B., 2001. Leguminosae (Papilionoideae: Phaseoleae). In: Pope, G.V. & Polhill, R.M. (Editors). Flora Zambesiaca. Volume 3, part 5. Royal Botanic Gardens, Kew, Richmond, United Kingdom. 261 pp.
- Mergeai, G., Kimani, P., Mwang’ombe, A., Olubayo, F., Smith, C., Audi, P., Baudoin, J. -P. & le Roi, A., 2001. Survey of pigeonpea production systems, utilization and marketing in semi-arid lands of Kenya. Biotechnologie, Agronomie, Société et Environnement 5(3): 145–153.
- Neuwinger, H.D., 2000. African traditional medicine: a dictionary of plant use and applications. Medpharm Scientific, Stuttgart, Germany. 589 pp.
- Polhill, R.M., 1990. Légumineuses. In: Bosser, J., Cadet, T., Guého, J. & Marais, W. (Editors). Flore des Mascareignes. Famille 80. The Sugar Industry Research Institute, Mauritius, l’Office de la Recherche Scientifique Outre-Mer, Paris, France & Royal Botanic Gardens, Kew, Richmond, United Kingdom. 235 pp.
- Popelka, J.C., Terryn, N. & Higgins, T.J.V., 2004. Gene technology for grain legumes: can it contribute to the food challenge in developing countries? Plant Science 167: 195–206.
- Remanandan, P. & Singh, L., 1997. Pigeonpea. In: Fuccillo, D., Sears, L. & Stapleton, P. (Editors). Biodiversity in trust: conservation and use of plant genetic resources in CGIAR Centres. Cambridge University Press, Cambridge, United Kingdom. pp. 156–167.
- Tabo, R., Ezueh, M.I., Ajayi, O., Asiegbu, J.E. & Singh, L., 1995. Pigeonpea production and utilization in Nigeria. International Chickpea and Pigeonpea Newsletter 2: 47–49.
- Thulin, M., 1989. Fabaceae (Leguminosae). In: Hedberg, I. & Edwards, S. (Editors). Flora of Ethiopia. Volume 3. Pittosporaceae to Araliaceae. The National Herbarium, Addis Ababa University, Addis Ababa, Ethiopia and Department of Systematic Botany, Uppsala University, Uppsala, Sweden. pp. 49–251.
- USDA, 2004. USDA national nutrient database for standard reference, release 17. [Internet] U.S. Department of Agriculture, Agricultural Research Service, Nutrient Data Laboratory, Beltsville Md, United States. http://www.nal.usda.gov/fnic/foodcomp. November 2004.
- van der Maesen, L.J.G., 2003. Cajaninae of Australia (Leguminosae: Papilionoideae). Australian Systematic Botany 16: 219–227.
- Westphal, E., 1974. Pulses in Ethiopia, their taxonomy and agricultural significance. Agricultural Research Reports 815. Centre for Agricultural Publishing and Documentation, Wageningen, Netherlands. 263 pp.
Sources de l'illustration
- Busson, F., 1965. Plantes alimentaires de l’ouest Africain: étude botanique, biologique et chimique. Leconte, Marseille, France. 568 pp.
Auteur(s)
- L.J.G. van der Maesen, Biosystematics Group, Wageningen University, Gen. Foulkesweg 37, 6703 BL Wageningen, Netherlands
Citation correcte de cet article
van der Maesen, L.J.G., 2006. Cajanus cajan (L.) Millsp. In: Brink, M. & Belay, G. (Editors). PROTA (Plant Resources of Tropical Africa / Ressources végétales de l’Afrique tropicale), Wageningen, Netherlands. Consulté le 16 décembre 2024.
- Voir cette page sur la base de données Prota4U.