Adonis (Pharmacopée malagasy)

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Aconit napel
Rakoto, Boiteau, Mouton, Eléments de pharmacopée malagasy
Aferombohitra
Figure 7 : Adonis, Adonis vernalis L. : 1 : coupe de la fleur, montrant le réceptacle conique sur lequel sont insérés les ovules très nombreux ; 2 : diagramme floral ; 3 : carpelles mûrs insérés sur le réceptacle ; 4 et 4 bis : forme des akènes ; 5 : plante fleurie.

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Notice 7 - ADONIS


Adonis vernalis L. (Renonculacées)

Plante qui n'existe pas à Madagascar (espèce d'Europe centrale et méridionale) et dont les essais de culture ont été infructueux. A remplacer par des substituants malagasy (voir ci-dessous).


Description

L'Adonis est une plante herbacée, vivace, de 15 à 20 centimètres de haut, portant des feuilles inférieures réduites à des écailles et des feuilles caulinaires (insérées sur la tige) sessiles, brièvement engaînantes à la base et glabres, à limbe très découpé, palmatiséqué, chacun des segments étant à son tour divisé en fines lanières. Fleurs généralement solitaires, terminales, grandes, d'un beau jaune. Chaque fleur compte 5 sépales d'un vert jaunâtre ; 15 à 16 pétales de forme générale ovale, plus ou moins aigus ou obtus et émarginés au sommet ; de très nombreuses étamines et de nombreux carpelles (une cinquantaine), libres entre eux, insérés sur un réceptacle conique. Fruits secs (akènes) de 5 à 6 millimètres de long et 2 à 3 millimètres de large, portant vers le sommet un petit bec recourbé, et ornés sur toute leur surface d'un fin réseau de nervures en relief et de poils courts (voir figure 7).

Partie utilisée

Toute la plante, sauf les racines ; on récolte de préférence au moment de la floraison, les fleurs étant les parties les plus riches en principes actifs.

Composition chimique

La plante sèche renferme encore environ 8 p. 100 d'eau et en outre : 18,65 p. 100 de cellulose et substances voisines ; 14,2 p. 100 de pentosanes ;


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14,1 p. 100 de protides ; 1,1 p. 100 d'amidon; 0,5 p. 100 de dextrine ; 10,2 p. 100 de cendres minérales ; 1,2 p. 100 de lévulose ; 2,9 p. 100 d'adonitol et de choline ; 3,37 p. 100 de résine et phytostérols (d'après F.W. Heyl, M.C. Hart et J.M. Schmidt, Journal American Chem. Soc., 40 (1918), 436-453). Gologorski et Agamyan (S.A.), in Gig. Sanit. (U.R.S.S.), 1944, n° 12, 30-34, ont isolé de cette drogue 225 milligrammes pour 100 grammes (0,225 p. 100) d'acide ascorbique ou vitamine C. Elle contient en outre des cardénolides et des hétérosides dérivés de ces corps dont le mélange est le principal responsable de son activité pharmacologique.

On donne le nom de cardénolides à des substances ayant le squelette général des stérols, mais avec une chaîne latérale ayant perdu 4 atomes de carbone et portant un cycle supplémentaire dû à la formation d'une lactone entre les carbones 21 et 23. Ces cardénolides ont tout d'abord été isolées de l'Adonis sous forme de mélange amorphe par L. J. Mercier et F. Mercier, Rev. Pharmacol et Thérap. Expér. (1927), 1-73, sous les noms d’adonidoside et adonivernoside. T. Reichstein et H. Rosenmund, Pharm. Acta Helvet, 15 (1940), 150-158, et 17 (1942), 176-184, ont été les premiers à obtenir à partir de l'adonidoside amorphe une substance cristallisée : la cymarine C30 H44 O9, point de fusion : 138°, qui se décompose par hydrolyse en un ose : le d-cymarose et en strophantidol, cardénolide en C23 H32 O6 qu'on retrouve dans les osides de divers Strophanthus africains. A. Katz et T. Reichstein, Pharm. Acta Helvet 22 (1947), 437-459, obtenaient ensuite à l'état cristallisé l’adonitoxine ou adonitoxoside, oside donnant par hydrolyse du l-rhamnose et une autre cardénolide : adonitoxogénine en C23 H32 O6, comme la précédente, mais de point de fusion: 178°, Bugrim (N.A.), et Kolesnikov (D.G.), Medicinskaya Promylennost (U.R.S.S.) 1960, fasc. 2, 19 et fasc. 7, 27, isolaient ensuite de la même plante la strophantidine et la K-strophantine-béta. Puis Z. Cekan et T. Pitra, Chemistry and Industry (London), 1960, 497, isolaient la 16-hydroxystrophantidine et l’acetyladonitoxine.

Avec la mise en oeuvre de la chromatographie, la composition de ces cardénolides allait se révéler beaucoup plus complexe encore qu'on ne l'avait imaginé. Pitra et Cekan, Planta Medica 9 (1961), 227, montraient, en effet, qu'on ne trouvait pas moins de 17 spots révélables par le réactif de Kedde dans un extrait de la plante. Reprenant ces travaux avec une technique plus perfectionnée encore, A. Pusz et S. Buechner, Arzneimittel- Forschung 12 (1962), 932-935, ont étudié la poudre des fleurs, partie la plus active au point de vue physiologique. Ils ont montré qu'outre les six substances énumérées ci-dessus on trouve 23 autres spots correspondant à des cardénolides ou à des osides dérivés de celles-ci, qu'ils ont dénommé à titre provisoire : A2, A3, B1, B2, B3, B4, C, D1, D2, E3, F1, F2, F3, F4, G3, I, K, L, M, N, O, P, et Q. Soit au total 29 substances différentes. Pusz et Buechner, Arzneimittel-Forschung 13 (1963), 409-412, ont encore étudié la poudre de la partie feuillée. Ils y ont trouvé les six composés précédemment isolés par les auteurs précédents, c'est-à-dire : cymarine, adonitoxine, K-strophanthine-béta, acétyladonitoxine, strophanthidine et 16-hydroxystrophanthidine, leurs propres composés D1, D2, E3, L, M, N, O, Pet Q cités ci-dessus, un spot probablement


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identique à l'un des spots B1, B2, B3 ou B4 trouvés dans les fleurs, et enfin 9 spots nouveaux appelés respectivement A1, C1, C2, G2, H1, H3, I1, I4 et K4, différents de ceux trouvés dans les fleurs. Ce serait donc au total 38 cardénolides et osides cardénoliques que renfermerait la plante. Ils ont montré en outre qu'une préparation synthétique de six osides isolés à l'état cristallisé n'avait guère, à dose égale, que le tiers de l'activité du mélange naturel amorphe contenant l'ensemble des composés cardénoliques. Ceci confirme que bien souvent les substances pures, devenues si à la mode dans certaines pharmacopées, et qui, effectivement, ont l'avantage de présenter des propriétés pharmacologiques plus constantes et plus aisément contrôlables, présentent néanmoins l'inconvénient d'être souvent beaucoup moins actives que les mélanges naturels complexes.

Depuis lors, les travaux chimiques sur l’Adonis se sont encore multipliés surtout en U.R.S.S., en Pologne et en Tchécoslovaquie. A. Polakova et Z. Cekan, Chemistry and Industry (London), 1963, 1766-1767, ont isolé la 3-acétylstrophanologénine et la vernadigine qui est le diginoside correspondant. A. Cserep, L. Masler, D. Sike et S. Bauer, Chem. Zvesti (Tchécoslov.), 18 (1964), 273-280, l’adonitoxologénine (qui présente une fonction alcool primaire sur le carbone 19 et non plus une fonction aldéhyde comme l'adonitoxogénine) et l’adonitoxol qui est le 1-rhamnoside correspondant. A. Kovarokova et K.K. Chen, Life Science 4 (1965), fasc. 1, 41-43, ont isolé la 16-formyloxystrophantidine, la tétraacétyladonitoxine et la 10-phénylimido-strophantidine. Enfin Bugrim et Kolesnikov, Medicinskaya Promyslennost (U.R.S.S.), 19 (1965), no 4, 38-40, ont réussi à isoler les osides A et G1 dont la structure est à l'étude.

Nous avons cru utile d'exposer avec quelques détails la complexité extrême de ces mélanges naturels de cardénolides de l’Adonis parce que la flore malagasy est extrêmement riche en plantes renfermant justement de telles cardénolides (surtout des Asclépiadacées et des Apocynacées). Les travaux effectués sur ces plantes malgaches n'ont généralement abouti à l'isolement que d'un ou deux corps cristallisé dans chaque plante, or il nous semble que cette composition est beaucoup plus complexe et devrait être reprise avec les méthodes mises au point par les auteurs dont nous venons de parler.

Propriétés pharmacologiques

Les propriétés de l’Adonis sont très anciennement connues. La poudre de plante est utilisée dans les insuffisances cardiaques ; elle rétablit l'amplitude des pulsations du cœur, combat l'œdème des membres inférieurs et favorise l'élimination urinaire chez ces malades. On pourra consulter à cet égard les travaux suivants : N. Burnov, Thèse, Univ. de Saint-Petersbourg (1880) : Action physiologique et thérapeutique de l’Adonis vernalis sur la circulation sanguine (en russe), et Deutsch. Arch. klin. Med., 33 ( 1883), 262-311 (en allemand) ; H. Huchard, Union Médicale,


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41 (1886), 3e semestre, 25-29 et 49-55 ; H.A. Hare, Therap. Gazette, 10 (1886), 217-221 ; A. Henneton : l’Adonis vernalis dans l'asystolie et les néphrites, Thèse (Dr. Méd.) Lille, 1909 ; J. Chevalier, Bull. Gén. Thérap., 165 (1913), 305-309.

Les osides amorphes (adonidoside de Mercier) sont des poisons du cœur extrêment actifs. Chez le Chien, à la dose de 40 microgrammes par kilogramme d'animal, ils ont une action tonique et provoquent un accroissement de la contractilité du myocarde ; mais, à partir de 80 microgrammes par kilogramme, on voit apparaître de la bradycardie ; au-dessus de 120 microgrammes, on constate des troubles profonds dans la conduction auriculo-ventriculaire et l'excitabilité cardiaque ; enfin 200 microgrammes provoquent l'arrêt du cœur en systole et la mort (R. Lutembacher, J.L. Mercier et F. Mercier : Rev. Pharmacol. et Thérap. Exper., 1 (1927), 87-96 ; R. Lutembacher : Bull. Méd., 1928, n° 11 ; Pratiq. Méd. Franc., mai 1928). Pour plus de détails sur les travaux anciens, on pourra consulter aussi G. Garnier, L. Bezanger-Beauquesne et G. Debraux : Ressources Médicinales de la Flore Française, Paris, 1961, tome 1, p. 432-436.

De très importants travaux récents sur les propriétés cardiotoniques de l’Adonis ont été effectués notamment en Pologne et en U.R.S.S. Il faut citer à cet égard la Thèse de S. Buechner (Académie des Sciences de Pologne, 12 (1960) et ses autres publications notamment dans Farmacja Polska, 16 (1960), p. 283 et 468, et 17 (1961), p. 14 et 100, et dans Acta Poloniae Pharm., 17 (1960), p. 455. Parmi les travaux soviétiques les plus importants, on peut citer ceux qui ont paru dans le recueil intitulé « Matériaux de la 2e Conférence pan-soviétique des Pharmaciens », Moscou, 1959 (Editions du Ministère de la Médecine) : notamment les études de M.G. Tarasova, p. 255-258, et de G.E. Batrak, E.V. Popova et I.T. Furs, p. 177-179 ; dans le recueil des travaux scientifiques de l'Institut Central Scientifico-expérimental de Pharmacie, notamment ceux de Svinska, 3 (196o), 11-14 et de O.K. Sivitskaya, 4 (1963), 123-129. Dans les revues spécialisées : Trud. Nauchno-Izsled, Inst. Farm. (Travaux scientifico-expérimentaux de l'Institut de Pharmacie de Moscou), 3 (1961), 168-177 ; Trud. Leningrad. Khim. Farmatsevt. Inst. (Travaux de l'Institut de Chimie Pharmacologique de Leningrad), n° 14 (1962), p. 41-44, 60-64 et 65-73 ; Farmakol. i Toksikol. (Pharmacologie et Toxicologie), 26 (1963) n° 3, 289-291, et no 6, 692-697 ; Aptechnoié Delo (L'art pharmaceutique), 9 (1960), no 4, 51-55·

Ajoutons que les vieilles pharmacopées attribuaient à l’Adonis une action sédative intéressant particulièrement l'écorce cérébrale qui le faisait utiliser dans le traitement des névroses, des états d'anxiété et même de l'épilepsie et de la chorée infantile (voir : Richtzenhain : Medizinische Welt, 1934, no 27, 950, et Merck Annalen, 1935, p. 39). Les travaux récents effectués en Union Soviétique avec les méthodes les plus modernes, notamment par D.I. Sapegin, Farmakol. i Toksikol, 26 (1963), n° 1, 7-10, confirment l'influence favorable sur les fonctions nerveuses supérieures et notamment sur la vitesse d'acquisition des réflexes conditionnés chez le Rat.


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Posologie : L’Adonis vernalis était inscrit aux substances dangereuses, tableau C (Codex français 1949).

Doses maximum :

  • Pour une dose : 1 gramme (un gramme);
  • Pour vingt-quatre heures : 3 grammes (trois grammes).

En infusion : 4 à 8 grammes de plante sèche dans 250 grammes d'eau (à fractionner en 4 ou 6 prises) dans les vingt-quatre heures.

Substituants malagasy

Comme nous l'avons dit, la flore malagasy possède de nombreuses plantes renfermant des cardénolides voisines de celles de l’Adonis.

La plante qui nous semble se rapprocher le plus de l’Adonis pour son activité cardiotonique relativement douce, son action diurétique et antioedémateuse, est le Tandrokosy, Pentopetia androsaemifolia Decaisne (Asclépiadacées) (voir ultérieurement la notice du Tandrokosy).

Les feuilles de divers Citrus (Rutacées), amères et aromatiques, ont été préconisées comme substitut de l’Adonis dans le traitement de l'épilepsie, notamment à l'île Maurice dans l'ouvrage bien connu de Daruty de Grandpré. Cette action sédative paraît être confirmée et la drogue est sans danger pour le malade (voir Voasarimakirana et Citronnier).