Matricaire (Cazin 1868)

De PlantUse Français
Révision de 8 mars 2017 à 17:11 par Michel Chauvet (discussion | contributions)

(diff) ← Version précédente | Voir la version courante (diff) | Version suivante → (diff)
Aller à : navigation, rechercher
Massette
Cazin, Traité des plantes médicinales, 1868
Mauve
PLANCHE XXIV : 1. Livèche. 2. Lobélie. 3. Lycopode. 4. Marrube blanc. 5. Matricaire.


[619]

Grande camomille

Nom accepté : Tanacetum parthenium


MATRICAIRE. Matricaria parthenium. L.

Matricaria vulgaris seu savita. C. Bauh., Tourn. — Pyrethrum parthenium. Smith. — Matricaria vulgo, minus parthenium. J. Bauh. Chrysanthemum. Pers.

Matricaire officinale, — matricaire vulgaire, — matricaire odorante, — espargoutte, œil de soleil.

Composées. — Sénécionidées. Fam. nat. — Syngénésie polygamie superflue. L.


Cette plante bisannuelle (Pl. XXIV), commune dans les champs et les décombres, se cultive dans les jardins pour ses fleurs, qui doublent facilement. Son nom lui vient de mater, à cause de l'usage qu'en font les femmes.

Description. — Racines blanches, fibreuses, un peu épaisses, très-rameuses. — Tiges droites, Iisses, fermes, cannelées, hautes de 60 à 80 centimètres. — Feuilles alternes, pétiolées, d'un vert un peu cendré, bi-tripinnatiséquées. — Fleurs pédonculées, disposées en corymbes à l'extrémité des rameaux et des tiges (juin-août). — Calice


[620]

commun, hémisphérique, formé d'écailles foliacées, imbriquées. — Réceptacle conique, nu. — Fleurons du centre hermaphrodites, demi-fleurons femelles et fertiles. — Cinq étamines syngénèses. — Deux stigmates. — Fruits : akènes oblongs dépourvus d'aigrettes, terminés par un rebord membraneux, court et denté.

Parties usitées. — L'herbe entière et les sommités fleuries.

[Culture. — Cette plante croît dans tous les sols, pourvu qu'elle soit exposée au soleil et pas trop humide ; on la propage par graines semées au printemps ou à l'automne, ou d'éclats de pieds et de rejetons ; elle se renouvelle souvent d'elle-même.]

Récolte. — L'herbe est souvent employée fraîche. Les fleurs se récoltent comme celles de la camomille. On cueille les sommités pour les conserver, avec une partie des tiges et des feuilles. La matricaire simple, suivant Bodart, est préférable à la double bien que dans le commerce on ne trouve le plus souvent que cette dernière, que l'on substitue frauduleusement à la camomille romaine. Selon Mérat et Delens, on doit préférer les fleurs doubles, parce qu'elles ont plus d'arôme et par conséquent plus de vertu.

Propriétés physiques et chimiques. — L'odeur de la matricaire est forte, résineuse et désagréable, sa saveur chaude, amère et un peu âcre. Elle contient de la résine unie à un mucilage, amer, et une huile volatile de couleur bleu foncé, amère, aromatique. L'eau et l'alcool s'emparent de ses principes actifs.


PRÉPARATIONS PHARMACEUTIQUES ET DOSES.


A L'INTÉRIEUR. — Infusion, 4 à 12 gr. par kilogramme d'eau.
Suc exprimé, 15 à 60 gr.
Poudre, 1 à 4 gr., en potion, pilules, ou dans un liquide.
Huile volatile, 20 à 30 centigr., en pilules, potion, saccharolé.
Eau distillée (1 de feuilles fraîches sur 4 d'eau), 50 à 100 gr., en potion.

A L'EXTÉRIEUR. — Décoction ou infusion, 13 à 30 gr. par kilogramme d'eau pour lavements, 30 à 60 gr. pour lotions, fomentations, injections, etc. ; feuilles, en cataplasmes.

Cette plante entre dans le sirop d'armoise composé.


Cette plante, d'une odeur forte et pénétrante, d'une saveur chaude et un peu âcre, est légèrement tonique, stimulante, emménagogue et antispasmodique. Elle est utile dans l'aménorrhée, la leucorrhée, l'hystérie, chez les femmes cacochymes et languissantes, lorsqu'il n'existe ni pléthore locale trop prononcée, ni irritation phlegmasique. On l'emploie en lavements contre les coliques nerveuses, le météorisme, chez les femmes vaporeuses. L'eau distillée de cette plante sert de base, comme celle d'armoise, aux potions antihystériques, etc.

Mlle Dubois, fermière, âgée de vingt et un ans, d'un tempérament lymphatico-nerveux, d'une constitution délicate, était atteinte d'une dysménorrhée qui la faisait beaucoup souffrir. Souvent même elle éprouvait une hystéralgie bien caractérisée. Les antispasmodiques, tels que l'éther, l'assa-foetida, le laudanum, et en dernier lieu l'acétate d'ammoniaque, avaient apporté peu de soulagement. Une vieille femme lui conseilla de prendre, de demi-heure en demi-heure, un verre de décoction tiède de matricaire (1 poignée de cette plante pour 1 kilogr. 1/2 d'eau réduite aux deux tiers à vase clos), trois ou quatre matins de suite vers l'époque des règles. Ce moyen réussit. Les souffrances diminuèrent considérablememt dès la première fois. Le second mois elles furent très-supportables, et, le troisième, un état de malaise les remplaça. La malade fit usage de la matricaire à chaque retour des règles pendant quatre mois, après lesquels elle fut complètement guérie.

La matricaire, ainsi que beaucoup d'autres plantes, qui depuis longtemp ne paraissent plus dans les prescriptions médicales, ne mérite pas l'oubli auquel l'ont condamnée la mode et le luxe pharmaceutique de nos jours. Le fait que je viens de rapporter, quoique isolé, porte à croire que cette plante a une action marquée sur l'utérus, en faisant cesser l'état spasmodique de cet organe. On sent bien que si elle peut être utile dans les affections utérines purement nerveuses ou atoniques, elle serait nuisible dans la


[621]

dysménorrhée, l'aménorrhée, etc., qui seraient le résultat d'un excès d'action vasculaire, d'un état pléthorique, soit général, soit local.

On a employé la matricaire dans plusieurs autres maladies. On l'a conseillée comme anthelminthique ; Ray et Lange s'en sont bien trouvés contre le tænia ; F. Hoffmann, Morton, Heister, Schulsius, Pringle, l'administraient avec succès contre les fièvres intermittentes : ce que faisaient les Egyptiens, d'après Prosper Alpin ; Miller en donnait le suc avec avantage, à la dose de 2 onces, deux heures avant l'accès, comme fébrifuge. C'est sans doute sa propriété contre les fièvres intermittentes qui lui a valu le nom anglais de feverfew. Cette propriété peut trouver son application dans certains cas de fièvres d'accès simples, ou contre lesquelles le quinquina a été, à diverses reprises, employé avec un succès momentané et suivi de récidives, ou bien encore dans ceux qui, exempts d'irritation locale, peuvent être considérés comme dépendant plus particulièrement d'un état nerveux qui subsiste, par une sorte d'habitude morbide, après la disparition de la cause primitive de la maladie. Elle paraît agir à peu près comme la camomille fétide ou maroute, que Peyrith dit avoir employée aussi avec succès comme fébrifuge.

Si l'on en croit Chomel, qui prodigue souvent aux plantes des épithètes médicales sans en préciser l'application pratique[1], la matricaire, en cataplasme, a apaisé et fait disparaître des céphalalgies, la migraine, voire même les douleurs de la goutte, dont la cessation subite d'ailleurs n'est pas sans danger. Suivant Simon Pauli, il suffit de se munir d'un bouquet de matricaire pour se préserver de la piqûre des abeilles, que l'odeur de cette plante fait fuir.

____________________

  1. Ce reproche peut s'adresser à la plupart des auteurs de botanique médicale, qui, dans de gros volumes, nous apprennent que la rose est astringente, le nerprun purgatif, le pissenlit apéritif, l'absinthe fébrifuge, l'angélique stimulante, etc., et attribuent, sans distinction de cas et de circonstances, aux plantes qu'ils préconisent, des vertus merveilleuses contre telle ou maladie. Les ressources surabondent pour remplir des indications qui, en réalité, nous manquent ou sont difficilement déterminées au lit du malade : Agendi gnaro raram remedii penuriam (Sydenham.) [L'expert qui agit souffre rarement de pénurie de remèdes. NdE]


Camomille commune

Nom accepté : Matricaria chamomilla


MATRICAIRE CAMOMILLE, CAMOMILLE COMMUNE, CAMOMILLE ORDINAIRE, VRAIE CAMOMILLE (Matricaria chamomilla, L. ; Chamæmelum, Black ; Anthemis vulgaris, Lob. ; Chamæmelum vulgare, Pharm.). — Très-fréquente dans les champs cultivés, au milieu des moissons, dans les lieux pierreux, aux bords des chemins, etc.

Description. — Tiges de 2 à 6 décimètres, dressées, glabres, rameuses, surtout supérieurement. — Feuilles bi-tripennatiséquées, à segments étalés, plus épais et plus larges que ceux de la camomille romaine. — Fleurs en capitules nombreux, solitaires au sommet des rameaux ; fleurons jaunes, tubuleux, hermaphrodites, à limbes globés au centre, du réceptacle, qui est conique, aigu et creux ; demi-fleurons blancs, femelles fertiles à la circonférence (mai-juillet). — Involucre à folioles oblongues, etc.

Cette camomille a les mêmes propriétés que la matricaire. Dioscoride, Zacutus Lusitanus, Rivière, Morton, Hoffmann, Vogel, Pitcairn, Herberden, Cullen et surtout Wauters, l'ont employée avec succès (le plus souvent les fleurs en poudre dans le vin, à la dose de 4 à 8 gr.) contre les fièvres intermittentes. On doit rapporter à cette plante tout ce qu'on trouve dans les anciens sur la camomille. On la substitue souvent, dans les officines, à la camomille romaine, et on la remplace elle-même par la camomille des champs (anthemis arvensis). La camomille romaine (anthemis nobilis), qui possède à un plus haut degré les mêmes propriétés, est généralement préférée.

La MATRICAIRE ODORANTE (Matricaria suaveolens), dont les fleurs, plus petites, exhalent une odeur plus forte quand on les froisse, peut remplacer dans tous les cas, suivant Loiseleur-Deslongchamps, les diverses espèces de camomilles.