Lilas (Cazin 1868)

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Lierre terrestre
Cazin, Traité des plantes médicinales, 1868
Lin

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Nom accepté : Syringa vulgaris


LILAS. Syringa vulgaris. L.

Syringa cœrulea. C. Bauh. — Syringa cœrulea sive alba. Tourn. - Lilas vulgaris. Lam.

OLEACÉES. — SYRINGÉES. Fam. nat. — DIANDRIE MONOGYNIE. L.


Cet arbrisseau, originaire de l'Asie-Mineure, que l'on cultive dans nos jardins pour la beauté de ses fleurs, est connu de tout le monde. Les bestiaux le refusent, et les insectes, excepté les cantharides, n'y touchent pas, à cause de la grande amertume de toutes ses parties.

Parties usitées. — Les feuilles, l'écorce, les fleurs, les fruits, les semences.


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Récolte. — L'écorce doit être récoltée au printemps ou à l'automne, les feuilles pendant la floraison, les fruits à leur maturité, avant la déhiscence des capsules.

Culture. — On multiplie le lilas de graines semées aussitôt après leur maturité et qui lèvent au printemps suivant, ou bien de boutures ou d'éclats de pieds.]

Propriétés physiques et chimiques. — Les feuilles et les fleurs, surtout les fruits et les semences du lilas, sont très-amers. Les feuilles et les fruits contiennent, d'après Milet[1], un principe amer, analogue pour sa saveur aux sels de quinine, et qu'il nomme lilacine. Leroy, d'Anvers[2], a également reconnu dans cette plante une matière cristallisable. tîobinet a de même signalé l'existence de ce principe (connu aussi sous le nom de syringine.) [Les fleurs répandent une odeur suave, les parfumeurs en isolent le parfum par la méthode d’enfleurage.]

Le lilas n'avait été employé en médecine que comme tonique amer dans les affections asthéniques des organes digestifs, lorsqu'en 1822 Cruveilhier, alors médecin à Limoges, le proposa, dans un opuscule intitulé Médecine éclairée par l'anatomie, comme succédané du quinquina contre les fièvres intermittentes. Il fit préparer avec les capsules encore vertes de cette plante un extrait mou qu'il administra à la dose de 4 gr. pendant deux ou trois jours, à six malades atteints de fièvres intermittentes et qui guérirent tous, sans excepter une femme âgée de soixante-dix ans, qui avait la fièvre quarte depuis vingt-trois ans. Quelques médecins de Bordeaux[3], ayant répété ces essais, s'empressèrent de déclarer que ce remède n'avait aucune valeur fébrifuge. Il n'avait été rien publié depuis cette époque sur ce médicament, qui, suivant Trousseau et Pidoux, n'aurait jamais dû sortir de l'obscurité dans laquelle il était resté, lorsque Clément, médecin à Vallenoy (Cher)[4], vint s'inscrire en faux contre les assertions de la Société de médecine de Bordeaux. Depuis le le 1er janvier 1854 jusqu'au 31 décembre, ce médecin a donné l'extrait de lilas à cent cinq personnes atteintes de fièvres intermittentes, contre lesquelles cet extrait lui a tout aussi constamment réussi que le sulfate de quinine. Dans quelques circonstances, dans des cas de récidive après l'administration du sel quinique, le nouveau fébrifuge eut un succès complet. En 1853, Clément avait employé trois extraits préparés, l'un avec les baies de lilas, un autre avec les feuilles, et un troisième avec l'écorce ; celui qui lui a paru mériter la préférence est l'extrait de baies ; la dose a été généralement de 2 à 4 ou 5 gr., ordinairement administrés en pilules dans l'intervalle des accès. Dans les observations recueillies par l'auteur, la fièvre a été coupée après la première ou la seconde dose du médicament ; rarement on a été obligé de recourir à une troisième dose pour obtenir cet heureux résultat.

J'ai administré en 1846 la décoction de capsules vertes de lilas (30gr. pour 700 gr. d'eau réduits à 500 gr.) dans quatre cas de fièvre intermittente tierce. Trois fois elle a manqué son effet. Le seul cas où j'aie pu lui attribuer la cessation des accès est d'autant plus douteux que le malade avait déjà éprouvé une diminution notable dans l'intensité du dernier paroxysme. Mais les résultats obtenus par Cruveilhier, et le soupçon de la non-exécution complète de mes ordonnances dans les cas que je viens de citer, m'engagèrent à essayer de nouveau ce fébrifuge indigène. En 1851, pendant l'été, j'eus l'occasion d'administrer l'extrait aqueux des capsules de lilas à quatre personnes atteintes de fièvres intermittentes, dont trois ayant le type tierce et un le type quotidien. Chez les trois premiers, la fièvre diminua sensiblement après l'administration de 4 gr d'extrait de lilas délayés dans un peu de vin. La même dose, prise le surlendemain, suffit pour faire disparaître

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  1. Journal de pharmacie et de chimie, 1842, t. I, p. 25.
  2. Archives de médecine belge, juillet 1844.
  3. Notice sur les travaux de la Société de médecine de Bordeaux, 1822, p. 9.
  4. Journal de médecine et de chirurgie pratiques, 1855, t. XXVI, p. 261.


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presque entièrement l'accès, qu'une troisième dose, donnée le jour suivant, enleva complètement. Chez le malade atteint de fièvre quotidienne, il y avait rechute après l'emploi trop tôt discontinué du sulfate de quinine. L'extrait de lilas, donné chaque jour à la dose de 5 gr., amena graduellement la guérison, qui fut complète après la cinquième dose. Bien que ces quelques faits, comparés aux observations de Cruveilhier et Clément, aient peu d'importance, je n'ai pas cru devoir les passer sous silence : c'est une obole jetée dans le trésor de la thérapeutique indigène.

En Russie, le peuple traite le rhumatisme articulaire par l'application d'une huile de lilas. Pour préparer cet onguent, on prend une assez grande quantité de fleurs fraîches de cet arbrisseau, on les met dans un vase de verre, on verse dessus de l'huile d'olive ; on couvre le verre de papier, et on le laisse exposé au soleil pendant quinze jours. On frictionne deux fois par jour avec cette huile, jusqu'à absorption complète, les articulations affectées.