Vigna unguiculata (PROTA) : Différence entre versions

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Ressources végétales de l'Afrique tropicale
Introduction
Liste des espèces


Importance générale Fairytale bookmark gold.svgFairytale bookmark gold.svgFairytale bookmark gold.svgFairytale bookmark gold.svgGood article star.svg
Répartition en Afrique Fairytale bookmark gold.svgFairytale bookmark gold.svgFairytale bookmark gold.svgFairytale bookmark gold.svgFairytale bookmark gold.svg
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Fourrage Fairytale bookmark gold.svgFairytale bookmark gold.svgFairytale bookmark gold.svgFairytale bookmark gold.svgGood article star.svg
Fibre Fairytale bookmark gold.svgFairytale bookmark gold.svgFairytale bookmark gold.svgGood article star.svgGood article star.svg
Sécurité alimentaire Fairytale bookmark gold.svgFairytale bookmark gold.svgFairytale bookmark gold.svgFairytale bookmark gold.svgFairytale bookmark gold.svg
Changement climatique Fairytale bookmark gold.svgGood article star.svgGood article star.svgGood article star.svgGood article star.svg



Vigna unguiculata (L.) Walp.




Protologue: Repert. bot. syst. 1 : 779 (1843).
Famille: Papilionaceae (Leguminosae - Papilionoideae, Fabaceae)
Nombre de chromosomes: 2n = 22

Synonymes

Vigna sinensis (L.) Hassk. (1844).

Noms vernaculaires

– Niébé, haricot à l’œil noir, pois yeux noirs, cornille, voème, haricot dolique, dolique mongette (Fr). Cowpea, black-eye bean, black-eye pea, China pea, marble pea (En). Caupi, feijão frade, feijão da China, feijão miúdo, feijão macundi, makunde (Po). Mkunde (Sw).

– Haricot-kilomètre, dolique asperge (Fr). Yard-long bean, asparagus bean (En). Feijão de metro, feijão chicote, feijão espargo, feijão frade alfange (Po).

– Catjang (Fr). Catjang cowpea, Bombay cowpea (En).

Origine et répartition géographique

Vigna unguiculata est originaire d’Afrique, où l’on trouve une grande diversité génétique chez le type sauvage sur tout le continent, l’Afrique australe étant la plus riche. Il a été introduit à Madagascar et sur d’autres îles de l’océan Indien, où on le trouve parfois échappé des cultures. Mais c’est en Afrique de l’Ouest que l’on trouve la plus grande diversité génétique de niébé cultivé, dans les zones de savane du Burkina Faso, du Ghana, du Togo, du Bénin, du Niger, du Nigeria et du Cameroun. Le niébé fut probablement introduit en Europe vers 300 avant J.-C. et en Inde vers 200 avant J.-C. Suite à la sélection par l’homme en Chine, en Inde et en Asie du Sud-Est, le niébé a connu une nouvelle diversification qui a abouti à deux groupes de cultivars : le Groupe Sesquipedalis, aux longues gousses utilisées comme légume, et le Groupe Biflora, cultivé pour ses gousses, ses graines sèches et son fourrage. Probablement introduit en Amérique tropicale au XVIIe siècle par les Espagnols, le niébé est largement cultivé aux Etats-Unis, aux Caraïbes et au Brésil.

Le niébé est le légume sec le plus important des zones de savane d’Afrique occidentale et centrale, où il constitue aussi un important légume vert et une précieuse source de fourrage. En Afrique orientale et australe, il a également de l’importance aussi bien comme légume que comme légume sec. Il n’y a qu’en Afrique centrale humide qu’il est moins présent.

Usages

Le niébé est le légume sec favori dans de nombreuses régions d’Afrique. On fait cuire les graines mûres et on les consomme seules ou avec des légumes, des épices et souvent de l’huile de palme, pour produire une soupe de haricots épaisse, qui accompagne l’aliment de base (manioc, igname, plantain). En Afrique de l’Ouest, on décortique les graines et on en fait de la farine que l’on mélange à des oignons émincés et des épices pour confectionner des galettes soit frites (les “boulettes d’akara”), soit cuites à la vapeur (le “moin moin”). Au Malawi, les graines sont cuites à l’eau avec le tégument intact, ou avec le tégument enlevé par trempage et en laissant les graines dans le sol pendant quelques heures. De petites quantités de farine de niébé sont transformées en biscuits, farine composée et aliments pour bébés au Sénégal, au Ghana et au Bénin.

Les feuilles ainsi que les graines et gousses immatures de niébé sont consommées comme légumes. Les feuilles se servent cuites à l’eau ou à l’huile et on les consomme généralement avec une bouillie. La feuille se conserve par séchage au soleil, préalablement bouillie éventuellement, pour permettre son utilisation pendant la saison sèche. Les feuilles destinées à être conservées pour un usage ultérieur sont généralement cueillies à la fin de la saison. Les feuilles qui se développent à la fin de la saison seraient plus savoureuses du fait qu’elles croissent en conditions de stress. Au Botswana et au Zimbabwe, on pétrit les feuilles de niébé cuites à l’eau et la pulpe ainsi obtenue est compactée en petites boulettes, que l’on fait ensuite sécher pour les conserver. Avec les graines immatures, vertes et encore tendres, on prépare une soupe épaisse qui sert de condiment. Les gousses tendres et dépourvues de graines se consomment parfois comme légume cuit, de même que les jeunes gousses du haricot-kilomètre. Si cet emploi est prédominant en Asie, il est rare en Afrique. Dans l’Etat du Benue au Nigeria, les gousses d’une variété locale nommée ‘Eje-O’Ha’, qui ont une forme spiralée et sont sans fils et presque sans parchemin, sont blanchies pendant quelques minutes, ouvertes et coupées en deux. On mange directement les graines, mais les parois de la gousse sont quant à elles mises à sécher et conservées en vue d’une utilisation ultérieure. On consomme aussi les gousses dans certaines parties du Bénin. Les racines sont parfois consommées, par ex. en Ethiopie et au Soudan.

Le niébé sert de fourrage en Afrique de l’Ouest, en Asie (en Inde surtout) et en Australie ; soit les animaux le broutent directement, soit il est coupé et mélangé à des céréales sèches destinées à l’alimentation du bétail. Aux Etats-Unis et ailleurs, le niébé se cultive comme engrais vert et plante de couverture. Au Nigeria, on fait pousser des cultivars spéciaux pour leur fibre, extraite des pédoncules ; la fibre solide est particulièrement adaptée aux équipements de pêche et elle produit un papier de bonne qualité. Les graines sèches ont jadis été utilisées comme succédané du café.

Plusieurs usages médicinaux du niébé ont été signalés : les feuilles et les graines s’emploient en cataplasme pour traiter les enflures et les infections de la peau, les feuilles sont mâchées pour traiter les maladies dentaires, des graines carbonisées réduites en poudre sont appliquées sur les piqûres d’insectes, la racine sert d’antidote contre les morsures de serpent et pour traiter l’épilepsie, les douleurs dans la poitrine, la constipation et la dysménorrhée ; de plus, certaines parties de la plante non spécifiées sont utilisées comme sédatif pour la tachycardie et contre différentes douleurs.

Production et commerce international

D’après les statistiques de la FAO, la production mondiale de grains secs de niébé en 1999–2003 s’élevait à environ 3,6 millions de t/an sur 9,5 millions d’ha. D’autres sources donnent même des productions plus élevées : plus de 4,5 millions de t/an sur 14 millions d’ha. D’après la FAO, 3,3 millions de t/an étaient produites en Afrique subsaharienne sur 9,3 millions d’ha, principalement en Afrique de l’Ouest (3 millions de t/an sur 8,8 millions d’ha), les principaux pays producteurs étant le Nigeria (2,2 millions de t/an sur 5,1 millions d’ha) et le Niger (400 000 t/an sur 3,3 millions d’ha). Le Brésil, qui ne figure pas dans les statistiques de la FAO sur le niébé, produirait environ 0,6–0,7 million de t/an sur 1,1–1,9 million d’ha. Les graines de niébé sont produites pour la consommation domestique, et les surplus sont vendus sur les marchés locaux. Le commerce international a lieu surtout à l’intérieur de l’Afrique de l’Ouest, les pays exportateurs se situant dans la zone sèche sahélienne, les pays importateurs dans la région côtière humide et plus densément peuplée. On a estimé qu’au moins 285 000 t ont été commercialisées entre les pays ouest-africains en 1998, principalement du Niger vers le Nigeria, mais le commerce total est probablement beaucoup plus important.

Il n’existe pas de statistiques sur les quantités de feuilles et de gousses récoltés, mais ils sont certainement très importants. Les feuilles fraîches et séchées sont très vendues sur les marchés urbains et une partie est échangée avec les pays voisins. Les feuilles séchées sont exportées sous forme de boulettes noires du Zimbabwe vers le Botswana et l’Afrique du Sud. Cultivé en Asie sur des centaines de milliers d’hectares, le haricot-kilomètre n’a qu’une importance secondaire en Afrique.

Propriétés

La composition nutritionnelle des extrémités de tiges feuillées de niébé, par 100 g de partie comestible, est : eau 89,8 g, énergie 121 kJ (29 kcal), protéines 4,1 g, lipides 0,3 g, glucides 4,8 g, Ca 63 mg, Mg 43 mg, P 9 mg, Fe 1,9 mg, Zn 0,3 mg, vitamine A 712 UI, thiamine 0,35 mg, riboflavine 0,2 mg, niacine 1,1 mg, folates 101 μg, acide ascorbique 36 mg. Les jeunes gousses de niébé avec leurs graines contiennent par 100 g de partie comestible : eau 86,0 g, énergie 184 kJ (44 kcal), protéines 3,3 g, lipides 0,3 g, glucides 9,5 g, Ca 65 mg, Mg 58 mg, P 65 mg, Fe 1,0 mg, Zn 0,3 mg, vitamine A 1600 UI, thiamine 0,15 mg, riboflavine 0,15 mg, niacine 1,2 mg, folates 53 μg, acide ascorbique 33 mg. Les gousses de haricot-kilomètre contiennent par 100 g de partie comestible : eau 87,9 g, énergie 197 kJ (47 kcal), protéines 2,8 g, lipides 0,4 g, glucides 8,4 g, Ca 50 mg, Mg 44 mg, P 59 mg, Fe 0,5 mg, Zn 0,4 mg, vitamine A 865 UI, thiamine 0,1 mg, riboflavine 0,1 mg, niacine 0,4 mg, folates 62 μg, acide ascorbique 19 mg. Les grains immatures de niébé contiennent par 100 g de partie comestible : eau 77,2 g, énergie 377 kJ (90 kcal), protéines 3,0 g, lipides 0,4 g, glucides 18,9 g, fibres 5,0 g, Ca 126 mg, Mg 51 mg, P 53 mg, Fe 1,1 mg, Zn 1,0 mg, vitamine A 0 UI, thiamine 0,1 mg, riboflavine 0,15 mg, niacine 1,45 mg, folates 168 μg, acide ascorbique 2,5 mg. Les grains mûrs contiennent par 100 g de partie comestible : eau 12,0 g, énergie 1407 kJ (336 kcal), protéines 23,5 g, lipides 1,3 g, glucides 60,0 g, fibres 10,6 g, Ca 110 mg, Mg 184 mg, P 424 mg, Fe 8,3 mg, Zn 3,4 mg, vitamine A 50 UI, thiamine 0,85 mg, riboflavine 0,23 mg, niacine 2,1 mg, vitamine B6 0,36 mg, folates 633 μg, acide ascorbique 1,5 mg. La composition en acides aminés essentiels, par 100 g de graines mûres crues, est : tryptophane 290 mg, lysine 1591 mg, méthionine 335 mg, phénylalanine 1373 mg, thréonine 895 mg, valine 1121 mg, leucine 1802 mg et isoleucine 956 mg. Les principaux acides gras, par 100 g de partie comestible, sont : acide linoléique 343 mg, acide palmitique 254 mg, acide linolénique 199 mg et acide oléique 88 mg (USDA, 2004). La composition approximative en acides gras des lipides des grains de niébé est de : acides gras saturés 25%, acides gras mono-insaturés 8%, acides gras poly-insaturés 42%. Les protéines de niébé sont relativement riches en lysine, mais pauvres en acides aminés soufrés. Les grains de niébé ont une proportion de composés antinutritionnels, comme les lectines et les inhibiteurs de trypsine, plus faible que celle du haricot commun (Phaseolus vulgaris L.), et ils se cuisent plus facilement et plus vite.

Falsifications et succédanés

Les gousses du haricot vert sont souvent utilisées dans les mêmes plats que le haricot-kilomètre, mais le goût n’est pas le même. Les grains immatures de nombreuses légumineuses s’emploient comme succédanés des grains immatures de niébé, par ex. ceux du pois (Pisum sativum L.), du haricot commun et du haricot de Lima (Phaseolus lunatus L.).

Description

Plante herbacée annuelle ou vivace, grimpante, rampante ou plus ou moins érigée, cultivée comme annuelle ; racine pivotante bien développée, et racines latérales et adventives nombreuses ; tige atteignant 4 m de long, anguleuse ou presque cylindrique, légèrement côtelée. Feuilles alternes, 3-foliolées ; stipules ovales, de 0,5–2 cm de long, éperonnées à la base ; pétiole atteignant 15(–25) cm de long, cannelé sur le dessus, renflé à la base, rachis de (0,5–)2,5–4,5(–6,5) cm de long ; stipelles petites ; folioles ovales ou rhomboïdes à lancéolées, de (1,5–)7–14(–20) cm × (1–)4–10(–17) cm, les latérales asymétriques, la centrale symétrique, entières, parfois lobées, glabres ou légèrement pubescentes, à 3 nervures partant de la base. Inflorescence : fausse grappe axillaire ou terminale atteignant 35 cm de long, à fleurs groupées près du sommet ; rachis tuberculé. Fleurs bisexuées, papilionacées ; pédicelle de 1–3 mm de long, à bractéoles spatulées et caduques ; calice campanulé, tube d’environ 5 mm de long, lobes étroitement triangulaires, d’environ 5 mm de long ; corolle rose à violette, parfois blanche ou jaunâtre, étendard très largement obovale, cucullé, d’environ 2,5 cm de long, ailes obovales, d’environ 2 cm de long, carène carénée, d’environ 2 cm de long ; étamines 10, dont 9 fusionnées et 1 libre ; ovaire supère, d’environ 1,5 cm de long, comprimé latéralement, style recourbé, garni de fins poils dans la partie supérieure, stigmate obliquement globuleux. Fruit : gousse linéaire-cylindrique de 8–30(–120) cm de long, rectiligne ou légèrement courbe, pourvue d’un bec court, glabre ou légèrement pubescente, brun pâle à maturité, contenant 8–30 graines. Graines oblongues à presque globuleuses, souvent comprimées latéralement, de 0,5–1 cm de long, noires, brunes, roses ou blanches ; hile oblong, couvert d’un tissu blanc, à arille noirâtre en bourrelet. Plantule à germination épigée ; cotylédons oblongs ou en faucille, épais ; les deux premières feuilles simples et opposées, les feuilles suivantes alternes, 3-foliolées.

Autres données botaniques

Le genre Vigna, qui comprend environ 80 espèces, se rencontre partout dans les régions tropicales. Mais les espèces tropicales américaines vont probablement bientôt être classées dans un genre distinct, ce qui réduirait le nombre d’espèces dans ce genre à 50–60.

Vigna unguiculata est extrêmement variable, aussi bien chez les formes sauvages que cultivées. Plusieurs sous-espèces (jusqu’à 10) ont été distinguées, dont la plupart représentent des types sauvages vivaces, mais subsp. unguiculata regroupe les types annuels sauvages et les types cultivés.

Au sein de Vigna unguiculata cultivé, on admet généralement 5 groupes de cultivars, qui se recoupent et qui peuvent par ailleurs facilement se croiser :

– le Groupe Unguiculata (niébé commun) : types de légume sec et de légume frais, cultivés pour leurs grains secs ou immatures, leurs jeunes gousses ou leurs feuilles ; port prostré à érigé, atteignant 80 cm de haut, floraison tardive, gousses de 10–30 cm de long, pendantes, dures et fermes, non renflées à l’état jeune, contenant de nombreuses graines non espacées ; la plupart des cultivars africains appartiennent à ce groupe.

– le Groupe Sesquipedalis (haricot-kilomètre, synonymes : Dolichos sesquipedalis L., Vigna sesquipedalis (L.) Fruhw.) : cultivé pour ses jeunes gousses ; plante grimpante, tige atteignant 4 m de long, gousses de 30–120 cm de long, pendantes, renflées à l’état jeune, contenant de nombreuses graines espacées ; important légume en Asie du Sud-Est, mais d’importance secondaire en Afrique tropicale, où seuls des cultivars introduits d’Asie sont cultivés.

– le Groupe Biflora (catjang) : cultivé pour ses grains, ses gousses vertes et tendres et pour le fourrage ; port prostré à érigé, atteignant 80 cm de haut, floraison précoce, gousses de 7,5–12 cm de long, dressées ou ascendantes, dures et fermes, non renflées à l’état jeune, à graines peu nombreuses et non espacées ; important en Inde et en Asie du Sud-Est, et également dans certaines parties d’Afrique (par ex. en Ethiopie).

– le Groupe Melanophthalmus : originaire d’Afrique de l’Ouest ; plante pouvant fleurir précocement à partir des premiers nœuds sous conditions inductives, gousses contenant relativement peu de graines, tégument fin, souvent ridé, partiellement blanc.

– le Groupe Textilis : petit groupe cultivé seulement au Nigeria pour ses fibres extraites des longs pédoncules ; au début du XXe siècle, ce groupe était réparti du delta intérieur du fleuve Niger jusqu’au bassin du lac Tchad, mais il disparaît progressivement.

En Afrique, il existe un grand nombre de variétés locales et de cultivars améliorés au sein du Groupe Unguiculata. Les feuilles se ramassent de façon traditionnelle dans les champs de niébé cultivé essentiellement pour les graines sèches, et appartiennent aux dix légumes-feuilles les plus prisés dans nombre de pays africains. En outre, des types spéciaux à port érigé ou à tiges prostrées à longues pousses tendres sont cultivés comme légume-feuilles et parfois aussi pour leurs grains immatures ou leurs jeunes gousses. L’utilisation des types à double fin (graines et feuilles) devient très courante dans certains pays, parce que les feuilles sont le principal légume au début de la saison des pluies.

Différents cultivars de haricot-kilomètre sont proposés par les firmes semencières asiatiques, qui offrent tout un éventail de caractéristiques de la plante.

Croissance et développement

La germination du niébé prend 3–5 jours à des températures supérieures à 22ºC, la température optimale étant 35ºC. Les fleurs s’ouvrent le matin et se referment avant midi, pour tomber le jour-même. Sous des climats secs, le niébé est presque entièrement autogame, mais dans les régions où l’humidité de l’air est élevée, la pollinisation croisée par les insectes peut avoisiner les 40%. Seuls des insectes assez gros sont suffisamment lourds pour ouvrir la carène. La longueur de la période de reproduction est très variable, les cultivars les plus précoces demandant 30 jours depuis le semis jusqu’à la floraison, et moins de 60 jours pour produire des grains mûrs. Lorsque les feuilles sont récoltées pendant la phase de croissance initiale, la sénescence débute à 1,5–2 mois après le semis et la plante meurt au bout de 3–4 mois, en fonction de la santé de la culture et de l’intensité de la récolte. Les cultivars tardifs à croissance indéterminée mettent 90–100 jours pour fleurir et jusqu’à 240 jours pour que les dernières gousses mûrissent. Le niébé forme des nodules fixateurs d’azote avec Sinorhizobium fredii et plusieurs espèces de Bradyrhizobium.

Ecologie

Les types sauvages de Vigna unguiculata poussent parmi la végétation de savane, souvent dans des milieux perturbés, ou bien comme adventice, jusqu’à 1500 m d’altitude ; mais on peut en trouver dans les savanes herbeuses soumises à des brûlis réguliers, dans des endroits sablonneux proches des côtes, dans des étendues boisées, des lisières des forêts ou dans les zones marécageuses, parfois jusqu’à 2500 m d’altitude.

Le niébé réussit bien à des températures diurnes de 25–35ºC ; les températures nocturnes ne doivent pas être inférieures à 15ºC, ce qui en limite la culture aux basses et moyennes altitudes. Au-dessus de 700 m, la croissance est retardée. Le niébé ne tolère pas le gel et des températures supérieures à 35ºC provoquent la chute des fleurs et des gousses. Il pousse bien lorsque l’ensoleillement est direct mais il supporte un peu d’ombre. En Afrique subsaharienne, le niébé est généralement planté comme culture pluviale, mais en Asie il dépend parfois de l’eau résiduelle après une culture de riz irrigué. Certains types déterminés à cycle court peuvent se cultiver avec moins de 500 mm de précipitations annuelles ; au cours d’essais menés au Sénégal, ‘Ein al Ghazal’ a produit 2400 kg/ha de grains avec seulement 452 mm de pluie. Les types à cycle long nécessitent 600–1500 mm. Le haricot-kilomètre tolère les fortes précipitations ; les besoins en eau pour une culture adulte sont de 6–8 mm par jour. On cultive aussi bien pendant la saison sèche avec un arrosage abondant que pendant la saison des pluies, bien que semer pendant la saison des pluies puisse provoquer des dégâts sur les semis en train de lever ou sur les jeunes plantes. La plupart des cultivars de niébé sont des plantes de jours courts à réaction quantitative, mais il existe aussi des types indifférents à la longueur du jour. Le niébé peut se cultiver sur plusieurs types de sols dont le pH est de 5,5–6,5(–7,5), à condition qu’ils soient bien drainés. Il est modérément sensible à la salinité, mais montre une tolérance plus importante aux stades plus avancés de la croissance.

Multiplication et plantation

Les producteurs utilisent habituellement leurs propres semences. Le poids de 1000 graines de niébé est de 150–300 g. La densité de semis en culture pure est de 15–30 kg/ha. Un traitement des semences avec un insecticide et un fongicide (par ex. du thirame) avant la plantation est indiqué. En Afrique tropicale, le niébé se cultive surtout en association ou en relais avec d’autres cultures tels que l’igname, le maïs, le manioc, l’arachide, le sorgho ou le mil. Les cultures pures sont rares, sauf dans les régions côtières d’Afrique de l’Est, ainsi qu’en Asie et dans les pays occidentaux. Dans les zones de forêts et de savanes guinéennes de l’Afrique de l’Ouest, le niébé est surtout cultivé en association avec le maïs, le manioc, l’igname ou l’arachide, à une très faible densité (1000–5000 poquets/ha). Dans la partie nord de la savane guinéenne, il est associé à l’arachide ou au sorgho. Les espèces composantes de l’association sont normalement semées en lignes suivant des systèmes réguliers, par ex. association en lignes intercalées ou association sur la ligne à espacements variables, donnant ainsi une grille de lignes d’arachide ou de sorgho croisées par des lignes de niébé tous les 2–3 m. La population de niébé est faible, les plantes individuelles s’étalant sur un rayon de 2–3 m. Au Soudan, le niébé de la savane est cultivé en association avec le mil, le sorgho ou l’arachide, dans des systèmes traditionnels divers et complexes caractérisés par des espacements entre les plantes et des séquences de mise en place des espèces composantes variables. Par exemple, dans certaines zones de l’Etat de Kano au Nigeria (régions de Minjibir et Gezawa), le mil est planté le premier en lignes espacées de 1,5–3 m au début des pluies (mai–juin), avec 1 m de distance sur la ligne, donnant 4000–6000 poquets/ha. Lorsque les pluies sont devenues plus stables à la fin de juin, des cultivars précoces de niébé (type légume sec) sont plantés entre les lignes alternées de mil à un espacement de 1 m. Le niébé tardif (type fourrage) est planté plus tard en mi-juillet, entre les autres lignes de mil. Lorsqu’il est cultivé en culture pure, le niébé est semé à des densités de 22 000 plantes/ha pour les types prostrés jusqu’à 100 000 plantes/ha pour les types érigés. L’espacement recommandé pour le niébé en culture pure au Kenya est de 60 cm entre les lignes et de 20 cm sur la ligne. Au Swaziland, l’espacement est de 50 cm entre les lignes et 15 cm sur la ligne pour les cultivars érigés. Pour les variétés locales, les espacements sont plus grands, en particulier pour les types à double fin. Souvent 2–3 graines sont semées par poquet, et on pratique ensuite un éclaircissement, par ex. au moment d’un désherbage. La profondeur de semis est de 4–5 cm. Le niébé a besoin d’un sol finement ameubli pour permettre une bonne croissance des racines. Généralement, un labour en profondeur suivi d’un hersage donne un ameublissement correct. Dans les systèmes de culture associée, un labour superficiel suit normalement la récolte à laquelle le niébé est associé.

Les maraîchers péri-urbains utilisent des cultivars spéciaux pour la production de feuilles par cueillettes répétées. Ils sèment les graines à la volée sur des planches surélevées, préparées sur un sol bien fumé, visant une densité élevée d’environ 25 plantes au m2.

Les producteurs africains utilisent les graines du haricot-kilomètre provenant de récoltes antérieures, contrairement à ceux d’Asie du Sud-Est, qui sont nombreux à se procurer des semences saines issues de cultivars améliorés. Le poids de 1000 graines de haricot-kilomètre, 100–150 g, est plus faible que celui du niébé. Les graines se sèment en poquets de 2–4 graines. La culture se pratique d’ordinaire sur des planches surélevées pour permettre un bon drainage et une facilité d’arrosage de surface, de tuteurage et de récolte. Le buttage des jeunes plantes protège leur système racinaire superficiel tout en soutenant les plantes. Certains agriculteurs procèdent au paillage avec de la paille de riz, mais c’est une pratique peu répandue.

Gestion

Le niébé tire de l’air une quantité considérable de ses besoins en azote, et il peut en laisser 75–150 kg/ha dans le sol, qui profiteront à la culture suivante. Dans les lieux où le niébé n’avait pas été cultivé depuis un certain temps, une inoculation avec des bactéries fixatrices d’azote s’est avérée bénéfique. Le niébé a besoin de phosphore pour la nodulation et la croissance des racines. Dans les sols qui en sont dépourvus, on peut incorporer 25 kg/ha de P pour aider la croissance de la plante. Sur les sols qui manquent de potassium, 25 kg/ha de K sont indiqués. Il faut empêcher les mauvaises herbes d’envahir le niébé pendant les stades précoces de croissance. Deux ou trois sarclages pendant les 6 premières semaines après le semis sont recommandés ; une fois établi, le niébé l’emporte sur les mauvaises herbes. Le désherbage est généralement effectué par binage superficiel.

Le niébé-légume et le haricot-kilomètre absorbent fortement les minéraux. Sur les sols à fertilité moyenne, il est recommandé d’utiliser 5–10 t/ha de fumier de ferme au cours de la préparation du sol, ainsi que 20 kg/ha de N, 25 kg/ha de K et 40 kg/ha de P. Trois semaines après la levée, on apporte une fumure de surface de 50 kg/ha d’urée. Pour le haricot-kilomètre, on fiche des rames de 2–2,5 m de long en terre aux bords des planches avant le semis ou dans les deux premières semaines après la levée, avant que la plante n’ait atteint 30 cm de haut. Une méthode de tuteurage peu onéreuse consiste à semer le haricot-kilomètre en relais auprès des tiges de maïs avant ou juste après la récolte des épis.

Maladies et ravageurs

Le niébé est sensible à tout un éventail de maladies et de ravageurs. Le haricot-kilomètre souffre des mêmes maladies et ravageurs que le niébé, mais en conditions humides il semble moins sensible. Les maladies fongiques sont plus gênantes pendant la saison des pluies, tandis que les insectes et les acariens, ainsi que les maladies virales, provoquent plus de dégâts pendant la saison sèche.

Les principales maladies fongiques sont l’anthracnose (Colletotrichum lindemuthianum), l’ascochytose (Phoma exigua), les taches brunes (Colletotrichum truncatum), le charbon foliaire (Protomycopsis phaseoli), les taches foliaires (Cercospora canescens, Septoria vignae, Mycosphaerella cruenta, synonyme : Pseudocercospora cruenta), la rouille brune (Uromyces appendiculatus), la gale (Elsinoë phaseoli), l’oïdium (Erysiphe polygoni), la pourriture du collet (Pythium aphanidermatum), le chancre de la tige (Macrophomina phaseolina) et le rhizoctone (Thanatephorus cucumeris, synonyme : Rhizoctonia solani). Pour la lutte intégrée contre les maladies, il est nécessaire de recourir à la rotation ainsi qu’à des produits chimiques et à des cultivars résistants. Parmi les maladies bactériennes, il faut citer le chancre bactérien (Xanthomonas campestris pv. vignicola), présente à l’échelle mondiale, et des pustules bactériennes (Xanthomonas axonopodis pv. glycines, synonyme : Xanthomonas campestris pv. vignaeunguiculatae), signalées au Nigeria. Ces bactéries sont transmises par les semences, mais une propagation secondaire intervient par les bourrasques de pluie. Les mesures de lutte comprennent le recours aux graines exemptes d’agents pathogènes, leur traitement avec un mélange d’antibiotiques et de fongicides, par ex. streptocycline plus captane, ainsi qu’une stricte rotation culturale. Des gènes de résistance sont disponibles pour le chancre bactérien et les pustules bactériennes.

De nombreux virus s’attaquent à Vigna unguiculata. Certains ont une importance économique, par ex. le virus de la mosaïque du niébé transmis par pucerons (CABMV), le virus de la marbrure du niébé (CPMoV), le virus de la mosaïque jaune du niébé (CYMV), le virus de la mosaïque du haricot à l’œil noir ou virus de la mosaïque commune du haricot (BCMV), le virus de la mosaïque du concombre (CMV-CS) et le virus de la mosaïque dorée du niébé (CPGMV). Certains de ces virus sont transmis par la semence, tandis que des pucerons, des aleurodes et des coléoptères opèrent quant à eux la transmission au champ. Les mesures de lutte comprennent le recours à des semences saines issues de cultivars résistants lorsqu’ils sont disponibles, ainsi qu’un désherbage visant à éliminer les autres plantes-hôtes. Sur les sols pauvres sablonneux, le niébé est attaqué par les nématodes à galles (Meloidogyne spp.). Il est également une plante-hôte pour des nématodes réniformes (Rotylenchus spp.), des nématodes des lésions de racines (Pratylenchus spp.) et des nématodes à stylet (Hoplolaimus spp.). La rotation des cultures et des cultivars résistants sont utilisés pour lutter contre les nématodes.

Les insectes ravageurs constituent également un facteur important limitant la production du niébé, et ils peuvent causer la perte totale de la récolte en graines. En Afrique tropicale, de gros dégâts sont provoqués par les pucerons du niébé (Aphis craccivora), les thrips des fleurs (Megalurothrips sjostedti), les foreurs de gousses (Maruca vitrata, Etiella zinckenella), les punaises des gousses et des graines (par ex. Clavigralla tomentosicollis, synonyme : Acanthomia tomentosicollis). Les punaises grises (Lygus hesperus), les charançons du haricot (Chalcodermus aeneus) et les cicadelles vertes (Empoasca spp.) ont moins d’importance. Le haricot-kilomètre attire particulièrement les pucerons (Myzus persicae, Aphis gossypii), la punaise verte (Nezara viridula) et les acariens rouges (Tetranychus spp.) ; les vers gris (Agrotis ipsilon) font souvent des ravages juste après la levée. La mouche du haricot (Ophiomyia phaseoli) est un ravageur commun ; ses larves creusent des galeries dans les feuilles et les tiges, et les jeunes plantes les plus touchées meurent tandis que les plantes plus âgées souffrent de problèmes de croissance et d’une importante diminution de rendement. L’incidence de la verse est généralement élevée dans les champs infestés ; les cultivars tolérants peuvent former des racines aériennes au-dessus de la partie affectée. Un autre ravageur commun est la mouche des gousses du haricot (Melanagromyza sojae), dont les larves endommagent les pétioles et les jeunes gousses. La lutte contre les insectes ravageurs se fait en protégeant les graines lors du semis au moyen d’un insecticide systémique (comme le carbofuran), ou en pulvérisant celui-ci sur les plantes en train de lever. Les débris végétaux et les plantes touchées doivent être brûlés. Les grains de niébé sont extrêmement vulnérables aux ravageurs des greniers, la bruche cosmopolite du niébé (Callosobruchus maculatus) étant le plus important. Les mesures prises pour réduire les dégâts sont l’emploi d’une huile végétale inoffensive, l’huile de nim (Azadirachta indica A.Juss.), ou de cendres de bois, la torréfaction et la mise des grains sous vide en sacs plastiques, ou leur stockage sous forme de gousses entières.

Le recours à des produits chimiques, à des cultivars résistants, à la lutte biologique et à une bonne conduite de la culture, comme l’association à d’autres plantes et le désherbage, sont nécessaires en lutte intégrée. La lutte chimique contre les insectes se pratique couramment chez le haricot-kilomètre, mais pas sur le niébé. En raison des risques qu’ils comportent tant pour l’agriculteur que pour le consommateur (surtout lorsqu’on récolte les feuilles), ces traitements doivent être réduits au strict minimum.

Deux adventices parasites représentent un problème grave : Alectra vogelii Benth., répandue dans les zones de savane méridionales en Afrique occidentale, orientale et australe, et Striga gesnerioides (Willd.) Vatke, répandue dans les zones de savane d’Afrique occidentale et centrale. La rotation culturale, le travail du sol en profondeur, la culture associée, un semis précoce et le recours à des cultivars résistants diminuent l’infestation par ces adventices parasites.

Récolte

Les feuilles de niébé se ramassent dès l’âge de 4 semaines après la levée jusqu’au début de la floraison. Lorsqu’il s’agit d’une culture porte-graines, les agriculteurs récoltent souvent 10–20% des feuilles avant le démarrage de la floraison, sans que cela affecte le rendement en graines. Une cueillette de feuilles plus intense réduit la floraison, la fructification et le rendement en graines. Les producteurs spécialisés dans la production de feuilles coupent les plantes à 10 cm au-dessus du sol pour obtenir régulièrement de nouvelles pousses. Les gousses vertes se récoltent lorsque les grains sont encore immatures, 12–15 jours après la floraison. La récolte des grains secs s’effectue lorsque deux tiers au moins des gousses sont sèches et jaunies. Chez les types indéterminés, la récolte est compliquée par une maturation prolongée et inégale ; pour certaines variétés locales, 5–7 passages sont nécessaires pour la récolte. Les graines mûres sont généralement récoltées à la main. Parfois les plantes sont arrachées lorsque la plupart des gousses sont mûres. Dans les sytèmes d’association traditionnels complexes de l’Etat de Kano (Nigeria), les cultivars précoces de niébé et de sorgho sont récoltés fin août ou début septembre. Les cultivars tardifs de niébé et de sorgho sont récoltés au début de la saison sèche, entre octobre et novembre, lorsque les feuilles commencent à se flétrir. Les types fourragers sont arrachés ou coupés au ras du sol et enroulés en bottes avec les feuilles intactes. Ces bottes sont alors conservés sur les toits ou des fourches d’arbres pour sécher, et sont utilisées ou vendues en pleine saison sèche.

La première récolte de gousses de haricot-kilomètre au stade souhaité a lieu 6–7 semaines après le semis, en fonction du cultivar et de la demande. On ramasse d’ordinaire les gousses lorsqu’on commence tout juste à deviner la forme des grains. La cueillette doit se faire avec le plus grand soin, car les gousses qu’on oublie jusqu’à la récolte suivante durcissent et se décolorent, et leurs graines gonflent et peuvent épuiser la plante. Les récoltes se succèdent sur 4–8 semaines au moins une fois par semaine (deux fois par semaine pour un calibrage plus précis).

Rendement

Les agriculteurs peuvent récolter jusqu’à 400 kg/ha de feuilles de niébé en un nombre réduit de passages sans diminution notable des rendements en grains. Au Nigeria, certains cultivars grimpants ont permis de produire 9–17 t/ha de gousses fraîches, les cultivars décombants en produisant quant à eux 6–15 t/ha. La moyenne du rendement en grains secs des mêmes cultivars était de 1,4–1,7 t/ha. La moyenne mondiale des rendements en grains secs de niébé est faible, 240 kg/ha, et pour le fourrage elle est de 500 kg/ha (tiges feuillées séchées à l’air). Le rendement moyen en graines sèches de niébé dans l’agriculture de subsistance en Afrique tropicale est de 100–500 kg/ha. Le rendement moyen est de 120 kg/ha au Niger, 400 kg/ha au Nigeria, et 900 kg/ha aux Etats-Unis. Outre les effets des maladies et ravageurs, la faiblesse des rendements s’explique en partie par le fait que le niébé est surtout cultivé à faible densité, intercalé avec des céréales plus hautes qui lui font de l’ombre. De plus, le niébé est souvent planté tard dans la saison des pluies, ce qui diminue la durée de la culture du fait de sa sensibilité à la photopériode. Un potentiel de rendement de 3 t/ha de graines et 4 t/ha de foin peut être atteint en culture pure et avec une bonne conduite. Aux Etats-Unis, les rendements en graines atteignent 7 t/ha.

Pour le haricot-kilomètre, un rendement total de 15 t/ha sur une période de récolte d’au moins un mois est considéré satisfaisant, mais on a signalé des rendements s’élevant à 30 t/ha.

Traitement après récolte

Les feuilles récoltées ne se gardent pas longtemps et doivent être vendues dans les 2 jours. Les pousses se conservent plus longtemps si on les met dans une cuvette remplie d’eau. Les feuilles de niébé sont souvent séchées au soleil pour les conserver, soit une fois ébouillantées et compactées en boulettes noires, ou bien directement, entières ou en fragments, ou encore sous forme de poudre. Les gousses vertes de haricot-kilomètre sont liées en bottes de 20–40, emballées dans des paniers ou des cagettes pour être acheminées au marché. Le haricot-kilomètre est moins sensible à la perte de poids par transpiration et aux avaries au cours du transport que la plupart des autres légumes. Conservées au froid (8ºC), les gousses se gardent 4 semaines. Les grains frais immatures de niébé ont une durée de conservation limitée à température ambiante, mais à 8°C ils gardent leur fraîcheur pendant 8 jours. En Europe, aux Etats-Unis et au Japon, les gousses immatures tendres sont parfois congelées ou appertisées. En tant que légume sec, les grains écossés doivent être séchés complètement jusqu’à un taux d’humidité de 14% au plus pour assurer une conservation correcte.

Ressources génétiques

L’Institut international d’agriculture tropicale (IITA) d’Ibadan (Nigeria) détient une collection de plus de 15 000 entrées de niébé cultivé et de 1000 entrées de Vigna sauvages apparentés ; de son côté, l’université de Californie à Riverside ( Etats-Unis) en détient 5000. L’IITA a caractérisé 8500 entrées pour la résistance aux foreurs des gousses Maruca et aux punaises suceuses, et 4000 pour la résistance aux thrips des fleurs, aux bruches et aux virus. Le niveau de résistance aux insectes ravageurs est élevé chez l’espèce sauvage Vigna vexillata (L.) A.Rich., en particulier vis-à-vis des punaises et des foreurs Maruca. De nombreuses entrées de Vigna sauvages ont un niveau élevé de résistance aux charançons des greniers.

De petites collections de haricot-kilomètre sont présentes au Centre de recherche et de développement sur les légumes en Asie (AVRDC), de Shanhua (Taïwan) et à l’Institute of Crop Germplasm Resources (CAAS) de Pékin (Chine) ainsi que dans des instituts nationaux d’Asie. Il n’existe que de toutes petites collections de catjang. En Asie, les variétés locales des types potager et légume sec de Vigna unguiculata risquent de disparaître, étant donné que l’on cultive partout des cultivars améliorés. C’est un processus qui a aussi commencé en Afrique.

Sélection

L’amélioration de Vigna unguiculata a fait l’objet de nombreux travaux, la plupart concernant des cultivars spécialisés pour le grain sec, et en Asie du Sud-Est pour le haricot-kilomètre. Aux Etats-Unis, des cultivars spéciaux de niébé destinés à la récolte des gousses et des jeunes grains ont été mis au point. Les critères de sélection du niébé portent sur sa résistance (aux insectes ravageurs, aux maladies, aux nématodes, aux mauvaises herbes parasites, à la sécheresse), le type de plante et de graine, les rendements et les systèmes de culture. L’IITA, qui conduit un vaste programme d’amélioration génétique, distribue des ressources génétiques, du matériel de sélection et des cultivars. En collaboration avec l’Institut international de recherche sur le bétail (ILRI), l’IITA a débuté un programme de sélection visant à créer des cultivars améliorés de niébé donnant à la fois des graines pour la consommation humaine et du fourrage pour le bétail en saison sèche. Des cultivars améliorés ont aussi été mis au point pour la culture associée. Dans de nombreux pays, des programmes nationaux ont mis sur le marché des cultivars de niébé améliorés possédant des résistances au chancre bactérien, au virus de la mosaïque du niébé transmis par pucerons, aux pucerons eux-mêmes, aux charançons du haricot, aux nématodes à galles, à la bruche du niébé et aux mauvaises herbes parasites. De nouveaux cultivars à cycle court destinés aux conditions sèches et humides ont été mis au point, comme ‘Ein al Ghazal’ et ‘Mouride’. Les cultivars améliorés sont souvent des types déterminés de petite taille, érigés, sélectionnés pour une production optimale de grains secs et donc moins adaptés à la cueillette traditionnelle de feuilles. Des espèces sauvages africaines de Vigna ont été croisées avec succès avec Vigna unguiculata.

Les travaux d’amélioration génétique sur les types potagers africains sont rares. Au Kenya, Simlaw Seeds a commercialisé ‘Kenduke-1’, un type semi-rampant sélectionné pour ses grandes feuilles, sa belle couleur verte et son bon goût, et qui peut se récolter pendant une longue période. Au Sénégal, un type à feuilles, ‘Fuuta’, a été sélectionné, dont la période végétative atteint les 50 jours. Le Crop Breeding Institute de Harare (Zimbabwe) a sélectionné des cultivars à double fin avec un rendement élevé tant en feuilles qu’en graines ; le cultivar zimbabwéen ‘Chigwa’ est particulièrement adapté à une utilisation comme légume-feuilles en raison de sa floraison tardive. ‘Melakh’ est aussi un cultivar à double fin, sélectionné au Sénégal pour la production de graines fraîches et sèches.

La mise au point de cultivars améliorés de haricot-kilomètre par rétrocroisements et sélection généalogique a été réalisée en Asie du Sud-Est. Le rendement est fortement lié au nombre de gousses par plante et à leur longueur. Une résistance aux mouches du haricot serait bienvenue, mais elle semble difficile à atteindre. La East-West Seed Company en Thaïlande a sélectionné des cultivars adaptés à tout un ensemble de conditions culturales, par ex. ‘Aba’, à cycle court (première récolte 45 jours après le semis), de rendement élevé, à gousses vert grisâtre de 60–70 cm de long, et d’excellente qualité marchande.

Des cartes de liaison génétique ont été établies pour le niébé à l’aide de RAPD, AFLP et RFLP ; les cartes de liaison ont été utilisées pour localiser des gènes associés à la résistance à Striga gesnerioides, à plusieurs virus et aux nématodes à galles, ainsi que pour localiser des locus de caractères quantitatifs (QTL) comme la durée jusqu’à la floraison, la durée jusqu’à la maturité, la longueur des gousses, le poids des gousses et des graines, et la résistance aux pucerons. L’organogenèse directe du niébé a été réalisée en utilisant les tissus de l’hypocotyle, de l’épicotyle ou des cotylédons. La régénération de niébé par embryogenèse somatique a été essayée, mais le cal a échoué à donner des plantes à une fréquence acceptable. La transformation génétique a été proposée, par ex. pour obtenir une résistance aux ravageurs par l’incorporation de gènes Bt (Bacillus thuringiensis) et de gènes inhibiteurs d’α -amylase, mais on ne dispose pas encore d’un système fiable pour une transformation génétique stable du niébé.

Perspectives

Le niébé est une source peu coûteuse de protéines végétales, surtout en Afrique de l’Ouest. Il joue un rôle important dans les systèmes de cultures associées et est un élément essentiel des systèmes intégrés de polyculture-élevage en Afrique de l’Ouest. Les maladies et ravageurs constituent les principales contraintes de la production de niébé. La sélection pour la résistance pourrait s’avérer cruciale pour venir à bout de ces contraintes, avec un rôle croissant pour les outils de la biotechnologie. L’amélioration dépendra aussi à l’avenir de la collecte des variétés locales et des espèces apparentées sauvages, et de leur utilisation dans les programmes de sélection.

Les perspectives pour le niébé potager sont excellentes en Afrique. Hormis les cultivars traditionnels de niébé à double fin (légume sec et légume-feuilles), il existe un besoin en types potagers spéciaux. Comme légume-feuilles : des plantes naines à port érigé ou prostré, à longue période végétative, à pousses et feuilles tendres. Pour les grains immatures : des plantes naines à port érigé ou prostré, à croissance déterminée. Pour les gousses fraîches : des gousses d’environ 15 cm de long (en remplacement du haricot vert dans les basses terres chaudes).

Comme légume-fruit, il semble logique de remplacer le niébé par le haricot-kilomètre, en raison de sa qualité et de son rendement supérieurs. On devrait évaluer l’adaptation des cultivars asiatiques aux conditions de l’Afrique tropicale, car si on l’associe à un développement du marché, le haricot-kilomètre peut parfaitement contribuer à élargir la gamme des légumes disponibles.

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Sources de l'illustration

  • Pandey, R.K. & Westphal, E., 1989. Vigna unguiculata (L.) Walp. In: van der Maesen, L.J.G. & Somaatmadja, S. (Editors). Plant Resources of South-East Asia No 1. Pulses. Pudoc, Wageningen, Netherlands. pp. 77–81.

Auteur(s)

  • R. Madamba

Department of Research & Specialist Services, Crop Breeding Institute, Box CY 550, Causeway, Harare, Zimbabwe

  • G.J.H. Grubben

Boeckweijdt Consult, Prins Hendriklaan 24, 1401 AT Bussum, Netherlands

  • I.K. Asante

Department of Botany, University of Ghana, Legon, P.O. Box LG55, Accra, Ghana

  • R. Akromah

Department of Crop and Soil Sciences, College of Agriculture and Natural Resources, KNUST, Kumasi, Ghana

Consulté le 22 décembre 2024.


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