Afotany (Pharmacopée malagasy) : Différence entre versions
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''Nom scientifique'' : ''Ranunculus pinnatus'' Poiret et sous-espèce ''madagascariensis'' (Freyn.) H. Perrier (Renonculacées). | ''Nom scientifique'' : ''Ranunculus pinnatus'' Poiret et sous-espèce ''madagascariensis'' (Freyn.) H. Perrier (Renonculacées). |
Version actuelle en date du 25 juillet 2017 à 11:02
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Sommaire
Nom scientifique : Ranunculus pinnatus Poiret et sous-espèce madagascariensis (Freyn.) H. Perrier (Renonculacées).
(Synonymes : Ranunculus pubescens Thunb., R. membranaceus Fresen., R. striatus Hochst., R. Rutenbergii Freyn., R. udus Freyn., R. emirnensis Bojer, R. madagascariensis Freyn.
- Nom accepté : Ranunculus pinnatus
Autres noms malagasy
Aforano, Odiandoha, Tongotramboabe (noms cités par H. Perrier de la Bâthie, in H. Humbert, Flore de Madagascar, 76e famille, Renonculacées (1950), p. 4-5 ; Perrier écrit par erreur « Haforano », orthographe erronée, puisque le mot vient de afo = feu, et non de hafotra).
Le nom de Tongotramboabe s'applique aussi à une Crassulacée toxique, Kalanchoe schizophylla (Baker) Baillon, également connue sous le nom de Kilingambato (voir à Kilingambato).
Description
Plante annuelle ou bisannuelle, à port dressé, de 25 à 40 centimètres de haut, plus ou moins velue ou portant des poils soyeux au moins sur les parties inférieures. Feuilles réunies à la base, peu nombreuses, longuement pétiolées, le plus souvent à 3 folioles, elles-mêmes plus ou moins subdivisées en trois segments dentés ou incisés. Fleurs jaunes groupées en inflorescence irrégulière, lâche, plus ou moins feuillée ; à 5 sépales, 5 pétales, de très nombreuses étamines et un grand nombre de carpelles séparés, dont chacun se transforme en un petit akène de 1 à 2 millimètres de long.
La sous-espèce ne diffère du type que par un aspect moins velu et quelques autres détails.
Bibliographie botanique principale :
- Lamarck et Poiret, Encyclopédie Méthodique (1783-1817), tome VI, p. 126 ;
- Thunberg, Prodromus Flora Capensis, p. 94 ;
- Hochsteter, in Flora XXI (1841), 28 ;
- H. Perrier de la Bâthie in Humbert, Flore de Madagascar, Renonculacées (1950), p. 4-6.
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Répartition géographique
Espèce commune dans les lieux humides, sur les digues de rizières, au bord des ruisseaux et des marais, dans toute l'Ile, mais surtout abondante dans la région centrale ; la sous-espèce madagascariensis est localisée aux montagnes de l'Ankaratra entre 1.500 et 2.400 mètres d'altitude. L'espèce se retrouve en Afrique du Sud et sur les montagnes d'Afrique Centrale et Orientale.
Étude chimique
La présence de protoanémonine (ou anémonol) et celle d’anémonine furent établies par Boiteau (1938), comme le rappelle R. Pernet in Mémoires Inst. Scient. Madag., série B, VIII (1957), p. 102 ; commentaires inédits rédigés pour le Dr Fontoynont au sujet d'un manuscrit de Ravalinera (1909) conservé dans la bibliothèque personnelle du Président de l'Académie Malgache ; une copie manuscrite du mémoire de Ravalinera et des commentaires de P. Boiteau figurait aux archives de l'I.R.S.M., citée par Pernet, sous référence n° 312, p. 130.
La protoanémonine C5H4O2 est une lactone insaturée. Elle est liquide à la température ordinaire et constitue une substance d'aspect huileux, jaune pâle, se colorant si on la laisse exposée à la lumière, à propriétés fortement vésicantes. Appliquée sur la peau, elle y produit immédiatement de petites sphacèles.
L’anémonine C10H8O4 résulte de la condensation de deux molécules de protoanémonine. C'est une substance solide, mais facilement sublimable sous vide, cristallisant en aiguilles ou en rhomboèdres incolores ; très peu soluble dans l'eau neutre, chaude ou froide, mais soluble en présence des alcalis étendus, peu soluble dans l'alcool, soluble dans le chloroforme et la pyridine. Elle jouit de propriétés antibiotiques vis-à-vis de nombreuses bactéries et de certains champignons ; mais celles-ci sont pratiquement inutilisables en thérapeutique parce que la cystéine, acide aminé présent dans le sang de l'Homme, ainsi que d'autres substances des sérums, inactivent ce pouvoir.
R. Pernet in Mémoires Inst. Scient. Madag., ser. B, IX (1959), p. 288, a reconnu en outre la présence de saponines, de flavones et a dosé 1,2. p. 100 de sucres hydrolysables. Les saponines ont été préparées ultérieurement par Boiteau, leur nature triterpénique a été établie (par spectre I.R.), mais leur faible proportion n'a pas permis d'en poursuivre l'étude.
Propriétés pharmacologiques et indications thérapeutiques
Heckel, in « Plantes Utiles de Madagascar » (1910), p. 159-160, a signalé l'emploi des feuilles sèches réduites en poudre, à la façon du tabac à priser, contre les céphalées et maux de tête (d'où le nom d'odi-
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andoha). Il signale aussi, d'après les travaux du Dr Polli en Italie, qu'on peut employer contre les douleurs rhumatismales chroniques et la sciatique de l'huile dans laquelle on a fait macérer la plante plusieurs jours, en application locale, après chauffage à la température la plus élevée que peut supporter le malade (sans aller jusqu'à la brûlure, bien entendu), ou bien l'application locale en friction de la teinture alcoolique à froid, ou encore de l'eau distillée de la plante fraîche qui entraîne la protoanémonine. Toutes ces préparations ont une incontestable efficacité, mais elles ont aussi une action vésicante très énergique et sont mal supportées par la peau de nombreux malades.
Ces propriétés vésicantes sont d'ailleurs très bien connues empiriquement et ce sont elles qui ont valu à la plante les noms malagasy d’afotany (feu de la terre) et aforano (feu de l'eau, allusion aux lieux humides où pousse la plante).
La plante, fraîche ou sèche, est, d'autre part, très toxique, tant pour l'homme que pour les animaux domestiques.
Cette espèce et les préparations qui en sont tirées doivent être réservées à l'usage externe. Lorsque la poudre de plante est prisée, contre les maux de tête, il faut avoir soin de ne pas en avaler. Si elle parvient dans la gorge elle provoque d'ailleurs une brûlure et une sensation de constriction du larynx extrêmement désagréable. En cas de broyage de la plante sèche, il convient de protéger par un masque ou un filtre respiratoire le personnel chargé de l'opération.
Préparation de l'eau distillée d'odiandoha
Pour préparer l'eau distillée, on place la plante fraîchement récoltée dans un alambic muni d'un tuyau d'injection de vapeur. La vapeur barbotte à travers la masse de la plante, qu'il ne faut toutefois pas trop comprimer, puis se condense dans le serpentin après avoir entraîné la protoanémonine et les produits actifs. On recueille autant de litres d'eau distillée qu'on a mis en œuvre de kilogrammes de plante fraîche. Cette eau distillée d’odiandoha doit être conservée dans des bouteilles en verre coloré, à l'abri de la grande lumière.
Onguent analgésique
A partir de cette eau distillée d’odiandoha, on peut préparer un excellent onguent analgésique uniquement à base de produits malagasy, suivant la formule suivante :
- Eau distillée d'Odiandoha 10 grammes
- Extrait de Voandramiary (graines de Datura) 1 gramme
- Essence d'Eucalyptus XV gouttes
- Lanoline 10 grammes
- Vaseline ou autre excipient 50 grammes
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Onguent à réserver à l'usage externe.
On applique cet onguent sur la peau, au niveau des parties douloureuses, et on masse doucement pendant quelques minutes. L'effet analgésique est rapide et dure plusieurs heures.
Usages vétérinaires
L'onguent d’Odiandoha a été employé avec succès en médecine vétérinaire dans le traitement des rhumatismes chroniques chez le Chien (essais du Dr H. Poisson avec un produit préparé par Boiteau). On l'a également essayé chez le boeuf et le cheval pour combattre des affections de la peau (il semble actif vis-à-vis de certaines mycoses).
Observation importante
L'afotany et ses préparations sont à réserver à l'usage externe et doivent porter les étiquettes appropriées à un tel usage. Ces produits sont parmi les produits locaux qui devraient faire l'objet d'une réglementation (inscription au Tableau C).
(On sait que les produits toxiques et dangereux importés sont l'objet d'une réglementation extrêmement stricte, mais que par contre les produits locaux même les plus dangereux, qui peuvent être à tout moment entre les mains de personnes non averties, ne sont l'objet d'aucune réglementation, ce qui est, pour le moins, paradoxal).