Lonchocarpus chrysophyllus (Pharmacopées en Guyane) : Différence entre versions
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Version actuelle en date du 1 juillet 2021 à 22:14
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Sommaire
Lonchocarpus chrysophyllus Kleinh.
- Nom accepté : Deguelia chrysophylla
Noms vernaculaires
- Créole : nivrée [nivré, niwoué], nivrée mâle.
- Wayãpi : ɨmeku.
- Palikur : ikun, ikun ahinẽ.
- Portugais : timbó-legítimo.
- Saramaka : mã neku.
Écologie, morphologie
Grosse liane de la forêt primaire humide, parfois protégée.
Collections de référence
Grenand 403, 550, 1300 ; Moretti 1037 ; Jacquemin 1592.
Emplois
L’usage de cette espèce ichtyotoxique est répandu chez toutes les ethnies de Guyane qui l’emploient ou l’employaient fréquemment (MORETTI et GRENAND, 1982) [1]. Les racines et les basses tiges contiennent une sève abondante exhalant une forte odeur de haricot écrasé. Dilacérées et immergées en grande quantité (généralement en amont immédiat des rapides), elles provoquent un blanchiment de l’eau des rivières. Les effets sur les poissons se font sentir au bout de dix à vingt minutes. Les effets sur l’homme de la sève toxique donnent lieu en Guyane à des débats passionnés et contradictoires.
Les Créoles considèrent que les pêches au Lonchocarpus polluent les eaux et sont à la base d’épidémies de diarrhée, tandis que les Wayãpi, contestant tout risque de diarrhée ou d’intoxication grave, se contentent de dire que la sève non diluée est enivrante et soporifique.
Cependant, chez les Aluku, Hurault (comm. pers.) a relevé pour la période 1950-1965 des cas de suicide avec la sève concentrée d’un Lonchocarpus.
Quant aux utilisations médicinales de cette liane, nous en avons trouvé une chez les Wayãpi (cf. Elaphoglossum laminarioides, Lomariopsidacées) et trois chez les Palikur. Chez ces derniers, la sève brute diluée dans un peu d’eau sert à nettoyer les écorchures des personnes diabétiques (risque d’aggravation). La sève brute est aussi appliquée sur la peau pour extraire les plombs de chasse en cas de blessure accidentelle. Enfin, si on y ajoute le suc extrait des raquettes de Opuntia cochenillifera (Cactacées) et quelques pieds de Justicia pectoralis (Acanthacées), elle constitue un remède contre les convulsions ou les accès démentiels (chez les alcooliques par exemple). La préparation, diluée dans l’eau et mise à macérer au soleil, est utilisée en lavage de tête [2].
Étymologie
- Créole : du français enivrer, en raison de l’effet qu’elle semble produire sur les poissons, et mâle, en raison de la dureté de la tige.
- Wayãpi : les mots utilisés par les Amérindiens de Guyane, Kali’na, iñeku, Wayãpi, ɨmeku et Palikur, ikun sont tous apparentés ; dans cette dernière langue ahinẽ signifie « dur, ligneux ».
Chimie et pharmacologie
Le principe actif des Lonchocarpus est constitué par des roténoïdes. La roténone et ses dérivés, les roténoïdes, ont la propriété d’asphyxier le poisson. En fait, ils agissent sur tous les animaux en bloquant la respiration à l’intérieur des cellules au niveau des mitochondries, mais les animaux à sang chaud sont protégés par leur revêtement cutané qui empêche la résorption du poison alors que les animaux à sang froid (insectes, poissons, serpents) y sont particulièrement sensibles. La roténone est très active même très diluée (au millionième). La teneur en roténoïdes de la présente espèce, variable suivant les échantillons, est relativement faible (1 à 4 %).
Elle n’a pas à notre connaissance, fait l’objet d’une étude chimique approfondie. Cette espèce est très proche de Lonchocarpus urucu Killip et A.C Smith (nom accepté : Deguelia urucu) et renferme vraisemblablement des roténoïdes voisins, notamment roténone et déhydroroténone (BRAZ FILHO et al., 1975). Les drogues à roténone sont employées en grande quantité comme insecticide en phytopharmacie, sous forme de poudre végétale, pour lutter contre les chenilles, pucerons et autres doryphores, présentant le grand avantage d’être inoffensives pour l’homme. La tendance actuelle est de les associer aux pyréthrynes, autres insecticides végétaux, afin de combiner leurs actions, les effets de ces derniers étant plus rapides mais aussi plus fugaces.
Tests chimiques en fin d’ouvrage.
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- ↑ Précisons que plusieurs Lonchocarpus lianescents ou arbustifs, connus sous le terme générique de timbó au Brésil, barbasco dans les pays hispanophones et haiari à Surinam et en Guyana, sont utilisés comme ichtyotoxiques par les Amérindiens et les populations rurales de l'Amazonie et des Guyanes. On notera enfin que la famille des Papilionacées fournit 25 % des plantes ichtyotoxiques connues mondialement (ACEVEDO-RODRIGUEZ, 1990).
- ↑ Des usages encore plus extraordinaires ont été notés chez les Amérindiens et les Créoles du nord-ouest de la Guyana, qui absorbent la sève pour soigner le sida ou les cancers intestinaux (VAN ANDEL, 2000).