Caille-lait (Cazin 1868) : Différence entre versions
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+ | [[File:Traité pratique et raisonné des plantes médicinales indigènes (Pl. XI) (6459814389).jpg|thumb|PLANCHE XI : 1. Caille-lait. 2. Camelée. 3. Camomille romaine. 4. Camphrée. 5. Capillaire.]] | ||
Version actuelle en date du 7 mars 2017 à 23:30
Sommaire
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Caille-lait
Nom accepté : Galium verum
Gallium luteum. Ger., Park. — Gallium verum Dioscoridis et Galeni. J. Bauh.
Caille-lait officinal, — caille-lait jaune, — gaillet, — petit muguet.
Rubiacées. — Aspérulées. Fam. nat. — Tétrandrie monogonie. L.
Cette plante (Pl. XI) est très-commune dans les prés secs, sur la lisière des bois. Son nom lui vient de la propriété illusoire qu'on lui attribuait de cailler le lait. Les sommités fleuries sont un bon fourrage pour les chèvres et les moutons.
Description. — Racine vivace, traçante, longue, brune. — Tiges grêles, carrées, rameuses, de 30 à 50 centimètres, noueuses, articulées, velues à la base. — Feuilles linéaires-étroites, à bords rouges en dessous, par verticilles de six ou huit, face intérieure pubescente, blanchâtre, face supérieure luisante, rude. — Fleurs jaunes, petites, nombreuses, en panicule allongé, à rameaux multiflores opposés, pédoncules munis à leur base de plusieurs feuilles florales aiguës (juin à octobre). — Calice à quatre dents, limbe presque nul. — Corolle rotacée, plane, à quatre lobes ovales pointus. — Quatre étamines à anthères globuleuses, dressées, saillantes. — Style bifide. — Stigmates arrondis. - Ovaire didyme, se changeant en un fruit lisse, glabre (diakène).
Parties usitées. — Les feuilles et les sommités fleuries.
[Culture. — Les gallium ne sont cultivés que dans les jardins botaniques ; on les multiplie par semis ou par séparation des pieds.]
Récolte. — On doit le récolter lorsqu'il est en fleur et par un beau temps. Dis-
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posé en guirlandes, on le fait sécher promptement, pour le conserver ensuite dans des boîtes et à l'abri de l'humidité. Ses fleurs noircissent, et il perd de ses propriétés en vieillissant. Comme on peut se le procurer facilement, on fera bien de ne pas le garder au delà d'un an.
Propriétés physiques et chimiques ; usages économiques. — Toute la plante exhale une odeur aromatique approchant de celle du miel. L'eau distillée des fleurs est également odorante. L'analyse chimique a montré dans le gaillet de l'acétate de potasse, de l'acide gallique et du tannin. D'après les expériences de Parmentier et de Déyeux, cette plante n'a point du tout la propriété de faire cailler le lait « Cependant, dit Roques, les fleurs ont des nectaires remplis d'une sorte de miel qui s'aigrit par une dessiccation lente, et passe à l'état d'acide acétique, ce qui pourrait expliquer la propriété qu'ont ces fleurs de faire cailler le lait. Ainsi les deux chimistes que nous venons de citer pourraient bien n'avoir pas tout à fait raison. »
Dans plusieurs contrées de l'Europe, et particulièrement en Angleterre, dans le comté de Chester, où les fromages sont très-estimés, on a soin, pour donner au coagulum une coloration et une saveur particulières, de mêler les sommités fleuries de caille-lait jaune avec la présure. Les Anglais donnent au caille-lait jaune le nom de présure de lait (cheese rennel), qui s'accorde mieux avec l'origine du mot que celui de caille-lait.
Les fleurs, en décoction dans une eau d'alun avec de la laine, donnent à celle-ci une couleur orangée. La racine, arrachée au printemps ou en automne, bien nettoyée et disposée par couches avec la laine filée, ensuite bouillie avec la petite bière, teint la laine en rouge.
A L'INTÉRIEUR. — Infusion, de 15 à 30 gr. par kilogramme d'eau. |
Eau distillée, de 50 à 100 gr. et plus. |
Le caille-lait jaune est antispasmodique, sudorifique, légèrement diurétique et astringent. On l'a vanté dans l'épilepsie et les affections épileptiformes, dans les affections nerveuses en général, la gastralgie, l'hystérie, etc.
Les anciens employaient cette plante comme astringente dans l'épistaxis, et fomentaient avec sa décoction les parties affectées d'éruption ou d'inflammation cutanée. On l'a préconisée plus tard en Catalogne et ensuite en France comme antispasmodique dans les affections nerveuses et notamment dans l'épilepsie. Bonafons a particulièrement appelé l'attention des médecins sur les propriétés antiépileptiques de cette plante. « Dans toutes ses expériences, dit Guersant[1], il a commencé par saigner et purger les malades, et leur a fait prendre ensuite, pendant trois jours consécutifs, quatre onces de suc exprimé des sommités fleuries de gaillet, et pendant un mois une infusion théiforme de cette plante. Les malades qu'il obligeait de rester au lit ont presque toujours transpiré assez abondamment, et plusieurs de ceux dont il parle ont guéri ; mais je n’aurais garde, dit-il, de considérer ce remède comme un spécifique constant, car je m’en suis servi dans d'autres cas sans succès. On ne peut qu’approuver la sage réserve de Bonafons, quand on considère que l'épilepsie est une maladie qui tient à une foule de causes différentes, très-souvent obscures, et que la saignée et le purgatif ont pu produire beaucoup plus d’effet que le suc de gaillet, qu'il ne donnait qu'après. Sous ce rapport, la méthode de Jourdan, qui s'est servi du suc gaillet blanc, seul et sans autre remède, présente quelques avantages ; mais il paraît que, dans la plupart des cas, les malades n'ont éprouvé qu'un soulagement momentané. Tout ce qu’on peut, jusqu'à ce jour, conclure de ces expériences c'est que les fleurs des gaillets jaune et blanc agissent a la manière de beaucoup de fleurs odorantes, en produisant un effet d’abord légèrement sédatif, et ensuite un peu excitant, comme l'indique la diapho-
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- ↑ Dictionnaire des sciences médicales, t. III, p. 442.
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rèse qui a été un résultat constant de ce remède. On peut par conséquent placer les gaillets jaune et blanc dans les divisions des sédatifs diaphorétiques, qui appartiennent ordinairement à la classe très-nombreuse des antispasmodiques. Ils se rapprochent jusqu'à un certain point des fleurs de tilleul, qui contiennent cependant beaucoup plus d'huile volatile odorante, et dont les propriétés, qui sont plus actives, ne se dissipent pas aussi facilement par la dessiccation que celle des gaillets. »
Hufeland prescrit cette plante dans l'épilepsie ; mais il ne cite aucun fait constatant ses effets dans cette maladie.
J'ai souvent mis en usage le caille-lait jaune dans les gastralgies, dans l'hystérie, et en général dans les affections nerveuses, comme auxiliaire de moyens plus énergiques. Il a évidemment calmé les symptômes de la chorée chez une jeune fille de treize ans, d'une faible constitution, non menstruée. Elle prenait chaque jour 500 gr. d'une forte infusion des sommités fleuries de cette plante fraîchement récoltée.
Ferramosa[1] a récemment vanté le caille-lait jaune dans le traitement des scrofules dégagées de toute complication. Il le préfère à l'iode et à tous les antiscrofuleux employés jusqu'à ce jour. On donne son suc à l'intérieur à une dose aussi élevée que le malade peut la supporter. On applique la plante pilée sur les engorgements et les ulcères scrofuleux. L'analyse chimique, en montrant dans cette plante de la potasse, de l'acide gallique et du tannin, explique théoriquement, suivant Ferramosa, les résultats pratiques qu'on en a obtenus.
Caille-lait blanc
Nom accepté : Galium mollugo
CAILLE-LAIT BLANC (Gallium mollugo, L.) est tout aussi abondant que le caille-lait jaune.
— Tige un peu plus élevée. — Feuilles moins linéaires. —- Fleurs blanches, sur des rameaux plus étalés, s'épanouissant un mois plus tôt.
[Les fleurs du caille-lait blanc renferment des traces de coumarine, à laquelle elles doivent l'odeur agréable qu'elles répandent.]
Les propriétés du caille-lait blanc sont les mêmes que celles du caille-lait jaune.
Miergues fils[2] dit qu'il a signalé en 1840, à l'Académie des sciences, l'emploi du gallium rigidum et du gallium mollugo contre l'épilepsie. Son grand-père avait appris de Gouan que Jourdan, recteur de l'Université de Tain, lui avait donné la formule d'un remède antiépileptique conservé depuis longtemps dans sa famille. Ce remède était le gallium mollugo, tant vanté par les anciens, et désigné sous le nom de gallium palustre album latiore folio, etc. « Les auteurs modernes, dit Miergues, signalent à peine cette plante, qui jouit de propriétés antispasmodiques irrécusables, et qui, dans l’état actuel de l’art médical, peut être considérée comme l'antiépileptique le plus fidèle. L'expérience m'a pleinement confirmé l'opinion de Garidel, observant que lorsque le suc de cette plante évacue, l'effet en est plus certain. »
Nous ne doutons nullement de la bonne foi de Miergues ; mais on peut observer avec prévention, avec enthousiasme. Si la vérité est dans les faits, elle ne se présente pas sous le même aspect à tous les yeux. Le concours simultané de divers moyens peut faire attribuer au remède de prédilection les résultats obtenus, ce que n'eut garde de faire en pareils cas Bonafons, cité plus haut. Quelques faits rigoureusement observés et bien circonstanciés, fournis par Miergues, eussent été, dans un objet aussi important, le plus ferme appui de ses assertions sur les propriétés antiépileptiques du gaillet blanc.
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(Il existe à Tain, dans la Drôme, un établissement spécial pour la cure de l'épilepsie par le caille-lait. Deux de mes clients y ont été admis. Il y a eu une légère amélioration ; mais je puis avec grande raison l’attribuer au changement de régime, à la sévère observance d'une hygiène tempérante. L'Académie dès 1857 avait décrété la vertu négative de la plante qui nous occupe.