Siparuna guianensis (Pharmacopées en Guyane)

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Stryphnodendron guianense
Pharmacopées traditionnelles en Guyane, 2004
Siparuna pachyantha


Siparuna guianensis. Fruits mûrs du vénéré


Famille Monimiaceae

Siparuna guianensis Aublet

Synonymie

  • Citriosma guianensis (Aubl) Tul.

Noms vernaculaires

  • Créole : vénéré, viniré [vénéré, viniré].
  • Wayãpi : enẽmɨ’o, wainɨmɨ’o.
  • Palikur : yariwapna.
  • Aluku : kapasi wiwii.
  • Portugais : capitiú, caá-pitiú.

Écologie, morphologie

Petit arbre des forêts secondaires, commun partout. Un fort parfum émane des divers organes.

Collections de référence

Grenand 755, 1850 ; Jacquemin 2006 ; Moretti 680, 934, 1024 ; Prévost 3650.

Emplois

Cette plante est l’une des drogues les plus appréciées de la Guyane. La nomenclature créole en distingue plusieurs « variétés » : vénéré rouge, blanc, mâle, femelle, qui correspondent aux différentes formes que peut prendre cette plante ou à des espèces voisines (cf. infra, Siparuna poeppigii). Les Créoles considèrent la tisane des feuilles comme abortive, ocytocique [1] et fébrifuge, L’alcoolature des feuilles réduisant les œdèmes est très réputée comme vulnéraire (cf. Curcuma longa, Zingibéracées).

La décoction salée des feuilles est hypotensive, à raison de trois tasses par jour. Les Wayãpi utilisent la décoction des feuilles et des écorces de tronc, rafraîchissante et fébrifuge, en particulier en cas de grippe [2]. Elle est bue en petites quantités mais surtout administrée en bain.

Un usage identique a été observé chez les Aluku du Maroni (FLEURY, 1991).

Chez les Palikur, les feuilles pilées et additionnées de sel sont préparées en décoction utilisée soit en cataplasme pour son action anti-inflammatoire sur les coups, soit en bain pour favoriser les accouchements. Les feuilles associées à l’écorce de bois canon (Cecropia obtusa, Cécropiacées) et aux feuilles de diverses Loranthacées servent en emplâtre à résoudre les fractures. Pour une préparation voisine, cf. également Inga pezizifera, Mimosacées.

Les feuilles répandues sur le sol sont un insectifuge utilisé contre les puces [3].

Étymologie

  • Créole : du français « vulnéraire », en raison d’une de ses propriétés.
  • Wayãpi : wainɨmɨ’o de wainɨmɨ, « oiseau-mouche » et o, « feuille ».
  • Palikur : de yariwu, « prendre » et pna, « feuille » ; cf. usage insectifuge.

Chimie et pharmacologie

Les espèces du genre Siparuna sont reconnaissables à l’odeur caractéristique proche de celle de la citronnelle qui se dégage des feuilles et des fruits. Les huiles essentielles renferment des sesquiterpènes (EL-SEEDI, 1993 ; ZOGHBI et al., 1998).

BRAZ FILHO et al. (1976) ont isolé deux alcaloïdes oxoaporphiniques : la liriodénine et la cassamédine. Nous avons aussi, dans notre laboratoire, isolé de cette espèce ces deux alcaloïdes ainsi que plusieurs autres bases aporphiniques que nous n’avons pas identifiées. Nous avons essayé de retrouver les propriétés liées aux divers usages populaires sur un lyophilisat d’un décocté de feuilles et dans une teinture alcoolique de feuilles fraîches. Le lyophilisat s’est avéré peu toxique : DL 50 = 330 mg/kg (v.i.) ; DL 50 > 5 mg/kg (v.o.).

Il n’a pas d’effet spasmolytique et il est inactif à 3,3 et 6,6 mg/kg vis-à-vis des différents bronchoplasmes (méthode de Konzett et Rossler), Il ne possède pas non plus d’effet spasmolytique au niveau bronchique (technique de Castillo et de Beer). Ce lyophilisat est dépourvu d’effet sur le S.N.C. ; il est faiblement analgésique à 500 mg/kg (test à la phénylbenzoquinone). La teinture ne possède pas d’action anti-inflammatoire locale significative (technique de Garcet) (Cavé et Moretti, comm. pers).

Un brevet a été déposé sur les applications en dermo-cosmétique d’un extrait de cette espèce présentant une activité antiradicalaire (PAULY et MORETTI, 1998b).

Tests chimiques en fin d’ouvrage.

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  1. Un usage similaire a été trouvé chez les Yawalapiti du haut Xingu pour Siparuna cujabana (Mart.) A. DC. (EMMERICH et SENNA VALLE, 1991).
  2. Les Tacana de Bolivie se servent de Siparuna asperula (Tul.) A. DC. de façon similaire (BOURDY et al., 2000).
  3. En Amazonie, l’usage de cette espèce est également très populaire. Fréquent sur les marchés, c’est un remède utilisé partout comme vulnéraire et cicatrisant, tant par les Amérindiens que les populations rurales. Elle est aussi employée comme carminative, excitante et antispasmodique (LE COINTE, 1934) et contre le paludisme en Colombie et au Brésil (MILLIKEN et ALBERT, 1996). MILLIKEN et al. (1992) signalent l’usage de l’écorce en décoction de Siparuna decipiens (Tul.) A. DC. chez les Waimiri-Atroari pour soigner les douleurs d'estomac et comme déparasitant.