Busserole (Cazin 1868)

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Buplèvre
Cazin, Traité des plantes médicinales, 1868
Butome
PLANCHE X : 1. Bourse-à-Pasteur. 2. Bryone. 3. Bugle. 4. Buglose. 5. Busserole.


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Busserole

Nom accepté : Arctostaphylos uva-ursi

BUSSEROLE. Arbutus uva ursi. L.

Uva ursi. Clus., Tourn.

Arbousier, — busserole, — arbousier traînant, — bousserole, — buxerolle, — raisin d'ours, — petit buis.

Ericacées. — Ericées. Fam. nat. — Décandrie monogynie. L.


On rencontre cet arbuste (Pl. X), toujours vert et d'un aspect gracieux, dans le midi de la France, principalement sur les montagnes des Alpes, du Jura, des Vosges et des Pyrénées, où il occupe les lieux ombragés, pierreux et stériles. On pourrait, dans les contrées où il ne vient pas spontanément, le cultiver dans les jardins.

Description. — Racine ligneuse. — Tiges faibles, rampantes, rameuses, glabres, longues de 30 à 60 centimètres ; jeunes pousses rougeâtres et légèrement pubescentes. - Feuilles alternes, épaisses, peu pétiolées, rapprochées, entières, luisantes, d'un vert foncé en dessus, plus clair au-dessous, ovales-oblongues, un peu élargies vers le sommet, ordinairement émoussées et même parfois marquées d'une échancrure peu profonde, ressemblant à celle du buis ; de là son nom de busserole. — Fleurs blanches légèrement rosées en dessus, en grappe terminale penchée, accompagnées de trois petites bractées (avril-mai).— Calice étalé, très-petit, quinquéfide. — Corolle monopétale, urcéolée, rétrécie de la base au sommet, limbe à cinq divisions réfléchies en dehors. — Dix petits nectaires arrondis, transparents. — Dix étamines attachées à la base de la corolle, incluses, plus petites que le pistil, qui fait saillie hors du limbe. - Filets velus. — Anthères ovoïdes, rouges, bifides. — Ovaire globuleux à cinq loges multiovulées. — Style cylindrique épais, que termine un stigmate aplati. — Fruit : baie rouge, pisiforme, devenant rouge en mûrissant : graines olivaires très-dures.


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Parties usitées. — Les feuilles, l'écorce et les baies.

[Culture. — Cette plante demande une exposition ombragée ; on la multiplie de graines semées aussitôt après la maturité ; on repique les jeunes plants séparément dans de petits pots qu'on expose au levant et qu'on rentre en hiver pendant les premières années, lorsqu'ils sont assez forts on les plante à demeure ; on peut aussi les propager par boutures ou par marcottes qu'on ne lève que la seconde ou la troisième année.]

Récolte. —- Les feuilles, étant toujours vertes, peuvent être cueillies en toute saison. On doit choisir les plus jeunes. On les trouve séchées dans le commerce. On les falsifie souvent avec celles de l'airelle ponctuée, quelquefois avec celles de buis. Les feuilles d'airelle ponctuée diffèrent de celles d’uva ursi par leur couleur moins verte, par leurs bords veloutés, par leurs nervures très-apparentes, par leur face inférieure blanchâtre, parsemée de petites taches brunes. L'infusion de ces feuilles éprouve peu de changement par le sulfate de fer, tandis que celle des feuilles d’uva ursi donne par ce réactif un précipité bleu noirâtre très-abondant, qui indique la présence du tannin et de l'acide gallique. Quant aux feuilles de buis, elles en diffèrent beaucoup plus, et seront facilement reconnues. D'ailleurs, traitées comme celles de busserole et d'airelle, le précipité est d'un gris verdâtre, peu abondant.

Propriétés physiques et chimiques. — Les feuilles, d'une odeur nulle, ont une saveur amère et légèrement styptique. La tige, ainsi que l'écorce, ont une astringence plus marquée que les feuilles, et leur amertume est plus sensible vers la partie inférieure de la plante. L'eau s'empare des principes actifs de la busserole. Cette plante contient : acide gallique, 1.2 ; tannin, 36.4 ; résine, 4.4 ; apothème, 0.8 ; gomme et sel soluble, 3.3 ; chlorophylle, 6.3 ; pectine, 2.15 ; extractif, 17.6 ; ligneux, 9.6 — 103 ; et selon Kawlier, un principe cristallisé, l’arbutine, soluble dans l'eau et l'alcool, peu dans l'éther.

[D'après cet auteur, l'arbutine est un glycoside ; elle peut être représentée par C32 H24 O21, et sous l'influence de la synaptase elle se dédouble en glycose et en arbuvine :

C32 H24 O21 = C20 H10 O7 + C12 H12 O12 + H2 O
Arbutine = Arbuvine + Glycose + H2 O

Les feuilles de busserole se distinguent chimiquement de celles d'airelle, avec lesquelles on peut les confondre, en ce que celles-ci ne renferment ni tannin ni acide gallique.]

Les feuilles et les rameaux servent au tannage des peaux et à la teinture des laines. On trouve près du collet de la racine une cochenille qui offre tous les caractères de celle de Pologne (coccus polonicus, L.).


PRÉPARATIONS PHARMACEUTIQUES ET DOSES.


A L'INTÉRIEUR. — Infusion ou décoction des feuilles, 15 à 30 gr. par kilogramme d'eau.
Poudre, 2 à 8 gr., en bols, pilules, ou dans ou vin blanc. Bourne en donnait aux phthisiques 40, 60, 75 centigr. à 1 gr. trois fois par jour dans du lait.

Extrait (1 sur 7 d'eau), 1 à 4 gr., en potions, bols, pilules.
(Sirop (de Beauvais) uva ursi, 90 gr.; sucre, 1000 gr.; eau bouillante, Q. S. ; épuiser l’A. B. par déplacement et faire fondre le sucre en vase clos au bain-marie.)


La busserole est astringente et diurétique. On l'emploie dans la gravelle, le catarrhe chronique de la vessie, la colique néphrétique, la blennorrhagie, la leucorrhée, la diarrhée chronique, l'albuminurie, l'engorgement de la prostate, le catarrhe pulmonaire, la phthisie, la parturition lente, etc.

Les éloges prodigués à cette plante par les médecins de Montpellier et par Dehaen lui ont fait une réputation dont elle jouit encore aujourd'hui. On lui attribuait la propriété non-seulement de guérir le catarrhe vésical, les ulcérations des reins, mais encore celle de dissoudre les calculs vésicaux. L'observation rigoureuse des faits, en réduisant ces exagérations à leur juste valeur, a laissé à la busserole la place distinguée qu'elle occupe dans la matière médicale, et que ses propriétés réelles lui ont value.

Dehaen est, sans contredit, le médecin qui a le mieux apprécié l'action de l’uva ursi dans les affections des voies urinaires. « Tous ceux, dit-il, qui présentent une suppuration prolongée et abondante, rebelle aux autres


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moyens thérapeutiques, vers le système urinaire, les reins, l'uretère, la vessie, l'urètre, le scrotum, le périnée, sans aucune empreinte vénérienne et en dehors des signes évidents d'un calcul, ont guéri entièrement par l’uva ursi, et leur guérison ne s'est pas démentie... De ceux affectés manifestement de calcul, dit encore Dehaen, plusieurs ont éprouvé un soulagement tellement constant que, même après avoir cessé le médicament, ils ne souffraient nullement en rendant ou en retenant leurs urines. D'autres, après avoir paru guéris, ont eu une rechute pour guérir de nouveau par le même moyen ; ainsi de suite, trois, cinq et six fois ; d’autres, enfin, n’ont éprouvé aucun soulagement, ce qui tenait aux conditions fâcheuses dans lesquelles ils se trouvaient. »

« Tous ces faits, dit Debout dans un article très-remarquable concernant la bousserole, Dehaen les appuie sur de nombreuses observations que nous voudrions pouvoir citer toutes ; nous nous bornerons à deux seulement. L'une est relative à un sexagénaire qui avait eu, depuis vingt ans, à plusieurs reprises, de la difficulté pour uriner, et qui, depuis neuf mois, avait une ischurie telle qu’il urinait goutte à goutte avec les plus intolérables douleurs ; les urines étaient extrêmement fétides, purulentes, muqueuses, sanguinolentes. Après sept mois de l'usage de la poudre d’uva ursi, à la dose de 4 gr. par jour, l'urine avait perdu tous ses caractères : rétablissement parfait sauf de temps en temps des urines muqueuses. Rechute six mois après, guérison par le même moyen. Dans une seconde observation, on voit un calculeux dans un état le plus déplorable, presque entièrement rétabli pendant six mois, à l'aide de ce moyen ; et une troisième observation nous montre, à la suite de l'opération de la taille, les urines purulentes et fétides se transformant en quelque sorte sous l'influence de l’uva ursi.

« Concluons, avec Dehaen, avec Prout, et beaucoup d'autres auteurs, ajoute Debout, que l'emploi de l’uva ursi, en poudre surtout, à la dose de 2 à 4 gr., continué pendant un temps assez long, constitue l'un des meilleurs moyens modificateurs des inflammations des voies urinaires, avec sécrétion abondante de mucus ou de muco-pus, et qu'il serait regrettable que cet agent thérapeutique tombât dans un oubli immérité, aussi préjudiciable ans malades qu'aux médecins[1]. »

« Divers praticiens se sont assurés, dit Gilibert, que si les feuilles en décoction et en poudre ne dissolvent pas le calcul, cependant elles calment les douleurs. La plupart des malades ont été évidemment soulagés : quelques-uns ont rendu de gros graviers et une quantité étonnante de glaires. Nous avons cent fois obtenu les mêmes résultats ; ainsi nous regardons la bousserole comme un végétal précieux, surtout contre les affections jusqu'alors rebelles à tous les secours de l'art. Certains sujets ne peuvent supporter ni la poudre, ni la décoction, qui leur causent des anxiétés, des vomissements. »

A l'aide de cette plante, Murray[2], Girardi[3], Bergius, Cullen, Hufeland, ont réussi à calmer les douleurs spasmodiques causées par les calculs urinaires. Planchon[4] a observé que cette plante avait guéri l'incontinence d'urine survenue après l'opération de la taille. C'est une observation, dit-il. que j'ai faite chez un petit garçon. Depuis qu'il a pris environ 10 à l2 gros (40 à 48 gr.) d’uva ursi, il retient constamment ses urines. Kluyskens affirme que c'est dans la cysthirrée que l’uva ursi est particulièrement utile, qu'elle lui a paru arrêter l'écoulement muqueux de la vessie beaucoup plus effica-

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  1. Bulletin général de thérapeutique, t. XLVI, p. 507.
  2. De arbuto uva ursi commentatio. Goettingue, 1764.
  3. De uva ursi. Padoue, 1764.
  4. Le naturisme ou la nature considérés dans les maladies et leur traitement, etc. Tournay, 1778.


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cernent qu'aucun autre astringent. Soemering l'emploie pour combattre le spasme vésical occasionné par le déplacement de la goutte.

« Nous avons remarqué, dit Roques, que les diverses préparations de cette plante, sa décoction, son infusion aqueuse ou vineuse, soulagent particulièrement les vieillards affectés de gravelle. Les urines sont plus abondantes et souvent chargées de matières muqueuses et sablonneuses. Mais cette plante ne convient certainement pas lorsque la strangurie est occasionnée par une irritation inflammatoire des reins ou de la vessie. Tous les diurétiques un peu actifs sont alors nuisibles, tandis que les évacuations sanguines, les boissons douces, émulsives, tempérantes, comme l'eau d'orge, l'eau de graines de lin, le lait d'amandes, soulagent infiniment le malade. »

J'ai eu à me louer de la décoction d’uva ursi dans le catarrhe chronique de la vessie et dans la gravelle.

Un journal hollandais rapporte que Sommers, chirurgien à Leyde, a cherché à réhabiliter l'usage de l’uva ursi, ou busserole, qui, pendant longtemps, a été employée dans le traitement de diverses affections des voies urinaires. Cette plante a été administrée à trois malades, et avec le succès le plus complet.

Ségalas, qui a étudié avec tant de soin les maladies des voies urinaires, conseille la décoction des feuilles de busserole pour favoriser la sortie des éléments de la pierre.

Quelques praticiens célèbres, parmi lesquels on remarque Werlhof, Acrel et Fothergill, Lewis, Sauvages, ont contesté à la busserole l’action que les faits que nous venons de rapporter attestent. « Cette diversité d'opinions, dit Biett[1], prouve que, dans la matière médicale comme dans les autres parties de la médecine, il faut répéter avec Hippocrate : Judicium difficile, experientia fallax » Mais a-t-on toujours employé dans le Nord l’uva ursi ? Les substitutions frauduleuses dont nous avons parlé ne peuvent-elles pas expliquer les dissidences des auteurs sur les effets de cette plante ? Toutefois, il paraît certain que l'immortel Haller, tourmenté par une dysurie opiniâtre, n'éprouva de son usage longtemps continué qu'un soulagement peu remarquable.

Le célèbre Barthez, atteint de la pierre, et ne voulant pas se faire opérer, crut pouvoir calmer ses souffrances par l'usage de la busserole, à laquelle il attribuait la propriété de diminuer sympathiquement l'irritation de la poitrine par son action sur la vessie : il croyait ainsi combattre à la fois deux affections dont il était atteint : lorsqu'il se décida à se faire opérer, il était trop tard ; sa confiance dans les vertus de l’uva ursi lui a été fatale.

(Le raisin d'ours agit-il en modifiant heureusement les maladies des voies urinaires comme un simple astringent ? nous ne le pensons pas. Avec de Beauvais[2], nous sommes portés à admettre une sorte de spécificité d'action, dont le résultat est une excitation puissante des fibres de la vie organique, excitation qui rend la force et la contractilité aux organes affaiblis et leur permet de réagir contre des corps étrangers et des tumeurs obstruant leur cavité.)

(L'action excitante spéciale est si évidente que, dans certains cas, l'usage de la décoction de cette plante détermine du ténesme. Racle a pu guérir, par son emploi, une paralysie vésicale consécutive à des accès d'hystérie. C'est au même titre que l’uva ursi réussit dans les incontinences d'urine, comme la strychnine.

Une nouvelle application de l’uva ursi est appelée à rendre de grands services. De Beauvais annonça en 1863 son utilité comme agent obstétrical. D'après quelques expériences d'Harris, entre ses mains, la busserole a pro-

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  1. Dictionnaire des sciences médicales, t. III, p. 408.
  2. Bulletin de thérapeutique, t. LIV, p. 29.


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finit les meilleurs résultats en décoction forte dans le cas de contractions insuffisantes de l'organe utérin, avec épuisement nerveux. Les observations se sont multipliées depuis, et dans tous les cas il y a eu succès. Cette propriété excito-motrice est d'autant plus précieuse qu'on ne rencontre pas ici les contractions toniques si douloureuses pour les mères et si dangereuses pour les fœtus produites quelquefois par l'ergot.

(Voyez, à ce sujet, entre autres observations, celles de Gauchet[1] et de L. Marchand[2]. Dans ce dernier cas, il s'agit d'une fausse couche à cinq mois de grossesse, avec rétention du placenta. Sous l'influence d'une infusion de busserole, prise à six heures du matin, les contractions se produisirent à neuf heures, et à midi et demi le placenta, engagé en partie dans le col depuis la veille, était expulsé sans douleur. L'hémorrhagie légère qui durait depuis la même époque s'arrêta pour ne plus reparaître.

Dans les hémorrhagies puerpérales ou non, on trouve dans la bousserole un modificateur puissant.)

Robert Bourne a recueilli, dans un traité ex professo[3], seize observations qui tendent à prouver l'efficacité de la busserole dans la phthisie pulmonaire. Dans huit cas, la phthisie était au premier degré. Dans les neuvième, dixième et onzième cas, la phthisie était confirmée avec expectoration purulente ; chez les douzième et treizième malades, l'affection, accompagnée cependant d'expectoration purulente, ne constituait pas la vraie phthisie. Les trois derniers cas étaient des fièvres hectiques où l'affection pulmonaire était nulle ou secondaire. Ces faits, recueillis à une époque où le diagnostic des affections de poitrine était peu avancé, sont néanmoins de nature à appeler l'attention des praticiens, et à provoquer de nouveaux essais tendant à constater l'action réelle de l’uva ursi dans ces affections. (Voyez TANNIN.).

On a employé avec avantage la busserole dans tous les cas où les astringents sont indiqués. Elle s’est montrée utile dans les diarrhées atoniques, les leucorrhées anciennes, les hémorrhagies passives, etc.

Les racines et l’écorce ont les mêmes propriétés que les feuilles. On a aussi employé les baies qui servent d'aliment dans quelques contrées.

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  1. Bulletin de thérapeutique, t. LVI
  2. Journal de médecine et de chirurgie pratiques, avril 1864, p. 174.
  3. Cases of pulmonary consumption, etc., treated with uva ursi, etc. Oxford, 1805.


Arbousier

Nom accepté : Arbutus unedo


(Citons une espèce voisine, l'ARBOUSIER (Arbutus unedo, L.), fraise en arbre, croissant dans tout le bassin de la Méditerranée ; ses fruits acidulés, assez agréables, sont comestibles et légèrement astringents ; ainsi que les feuilles et l'écorce, ils passent pour efficaces dans les diarrhées. Malgré son degré peu marqué d'astringence, l'extrait d'arbousier a été préconisé par Venot et employé à l'hôpital Saint-Jean de Bordeaux, à l'intérieur et en injections dans la blennorrhagie. Pour cet auteur, il supplée le ratanhia et constitue un bon auxiliaire du cubèbe et du copahu contre les blennorrhées.)