Cardon et Artichaut (Candolle, 1882)

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Nom accepté : Cynara cardunculus L. Groupe Cardon et Groupe Artichaut

Mache ou Doucette
Alphonse de Candolle, Origine des plantes cultivées, 1882
Laitue

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Cardon. — Cynara Cardunculus, Linné.

Artichaut. — Cynara Scolymus, Linné. — C. Cardunculus, var. sativa, Moris.

Depuis longtemps, quelques botanistes ont émis l'idée que


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l'artichaut est probablement une forme obtenue, par la culture, du Cardon sauvage 1. Aujourd'hui, de bonnes observations en ont donné la preuve. Moris 2, par exemple, ayant cultivé, dans le jardin de Turin, la plante spontanée de Sardaigne à côté de l'Artichaut, affirme qu'on ne pouvait plus les distinguer par de véritables caractères. MM. Wilkomm et Lange 3, qui ont bien observé, en Espagne, la plante spontanée et l'Artichaut qu'on y cultive, ont la même opinion. D'ailleurs l'Artichaut n'a pas été trouvé hors des jardins, et comme la région de la Méditerranée, patrie de tous les Cynara, a été explorée à fond, on peut affirmer qu'il n'existe nulle part spontané.

Le Cardon dans lequel il faut comprendre le C. horrida, de Sibthorp, est indigène à Madère et aux Camaries, dans les montagnes du Maroc près de Mogador, dans le midi et l'orient de la péninsule ibérique, le midi de la France, de l'Italie, de la Grèce et dans les îles de la mer Méditerranée, jusqu'à celle de Chypre 4. Munby 5 n'admet pas le C. Cardunculus comme spontané en Algérie, mais bien le Cynara humilis Linné, qui est considéré par quelques auteurs comme une variété.

Le Cardon cultivé varie beaucoup au point de vue de la division des feuilles, du nombre des épines et de la taille, diversités qui indiquent une ancienne culture. Les Romains mangeaient le réceptacle qui porte les fleurs, et les Italiens le mangent aussi sous le nom de girello. Les modernes cultivent le Cardon pour la partie charnue des feuilles, usage qui n'est pas encore introduit en Grèce 6.

L'Artichaut présente moins de variétés, ce qui appuie l'opinion qu'il est une dérivation obtenue du Cardon. Targioni 7, dans un excellent article sur cette plante, raconte que l'Artichaut a été apporté de Naples à Florence en 1466, et il prouve que les anciens, même Athénée, ne connaissaient pas l'Artichaut, mais seulement les Cardons sauvages et cultivés. Il faut citer cependant, comme indice d'ancienneté dans le nord de l'Afrique, la circonstance que les Berbères ont deux noms tout à fait particuliers pour les deux plantes : Addad pour le Cardon, Taga pour l'artichaut 8.

On croit que les Kactos, Kinara et Scolimos des Grecs et le

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1. Dodoens, Hist. plant., p. 724 ; Linné, Species, p. 1159 ; de Candolle, Prodromus, 6, p. 620.

2. Moris, Flora sardoa, 2, p. 61.

3. Willkomm et Lange, Prodr. fl. hisp., 2, p. 180.

4. Webb, Phyt. Canar., 3, sect. 2, p. 384 ; Ball, Spicilegium fl. marocc., p. 524 ; Willkomm et Lange, l. c. ; Bertoloni, fl. ital., 9 p. 86 ; Boissier, fl. orient., 3, p. 337 ; Unger et Kotschy, Inseln Cypern, p. 246.

5. Munby, Catal., ed. 2.

6. Heldreich, Nutzpflanzen Griechenland's, p. 27.

7. Targioni, Cenni storici, p. 52.

8. Dictionnaire français-berbère, publié par le gouvernement, 1 vol. in-8.


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Carduus des horticulteurs romains étaient le Cynara Cardunculus 1, quoique la description la plus détaillée, celle des Théophraste, soit assez confuse. « La plante, disait-il, croît en Sicile » ce qui est encore vrai; et il ajoutait : « non en Grèce. » Il est donc possible que les pieds observés de nos jours dans ce pays soient le résultat de naturalisations par le fait des cultures. D'après Athénée 2 le roi d'Egypte Ptolomée Euergètes, du iie siècle avant Jésus-Christ, avait trouvé en Lybie une grande quantité de Kinara sauvages, dont ses soldats avaient profité. Malgré la proximité de l'habitation naturelle de l'espèce je doute beaucoup que les anciens Egyptiens aient cultivé le Cardon ou l'artichaut. Pickering et Unger 3 ont cru le reconnaître dans quelques dessins des monuments ; mais les deux figures que Unger regarde comme le plus admissibles me paraissent extrêmement douteuses. D'ailleurs on ne connaît aucun nom hébreu, et les Juifs auraient probablement parlé de ce légume s'ils l'avaient vu en Egypte. L'extension de l'espèce doit s'être faite en Asie assez tardivement. Il y a un nom arabe, Hirschuff ou Kerschouff et un nom persan, Kunghir 4, mais pas de nom sanscrit, et les Hindous ont pris le nom persan Kunjir 5 ce qui montre l'époque tardive de l'introduction. Les auteurs chinois n'ont mentionné aucun Cynara 6. En Angleterre, la culture de l'Artichaut n'a été introduite qu'en 1548 7. L'un des faits les plus curieux dans l'histoire du Cynara Cardunculus est sa naturalisation, dans le siècle actuel, sur une vaste étendue des pampas de Buenos-Ayres, au point de gêner les communications 8. Il devient incommode également au Chili 9. On ne dit pas que l'Artichaut se naturalise de cette manière nulle part, ce qui est encore l'indice d'une origine artificielle.

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1. Theophrastes, Hist., 1. 6, c. 4 ; Pline, Hist., I. 19, c. 8 ; Lenz, Botanik der alten Griechen und Rœmer, p. 480.

2. Athénée, Deipn., 2, 84.

3. Pickering, Chronol. arrangement, p. 71 ; Unger, Pflanzen des alten Ægyptens, p. 46, fig. 27 et 28.

4. Ainslies, Mat. méd. ind., 1, p. 22. b. Piddington, Index.

6. Bretschneider, Study, etc., et Lettres de 1881.

7. Phillips, Companion to the kitchengarden, p. 22.

8. Aug. de Saint-Hilaire, Plantes remarq. du Brésil, Introd., p. 58 ; Darwin, Animals and plants under domestication, 2, p. 34.

9. Cl. Gay, Flora chilena, 4, p. 317.