Morelle (Cazin 1868)

De PlantUse Français
Révision de 11 mai 2013 à 14:18 par COGNEAUX Christian (discussion | contributions) (Page créée avec « {{Tournepage |titre=Cazin, ''Traité des plantes médicinales'', 1868 |titrepageprécédente=Monarde (Cazin 1868) |nomcourtpré... »)

(diff) ← Version précédente | Voir la version courante (diff) | Version suivante → (diff)
Aller à : navigation, rechercher
Monarde
Cazin, Traité des plantes médicinales, 1868
Moscatelline


Sommaire

[651]

Morelle noire

Voir la page [[]]

MORELLE. Solanum nigrum. L.

Solanwm officinarum. C. BAUH., TOURN.—Solanum hortense. DOD. Solanum. OFF.

- - Moreile noire, — morelle officinale, — mourelle, — morette, — crève-chien, — herbe . ;'; ■ . - aux magiciens, — raisin de loup, — herbe à gale, — herbe maure.

SOLANACÉES. Fam. nat. — PENTANDRIE MONOGYNIE. L.

La morelle (PI. XXVI), plante annuelle, est très-commune dans les lieux cultivés, les terrains incultes, les décombres, le long des murs, sur le bord des chemins, dans les jardins négligés, etc.

Description. — Racine longue, fibreuse, chevelue.— Tige anguleuse, herbacée, glabre, rameuse, longue d'environ 50 centimètres. — Feuilles d'un vert noirâtre, lisses, pétiolées, ovales-aiguës, dentées ou anguleuses à leurs bords. —Fleurs monopétales, blanches, disposées en petits corymbes pendants (juillet-août).— Calice à cinq décou- pures ovales, persistant. — Corolle blanche, petite, divisée en cinq segments aigus, souvent rabattus en dehors.— Cinq etamines de la longueur du style, à anthères oblongues. — Fruit : petites baies globuleuses, vertes d'abord, puis noires à l'époque de la maturité.

Parties usitées. — L'herbe entière, les baies.

Récolte. — Elle doit se faire à l'automne, lorsque les fruits sont mûrs ; la plante jouit alors de toute son énergie. Cette énergie augmente même après la dessiccation. On la fait sécher à l'étuve.

[Culture. — La morelle noire est très-commune dans les champs, sur les bords des chemins ; on la propage par semis pratiqués au printemps.]

Propriétés physiques et chimiques.— La morelle noire a une saveur herbacée'ef fade ; son odeur est légèrement fétide. Desfosses, de Besançon, a trouvé dans le suc exprimé des baies mûres une substance alcaloïde à laquelle il a donné, lé nom itsolanirie. (Voyez DOUCE-AMÈRE.)

PREPARATIONS PHARMACEUTIQUES ET DOSES.

A rtjTÉMEpR. — (N'a presque jamais été em- ployée.) Poudre pu extrait, 5 à 20 centigr.

î LtoÉWEon. — Décoction, 30 à 60 gr. par kilogramme d'eau, pour lotions, injections, ■bains. ,.r

Pulpe des feuilles, en cataplasme.

Extrait, k à 8 gr. par 30 gr. d'axonge, en

pommade. Huile (1 de feuilles sur 2 d'huile d'olive), 30 à

00 gr. pour Uniment.

La morelle est émolliente lorsqu'elle est jeune et pendant la floraison, narcotique lors de la maturité des baies. La plante avec ses baies est utile, a l'extérieur^ comme sédative dans les névralgies, le cancer, certaines leu- corrhées, la métrite chronique, quelques inflammations el éruptions cuta- nées douloureuses..

Je n!ai jamais administré la morelle à l'intérieur. Les auteurs sont si peu daccordsurles qualités délétères de cette plante, que de nouveaux essais pourraient seuls éclairer le praticien. Un état de stupeur, le coma, et une violente, douleur épigastrique avec fièvre ont été observés par Alibert chez wi enfant de huit ans qui avait avalé des fruits de morelle. Wepfer parle de ras enfants chez qui les fruits de cette solanée ont occasionné lé délire, la cardialgieet la distorsion des membres.

h f!?, es exPériences faites par Orfila, on voit plusieurs chiens périr au am !nyiron quarante-huit heures après avoir pris 24 à 28 gr. d'extrait

  • ux de morelle; 8 gr. du même extrait, dissous dans 6 gr. d'eau et appli-

ïri j e tissu cellulaire de la cuisse d'un chien, le firent mourir à peu m dans le même espace de temps.—Un berger (en août 1826) ayant mené mnlfrfl moutons dans un champ rempli de morelle, vit une effrayante de ni sur son troupeau, dont il perdit les deux tiers dans l'espace

tiee? t uesJ°urs- Ils offraient divers symptômes nerveux, tels que ver-

6es> etc., et, après la mort, une violente phlogose des voies digestives et


[652]

de la vessie, qui était de plus fortement contractée. Les saignées, les put. gatifs, les émollients échouèrent. Le berger en sauva quelques-uns en leur" faisant boire du lait en abondance (1).

On oppose à ces faits des observations et des expériences qui tendent à représenter la morelle comme dépouillée de toute espèce de qualités narco- tiques et délétères. Ainsi Spielmann a avalé en infusion 45 centigr. de cette plante sèche sans en éprouver aucun effet : il a vu donner à un épileptîanc jusqu'à 8 gr. de son extrait sans qu'il en fût résulté le moindre danger,

L'infusion de cette plante, bue par Guérin (2), ne produisit aucun effet remarquable. Le suc de l'herbe, donné à la dose de 12 gr. à des malades ne parut pas en produire davantage ; 8 gr. de suc des baies, administrés à trois convalescents, ne firent qu'augmenter les urines. Dunal, qui a fait prendre à différents animaux jusqu'à cent baies de morelle noire, et qui lui-même en a pris un nombre assez considérable sans en éprouver le moindre incon- vénient, pense que dans la plupart des empoisonnements attribués aux baies de cette plante, les accidents ont été produits par les fruits de la belladone, qu'on désigne aussi quelquefois sous le nom de morelle.

Cette différence dans les effets de la morelle sur l'économie vient, sans doute, de ce que les expérimentateurs ont employé la poudre ou l'extrait préparés avec la plante encore jeune, en fleur, ou avec des fruits non mûrs, On sait aujourd'hui qu'elle contient un principe actif (solanine) après si complète fructification, en assez grande quantité pour causer les accidenls les plus graves, étant administrée à l'intérieur à dose toxique.

Quoi qu'il en soit, la morelle, autrefois employée à l'intérieur contrela cardialgie, les tranchées et diverses affections nerveuses, l'ischurie, la stran- gurie, les douleurs néphrétiques, n'est plus mise en usage qu'à l'extérieur. On applique les feuilles récentes pilées sur les ulcères douloureux, le cancer, les fissures du mamelon, les hémorrhoïdes, etc. La décoction sert à laver les parties enflammées, tuméfiées, irritées, douloureuses; on en fait desfo- mentations, des lotions, on en baigne les parties malades, on en donnée» injection, etc. On s'en sert aussi en décoction ou en cataplasme sur les fu- roncles, le panaris, le phlegmon, le chancre vénérien, les brûlures, les con- tusions^ la strangurie, et, suivant Alibert, sur les dartres vives et rongeantes. Si, dans l'érysipèle qui survient aux plaies, il y a dureté, on broie, dit Celse, des feuilles de solanum, on les incorpore Sans l'axonge de porc, on étend ce mélange sur un linge, et on l'applique sur le mal. Borie (3) et parvenu à calmer entièrement un tic douloureux de la face qui avait résisté à tous les autres moyens, par l'application de cataplasmes préparés avec la morelle.

Dunal a remarqué que le suc de la morelle noire, appliqué sur les yens, occasionnait une légère dilatation de la pupille, et rendait, pendant plu- sieurs heures, l'oeil insensible à l'impression d'une vive lumière. Quoique cet effet soit moins prononcé que celui qui est produit par la belladone, ou peut, à défaut de cette dernière, se servir de la morelle pour prépare' l'organe à l'opération de la cataracte. ,

Les anciens employaient à l'extérieur, dans les cancers, une pomma J faite avec le suc de morelle et d'axonge battus et mêlés dans un mortier d plomb. Percy a renouvelé cette méthode pour les feuilles de bardane. Je pense que cette trituration végéto-miriérale peut être avantageuse. J'ai w quefois mêlé le suc de morelle avec le jaune d'oeuf comme tonique anodin. J'ai aussi employé, faute d'autres moyens, la décoction et quelquefois le su tiède de morelle sur les hémorrhoïdes douloureuses. Je me suis bien trouvt,

(1) Journal de chimie médicale, de pharmacie et de toxicologie, 1827, p. 542.

(2) De Veget. venenat. Alsatioe, p. 66.

(3) Des maladies nerveuses. Paris, 1830, p. 215.


[653]

B0Ur calmer les douleurs du rhumatisme articulaire aigu, de la morelle, noire broyée, et appliquée tiède sur la partie malade. Ce calmant, qu'il est toujours si facile de se procurer lorsque la plante est en pleine vigueur, m'a réussi. Le médecin est heureux de trouver, dans l'isolement des hameaux, les plantes que la Providence lui offre si généreusement pour soulager le pauvre qui réclame ses secours.

SOLANINE. — Voyez l'article DOUCE AMÈRE.