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Laurier (Cazin 1868)

Lathrée
Cazin, Traité des plantes médicinales, 1868
Laurier-cerise


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Nom accepté : Laurus nobilis


LAURIER D'APOLLON. Laurus nobilis. L.

Laurus vulgaris. C. Bauh., Tourn.

Laurier ordinaire, — laurier franc, — laurier-sauce.

LAURACÉES. Fam. nat. — ENNÉANDRIE MONOGYNIE. L.


Le laurier, originaire d'Afrique, de la Grèce, naturalisé en Espagne, en Italie, et même dans les départements du midi de la France, est cultivé dans les jardins. Cet arbre, consacré chez les Grecs au dieu de la poésie et des arts, était aussi, destiné, comme il l'est de nos jours, à ceindre le front des vainqueurs.

Description. — Racine épaisse, oblique, inégale. — Tige forte, ligneuse, atteignant 6 à 8 mètres et plus, à rameaux souples, droits, verdàtres, serrés contre le tronc. - Feuilles alternes, dures, coriaces, glabres à leurs deux faces, toujours vertes, un peu ondulées sur leur bord. — Fleurs dioïques, petites, d'un blanc jaunâtre, disposées dans les aisselles des feuilles en petits faisceaux munis à leur base de quatre petites bractées ovales, caduques. — Calice glabre à quatre découpures ovales, profondes. Dans les fleurs mâles, douze étamines sans pistil ; dans les fleurs femelles, un style épais et court, un ovaire. — Fruits : drupes ovales, d'un bleu noirâtre, un peu charnus et renfermant un noyau monosperme.

Parties usitées. — Les feuilles et les fruits.

Récolte. — Ne présente rien de particulier.

[Culture. — Le laurier se multiplie de graines semées en terrines, sur couches chaudes ; on rentre en hiver en orangerie ou sous châssis, ou bien on le propage de marcottes, par incisions, par rejetons ou de boutures difficiles à prendre ; pleine terre, sol léger, exposition abritée.]

Propriétés physiques et chimiques. — Les feuilles et les baies de laurier ont une odeur aromatique, une saveur chaude, un peu amère et acre, provoquant par la mastication une abondante sécrétion de salive. Les baies ont été analysées par Bonastre, qui y a trouvé : huile volatile, laurine, laurane, huile grasse de couleur verte, cire, huile liquide, résine, fécule, extrait gommeux, bassorine, substance acide, sucre incristallisable, albumine.

L'huile exprimée des baies de laurier est d'une grande densité, d'une couleur verte, d'une odeur forte et d'une saveur amère ; elle est mêlée d'une petite quantité d'huile volatile (1/90me environ).

La laurine ou laurostéarine (C27 H25 O4), qui est la partie solide de l'huile de laurier, constitue, suivant Morson, une matière grasse particulière. Elle est blanche, cristalline, formant des aiguil1es d'un éclat soyeux. Elle fond vers 45 degrés. L'alcool froid en dissout à peine ; elle se dissout bien dans l'alcool concentré et bouillant ; l'éther en dissout beaucoup. - La laurane (cristallisable, très-âcre, d'une forte odeur de laurier) est sans importance sous le rapport médical.


PRÉPARATIONS PHARMACEUTIQUES ET DOSES.


A L'INTÉRIEUR. - Infusion des feuilles, 10 à 20 gr. par kilogramme d'eau.
Infusion des baies concassées, 4 à 18 gr. par kilogramme d'eau.
Poudre des feuilles (rarememt) de 2 à 4 gr., en pilules ou délayée dans un liquide.

Huile essentielle de feuilles, de 1 à 12 gouttes, en potion, pilules, oléo-saccharum.
Poudre des baies, 23 centigr. à 1 gr. en pilules, potion, électuaire, etc.
A L'EXTÉRIEUR. — Décoction des feuilles pour bains, fomentation.


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Décoction vineuse pour fumigations.
Huile exprimée des baies, Q.S. pour frictions.
Onguent (1 partie de feuilles récentes contuses et de baies sèches sur 2 parties d'axonge), en frictions, embrocations.
Pour obtenir l'huile de laurier, réduisez les baies sèches du laurier en poudre, exposez-les à l'action de la vapeur d'eau assez longtemps pour les bien pénétrer ; mettez promptement à la presse dans une toile de coutil, entre des plaques métalliques chauffées ; exprimez fortement ; filtrez l'huile à chaud, si la température de l'atmosphère est basse. Les baies fournissent à peine le cinquième de leur poids d'huile. Les pharmaciens du Midi peuvent extraire ce produit des baies récentes, qu'il leur est facile de se procurer. — « Toutes les pharmacopées, dit Soubeiran, prescrivent de se servir de baies fraîches, de les faire bouillir dans l'eau et de recueillir l'huile qui vient nager à la surface. Ménigault a reconnu que,

par cette méthode, on ne pouvait obtenir l'huile des baies fraîches, et je me suis assuré à plusieurs reprises qu'il en était de même avec les baies sèches. (On vend quelquefois pour cette huile un mélange d'axonge, de curcuma, d'indigo, avec addition d'un peu d'huile de laurier véritable. Ce produit, ainsi obtenu, communique à l'eau une teinte bien verdâtre.) Dans les pharmacies, on substitue souvent à cette huile l'onguent de laurier, qui n'est pas aussi efficace. Cette fraude est facile à reconnaître par la solubilité de cette dernière préparation dans l'alcool froid et l'éther — L'onguent de laurier est le produit de la macération à une douce chaleur d'une partie en poids de feuilles de laurier récente et contuses, et d'une égale quantité de baies de laurier sèches concassées, dans deux parties d'axonge.

Les baies de laurier entrent dans l'eau thériacale, le baume de Fioraventi, l'esprit carminatif de Sylvius, etc.


Toutes les parties du laurier sont puissamment excitantes. Les propriétés stomachiques, carminatives, expectorantes, diurétiques, sudorificjues, antispasmodiques, emménagogues de ses feuilles, ne peuvent se réaliser que dans les cas où les organes qui en reçoivent l'action sont dans un état d'atonie,de relâchement plus ou moins prononcé. C'est ainsi qu'elles conviennent dans l'inappétence, les flatuosités et la difficulté des digestions par débilité de l'estomac ; dans le catarrhe pulmonaire chronique, dans l'asthme humide, la bronchorrée, la chlorose, l'aménorrhée avec atonie, la paralysie, l'hystérie, l'hypocondrie, sous l'influence des mêmes conditions. Elles sont donc manifestement contre-indiquées toutes les fois qu'il y a angioténie, orgasme ou inflammation.

Les fruits, qu'on emploie toujours à l'état sec, jouissent toujours des mêmes propriétés que les feuilles, mais à un degré plus marqué. Leur ingestion à une certaine dose peut, à cause de la vive excitation qu'elle détermine sur l'estomac, provoquer le vomissement, ce qui leur a fait accorder le titre de vomitif par les anciens.

On administrait autrefois les baies de laurier en poudre clans la bière chaude pour exciter la sueur. On s'en servait aussi de la même manière contre les hydropisies. Horstius recommande, pour provoquer les règles, le mélange à parties égales de poudre de baies de laurier et de genièvre dans du vin. Ce remède était aussi administré dans les hydropisies, ainsi que la décoction aqueuse des mêmes fruits. La tisane sudorifique suivante, dont j'ai trouvé la formule dans un vieux manuscrit, peut être employée avec avantage dans les affections goutteuses et rhumatismales chroniques : bois de laurier et bois de buis râpés, de chaque 30 gr. ; faites infuser pendant vingt-quatre heures dans eau 1 litre 1/2 ; décoctez ensuite jusqu à réduction de 1 litre, ajoutez à la fin un peu d'écorce de citron : doses, 3 verres par jour.

L'huile essentielle de laurier, très-âcre, se donne comme carminative et stimulante ; mais on ne s'en sert guère qu'à l'extérieur, en liniment, comme calmante, tonique et résolutive, dans le rhumatisme chronique, la paralysie, les engorgements indolents des articulations, les infiltrations, etc. L'huile exprimée des baies est employée à l'extérieur dans les mêmes cas. Dans les pharmacies on lui substitue souvent l'onguent de laurier. C'est ce dernier onguent dont on fait un si grand usage dans la médecine vétérinaire. La décoction des baies et des feuilles de laurier est tonique, détersive, résolutive. La poudre des feuilles, saupoudrée sur les ulcères ato-


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niques et sordides, les déterge en peu de temps. Ces feuilles, qui répandent une odeur suave lorsqu'on les brûle, servent à préparer des fumigations qui calment les douleurs rhumatismales.

Bodart a proposé de substituer le laurier à la cannelle (laurus cinnamonum) et au laurier cassie ou cassie ligneuse, cannelle du Malabar (laurus cassia, cassia aromatica, cassia syrinx, xylocassia, cassia lignea). « Pourquoi faut-il, dit Gilibert, que les praticiens négligent un arbre qu'ils ont sous la main, pour employer avec mystère les congénères des Indes ?... » Cet auteur présume que ce qui a fait négliger le laurier, c'est que quelques anciens pharmacologistes ont avancé que ses baies faisaient avorter. On faisait boire l'infusion vineuse de cinq ou six baies de laurier à une femme pour savoir si elle était enceinte. Si elle vomissait, on prononçait affirmativement ; on déclarait le contraire quand le vomissement n'avait pas lieu. On sait aujourd'hui à quoi s'en tenir sur cette épreuve, et l'on est bien convaincu aussi que jamais les baies de laurier, même à haute dose, n'ont produit l'avortement.