Les témoins (cookies) nous aident à fournir nos services. En utilisant nos services, vous acceptez notre utilisation des témoins.

Bourrache (Cazin 1868)

Bourdaine
Cazin, Traité des plantes médicinales, 1868
Bourse à pasteur
PLANCHE IX : 1. Bétoine. 2. Bistorte. 3. Botrys. 4. Bouillon blanc. 5. Bourrache.


[210]

Nom accepté : Borago officinalis


BOURRACHE. Borrago officinalis. L.

Borrago floribus cæruleis. J. Bauh., T. — Buglossum latifolium. C. Bauh.

Bourrache officinale, — bourrache à fleurs bleues, — buglose à larges feuilles.

BORRAGINÉES. — BORRAGÉES. Fam. nat. — Pentandrie Monogynie. L.


La bourrache (Pl. IX), plante annuelle, originaire du Levant, croît naturellement dans les lieux cultivés et surlout dans les jardins où elle se propage avec une extrême facilité. Elle est même devenue sauvage dans plusieurs provinces de France. Les abeilles la recherchent avidement. On sert ses jolies fleurs sur la salade comme ornement, avec celles de la capucine.

Description. — Racine de la grosseur du doigt environ, longue, tendre, blanchâtre en dedans, noire en dehors, garnie de fibres. — Tige de la hauteur de 30 à 70 centimètres, herbacée, droite, succulente, cylindrique, creuse, rameuse, un peu ailée, supérieurement couverte de poils rudes et courts. — Feuilles radicales couchées sur la terre, grandes, pétiolées, ovales ; les caulinaires plus étroites, sessiles et même un peu décurrentes, amplexicaules ; les unes et les autres alternes, ridées, vertes, hérissées de poils comme la tige. — Fleurs de couleur purpurine d'abord, puis passant au bleu foncé, quelquefois blanches, longuement pédonculées, penchées, disposées en panicule terminale (mai-juin-juillet). — Calice monophylle, cinq découpures oblongues, persistantes. — Corolle monopétale, rotacée, ayant la gorge fermée par cinq écailles obtuses, échancrées, et son limbe partagé en cinq divisions pointues, ouvertes en étoile. — Cinq étamines conniventes, dont les filaments soutiennent les anthères allongées, noires, coniques, acuminées, formant une pyramide au milieu de la fleur. — Ovaire supérieur à quatre lobes, du centre desquels s'élève un style filiforme, terminé par un stigmate simple. — Fruit consistant en quatre petits akènes (tétrakène), graines noirâtres dans leur maturité, ridées, ovoïdes, osseuses.

Parties usitées. — Les feuilles et les fruits.

[Culture.— La bourrache croît dans tous les terrains, mais elle préfère les lieux exposés au soleil ; on la propage par graines semées au printemps, on transplante les jeunes plantes en mai ou juin ; elle se ressème et se propage d'elle-même.]

Récolte. — Les fleurs se récoltent vers le milieu de l'été. Après les avoir mondées, on les porte au séchoir, où il faut les bien soigner. La plante entière se cueille pendant toute la belle saison ; on ne doit choisir que celle dont les tiges, garnies de fleurs, commencent à monter, parce qu'elle est plus riche en suc que la dessiccation y conserve.

Propriétés physiques et chimiques. — La bourrache a une odeur légèrement vineuse et une saveur herbacée et mucilagineuse. Elle contient : substance mucilagineuse, 18 ; matière azotée, soluble dans l'eau et insoluble dans l'alcool, 15 ; acétate et autres sels végétaux de potasse, 12 ; sels de chaux, 05 ; et nitrate de potasse, 05. L'eau dissout tous ses principes actifs.

Toute la plante contient un suc visqueux et fade. Il est si visqueux, si épais, que souvent, pour l'obtenir par expression, on est obligé d'ajouter de l'eau. Ce suc, déféqué par le blanc d'œuf et évaporé en consistance de sirop, donne des cristaux de nitre au refroidissement. La décoction des feuilles, réduite à consistance de sirop au bout de quelques jours, présente aussi une quantité de ces cristaux. La chaleur sépare du suc une substance muqueuse qui paraît avoir de l'analogie avec l'albumine. On prépare avec le suc épaissi ou avec la plante desséchée un extrait qui, délayé dans l'eau distillée, permet de reproduire en tout temps du suc de bourrache. — L'art tinctorial n'a rien obtenu de la brillante couleur bleue des fleurs de la bourrache.


[211]

[A différentes périodes de la végétation, la bourrache présente des compositions différentes qui correspondent à des propriétés spéciales et variées. Très-jeune et lorsqu'elle croît dans les lieux un peu ombragés et humides, elle est très-mucilagineuse et alors très-émolliente ; plus tard, lorsqu'elle est en fleurs, il se développe un principe extractif abondant, et elle est alors regardée comme apéritive, dépurative et sudorifique. Enfin, lorsqu'elle a passé fleur et à l'époque où les fruits mûrissent, et lorsque surtout la plante croît dans des terrains secs, elle est riche en nitrate de potasse, et est alors employée avec raison comme diurétique.]


PRÉPARATIONS PHARMACEUTIQUES ET DOSES.


A L'INTÉRIEUR. — Infusion des fleurs, 20 à 60 gr. par kilogramme d'eau.
Décoction des feuilles et des jeunes tiges. — Mêmes doses.
Suc exprimé, 50 à 100 gr.

Extrait, 2 à 8 gr. (inusité).
Eau distillée, 30 à 100 gr. en potion (inerte).
A L'EXTÉRIEUR. — Décoction de toute la plante, 50 à 100 gr. par kilogramme d'eau, pour fomentations, fumigations, etc.


Les feuilles de bourrache entrent dans le sirop d'érysimum composé, dans le sirop de pomme composé.

La bourrache est très-employée comme émolliente, diurétique et sudorifique. Elle convient dans les fièvres inflammatoires, bilieuses, muqueuses, le catarrhe pulmonaire, la pneumonie, le rhumatisme aigu, les affections éruptives (rougeole, variole, scarlatine, miliaire).

On a trop exalté et trop dédaigné les vertus cle la bourrache. J'ai eu fréquemment occasion de l'employer à la campagne sous forme de tisane miellée, et je m'en suis toujours très-bien trouvé. Cette boisson tempère la chaleur fébrile, diminue la plasticité du sang, facilite le cours des urines et produit la diaphorèse sans excitation. Gilibert assure que le suc de bourrache et son sirop ont été fort utiles, en 1785, pour le traitement des pneumonies inflammatoires qui ont été très-communes à Lyon. « Après les évacuations sanguines que l'état inflammatoire rend indispensables, peut-être vaudrait-il mieux, dit Roques, s’en tenir à ce genre de remèdes simples, que de faire une médecine plus compliquée, plus riche, plus savante. »

C'est donc à tort que Murray, qui admet souvent avec une sorte de complaisance des plantes moins actives que la bourrache, résume son opinion sur celle-ci dans ces quatre mots : In seriâ praxi eviluit, qui signifient que les praticiens sérieux ne comptent plus sur les propriétés médicales de la bourrache,

Les anciens attribuaient à la fleur insipide et presque inodore de la bourrache une vertu stimulante et exhilarante qui lui a valu sa place dans leurs quatre fleurs cordiales. Cette vertu imaginaire a été consacrée par ce dicton : Dicit borrago : gaudia cordis ago (la bourrache dit : Je mets le cœur en liesse). Le mot latin borago ou borrago paraît être une altération des mots : corrago, corago, cor ago. « Les anciens, dit Roques, croyaient que la bourrache pouvait tempérer l’atrabile, dissiper la mélancolie de certains hypocondriaques tourmentés par des spectres et des fantômes : on s'est moqué des anciens ; mais est-ce avec raison ? Connaissons-nous les autres moyens qu'ils employaient en même temps ? Qu'on purge doucement ces malades, qu'on leur applique quelques sangsues à l'anus ; s'ils éprouvent des congestions hémorrhoïdales, qu'on leur prescrive un doux exercice, une alimentation simple, tempérante, et qu'on leur donne tous les matins quelques verres d'une décoction de bourrache édulcorée avec du miel : ce traitement aura peut-être du succès, et l'on sera plus indulgent pour les anciens, Ils n'avaient pas tous nos médicaments, mais ils avaient bien autant de philosophie que nous. »