Afioun (Ibn al-Baytar)
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Nom accepté : Papaver somniferum
- C’est le suc laiteux du pavot noir.
- ET-TEMIMY. Il n’est réellement connu ni en Orient ni en Occident, mais seulement en Egypte et particulièrement dans le Saïd, au lieu appelé Boutidj būtīǧ. C’est de là qu’il provient et qu’on l’expédie dans toutes les autres contrées.
- Dioscorides, IV, 65. La gomme de pavot noir, aussi bien que le suc obtenu par expression, est plus réfrigérante que la graine; elle est encrassante et dessiccative. Prise à petite dose, comme une graine d’orobe, elle calme les douleurs, endort et hâte la coction. Elle est utile contre la toux chronique. A haute dose, elle provoque un sommeil profond, pareil à celui de la léthargie, puis elle tue. Associée à l’huile de rose et employée en frictions, elle calme la céphalalgie. Associée au safran, à la myrrhe et à l’huile de rose, et instillée dans l’oreille, elle en calme les douleurs. Mélangé avec du jaune d’œuf et du safran, l’opium convient (contre l’inflammation de l’œil; avec du vinaigre,) contre l’érysipèle et les blessures. Associé à du lait de femme et du safran, il convient contre la goutte. Appliqué sur le siège en suppositoire, il provoque le sommeil. Le meilleur opium est celui qui est dense, lourd, gravéolent, amer, qui se dissout promptement dans l’eau, qui est blanc, lisse, ni grossier ni grumelé, qui ne se prend pas dans l’eau comme le fait la cire, qui se fond quand on l’expose au soleil, qui, approché d’une lampe et allumé, s’enflamme sans répandre de fumée, qui conserve encore une odeur vive une fois éteint. On le sophistique par l’addition de suc de glaucium et de feuilles de laitue sauvage et de gomme. On reconnaît qu’il est sophistiqué par le glaucium à ce que, dissous dans l’eau, il a la couleur du safran (l’arabe dit l’odeur). Avec le suc de laitue sauvage, il est grossier au toucher, et, dissous dans l’eau, il a une odeur peu prononcée. Avec de la gomme, il est sans force et d’une nuance pâle. Quelques-uns ont eu l’audace de le sophistiquer avec de la graisse. Pour l’employer en collyre, on le fait griller sur un test jusqu’à ce qu’il prenne la couleur rouge du rubis. Diagoras Dīāġūras rapporte qu’Erasistrate (dans le texte grec c’est Erasistrate qui cite Diagoras) ne voulait pas l’employer contre l’ophtalmie ni contre les affections de l’oreille parce qu’il affaiblit la vue et provoque le coma. Andrée prétend même qu’à moins de le mélanger il aveugle ceux qui l’emploient en collyre. Mnésidême conseille exclusivement de le faire flairer comme soporifique et rejette tous ses autres emplois. Je pense qu’ils se trompent, ayant acquis par l’expérience la preuve des propriétés que nous avons attribuées à ce médicament. Voici la manière dont se prépare l’opium : on prend les feuilles de l’opium, on les triture, on les soumet au pressoir, on malaxe dans un mortier le suc obtenu, puis on le réduit en pastilles. Cette sorte est appelée meconion mīqūnīūn; elle est plus faible que l’opium. Quant à la gomme d’opium, voici la manière de l’extraire : une fois la rosée tombée sur la plante évaporée, on fait, avec un couteau, une incision autour de la tête rayonnée du pavot, mais légère et non pénétrante; puis on fait à partir de cette incision d’autres incisions également non pénétrantes, dirigées en droite ligne sur les flancs du pavot; on recueille le suc avec le doigt et on le dépose dans un coquillage. On suspend quelque temps l’opération pour la recommencer dans la journée. Il reparaît encore de la gomme le lendemain. Une fois le tout recueilli, on triture dans un mortier et l’on prépare des tablettes que l’on conserve.
- AVICENNE. L’opium dessèche les plaies. Pris à l’intérieur, il abolit les facultés perceptives et intellectuelles. Pris seul et sans castoréum, il affaiblit et abolit les facultés digestives.
- PROPRIETES DE MEHRARIS ḫawāṣ Mehrārīs. L’opium dissous dans du vinaigre et employé en frictions sur le museau d’un âne le fait larmoyer, en même temps qu’il se met à braire. — RAZES. Il tue à la dose de deux drachmes, et même à moins. Son usage à l’intérieur entraine du tétanos kazāz et du coma. Parfois il survient par tout le corps une violente démangeaison, l’haleine sent l’opium, et même il peut en être ainsi de tout le corps si on le frotte. Parfois les yeux se cavent, la langue s’embarrasse, les ongles pâlissent, une sueur froide apparaît, puis des convulsions aux derniers moments de l’existence. Le signe le plus caractéristique est le coma et l’exhalaison par le corps d’une odeur opiacée.
- DIOSCORIDES. Voici ce que l’on administre avec succès (contre l’ingestion de l’opium). D’abord on fait vomir avec de l’huile, puis on administre un lavement irritant; on donne ensuite de l’oxymel avec du sel, ou bien du vin miellé avec de l’huile de rose chaude. On donne aussi une potion de vin doux avec de l’absinthe, du cinnamome avec du vinaigre chauffé; du nitre avec de l’eau et de l’origan (avec des cendres), de la graine de rue sauvage avec du poivre, du vin et du panais, du poivre avec du castoréum, de l’oxymel, de la sarriette, de l’origan ṣacatar, cuits avec du vin. Il faut ensuite exciter le malade en lui mettant sous le nez des odeurs, lui faire prendre un bain chaud, fomenter le corps contre l’éruption violente qui s’y est déclarée, puis, au sortir du bain, administrer du bouillon gras avec du vin et du moût. — AUTRE. On le remplace par trois fois de graines de jusquiame et aussi par la graine, l’écorce de la racine et l’extrait de mandragore.
Quelques manuscrits portent Soyiout à la place de Boutidj.