Boehmeria nivea (PROTA)
Introduction |
Importance générale | |
Répartition en Afrique | |
Répartition mondiale | |
Légume | |
Médicinal | |
Fourrage | |
Fibre | |
Sécurité alimentaire | |
Boehmeria nivea (L.) Gaudich.
- Protologue: Voy. Uranie, Bot. : 499 (1830).
- Famille: Urticaceae
- Nombre de chromosomes: 2n = 24, 28, 42, 56
Synonymes
- Boehmeria tenacissima Gaudich. (1830).
Noms vernaculaires
- Ramie, ramie de Chine (Fr).
- Ramie, rhea, China grass (En).
- Rami, urtiga branca (Po).
Origine et répartition géographique
La ramie est probablement originaire de Chine occidentale et centrale et est cultivée en Chine depuis l’antiquité. La culture s’est étendue de la Chine à d’autres pays asiatiques. Les plantes et les produits de la ramie ont été importés en Europe au XVIIIe siècle et des plantations expérimentales se sont créées dans de nombreux pays tropicaux, subtropicaux et tempérés. Avec l’arrivée des fibres synthétiques, cependant, la culture de la ramie s’est effondrée, bien qu’elle soit encore cultivée dans de nombreux pays tropicaux et subtropicaux. En Afrique tropicale, elle a été cultivée à petite échelle en Sierra Leone, au Cameroun, en Guinée équatoriale, au Gabon, en R.D. du Congo, au Kenya, en Ouganda, en Tanzanie, au Mozambique, à Madagascar et aux Mascareignes, mais les résultats n’ont pas été positifs, et sa répartition actuelle en Afrique tropicale n’est pas claire. La ramie s’est parfois échappée des cultures et s’est naturalisée.
Usages
La fibre de la tige de ramie est une des plus anciennes fibres textiles, utilisée depuis la préhistoire, en particulier en Chine, en Inde et en Indonésie. En Chine, elle a également été utilisée pour fabriquer du papier pendant de nombreux siècles. La fibre peut être filée et le tissu (“toile de ramie” ou “lin de Chine”) est utilisé pour faire des vêtements, des nappes, des serviettes de table, des draps, des taies d’oreillers, des serviettes de bain, des mouchoirs, des nattes, des voiles, etc. La fibre de ramie est transformée en de nombreux autres produits, dont des toiles, des moustiquaires, des boyaux d’incendie, du rembourrage, du tissu filtrant, des manchons à incandescence, des lacets de chaussure, des garnitures navales et des canevas pour tapis. La ramie est souvent mélangée à du polyester, de la laine, de la soie ou du coton. Au Brésil, la ramie non dégommée sert de substitut au jute, par exemple dans la production de sacs. Les résidus restant après l’extraction de la fibre, ainsi que les fibres courtes, sont utilisés pour la production de papier de grande qualité, par exemple pour les billets de banque et le papier à cigarettes. Les déchets de transformation sont également mélangés à du coton ou de la rayonne et transformés en tissus de classe inférieure. La fibre de ramie sert par endroits pour la production de cordes, de ficelle, de lignes et de filets de pêche, de fil à coudre et de tissus.
La ramie peut être donnée au bétail, aux moutons, aux chèvres, aux porcs, aux lapins et aux volailles. Les principales parties utilisées comme fourrage sont les feuilles et les sommets de tige. La ramie peut également être cultivée spécifiquement pour faire du fourrage, auquel cas elle est récoltée avant que les fibres se soient complètement formées. Elle peut être donnée fraîche, séchée en foin, ensilée avec de la mélasse ou comme farine déshydratée. Les feuilles et les sommités sont également utilisés comme engrais vert. Au Vietnam, on utilise les feuilles de ramie dans la préparation d’un gâteau considéré comme une friandise.
En médecine traditionnelle en R.D. du Congo, la plante entière est broyée et trempée dans de l’eau pour obtenir une macération avec laquelle on frictionne le corps pour traiter les rhumatismes, la lèpre, les maladies de la peau et les blessures, qu’on instille dans les yeux pour traiter les affections oculaires, dans le nez contre les rhinites, et qui est absorbée comme boisson pour traiter la diarrhée et l’helminthiase. En Malaisie, les feuilles de ramie sont utilisées en cataplasme sur les furoncles et contre les flatulences ; la décoction de racines et de feuilles se prend comme tonique en cas de dysenterie et la racine s’applique sur les ulcères. En Indochine, les racines et les feuilles sont considérées comme rafraîchissantes, diurétiques, émollientes et résolutives, et sont prescrites pour de nombreux troubles dont la dysurie, les inflammations urogénitales et le prolapsus de l’utérus. En Chine et à Taïwan, on utilise la plante à des fins diurétiques, antipyrétiques et hépatoprotectrices.
Production et commerce international
Selon des estimations de la FAO, la production mondiale de fibre de ramie dans la période 2004–2008 était d’environ 277 000 t par an, sur une surface d’environ 132 000 ha, dont plus de 98% en Chine (272 000 t sur 129 000 ha). Durant cette période, le Laos a produit 2100 t par an, les Philippines 1600 t et le Brésil 1100 t. La majorité de la ramie produite est utilisée dans les pays producteurs et seulement une petite portion passe sur le marché international (en moyenne environ 1100 t par an pour la période 2004–2008). Les principaux exportateurs pendant cette période étaient la Chine (environ 900 t par an), les Philippines (70 t/an) et l’Indonésie (50 t/an). Le principal importateur est le Japon (800 t par an en 2004–2008). La ramie ayant la meilleure qualité disponible sur le marché mondial est produite aux Philippines, principalement grâce à des équipements de transformation haut-de-gamme. De petites quantités de rubans non dégommés ont été exportées du Kenya vers le Royaume-Uni juste après la Seconde Guerre mondiale.
Propriétés
Les brins de fibres de la ramie du commerce sont composés de cellules uniques de (5–)40–250(–620) mm de long et de (10–)25–60(–126) μm de large. Elles sont aplaties en coupe transversale, de forme irrégulière, ont une paroi épaisse et un lumen bien défini, et s’arrondissent aux extrémités. Les parois des fibres montrent des striures longitudinales marquées. La fibre contient 69–91% d’α-cellulose, 5–13% d’hémicelluloses, 1% de lignine, 2% de pectine et 2–4% de cendres. Les fibres extraites des tiges de ramie par décorticage contiennent une importante quantité de gommes, et des méthodes spéciales doivent être utilisées pour les séparer. Les gommes sont principalement composées d’hémicelluloses et de pectine, qui sont relativement insolubles dans l’eau, mais relativement solubles dans une solution alcaline. Des fibres correctement dégommées contiennent 96–98% d’α-cellulose.
La fibre de ramie est blanche, lustrée, résistante et durable. La résistance à la traction, la capacité d’absorption, les propriétés de séchage et les qualités de teinture des fibres de ramie sont souvent signalées comme supérieures à celles du coton et du lin, mais les valeurs mesurées varient beaucoup et, en ce qui concerne ces caractéristiques, la ramie est relativement similaire au coton et au lin. Cependant, l’humidification provoque effectivement un retrait moins important chez la ramie que pour d’autres fibres, et un mélange de laine et de ramie a un retrait bien moindre que la laine pure. Par contre, la ramie n’a pas l’élasticité de la laine et de la soie ni la souplesse du coton, ce qui rend les tissus de ramie relativement rêches, avec une tendance à se chiffonner et à se casser lorsque ils sont pliés. La résistance à la traction, l’allongement à la rupture et le module de Young de la fibre de ramie sont de 400–1270 N/mm², de 3,6–4,2% et de 23 000–128 000 N/mm², respectivement. Grâce à sa résistance aux bactéries et sa résistance renforcée lorsqu’elle est mouillée, la fibre de ramie est particulièrement appropriée pour les applications navales.
La valeur nutritionnelle de la ramie comme fourrage est élevée. Par 100 g de matière sèche, les parties aériennes entières contiennent : protéines brutes 11–28 g, fibres brutes 9–29 g, cendres 15–17 g, Ca 3,7–4,5 g et P 0,13–0,31 g. Les feuilles contiennent environ 25 g de protéines par 100 g de matière sèche, alors que les résidus totaux de la plante après extraction des fibres en contiennent environ 13 g. La farine à base de feuilles et de sommités de ramie contient 21–22% de protéines brutes.
Des extraits aqueux de racine ont montré in vivo une activité hépatoprotectrice et anti-inflammatoire chez les rats, des effets antioxydants in vitro sur un broyat de foie de rat, et une activité de piégeage des radicaux libres. Des extraits de racine à l’éthanol ont montré in vitro et in vivo une activité contre le virus de l’hépatite B. Des extraits méthanoliques de racine ont montré in vivo des effets antidiabétiques, antihyperlipidémiques et antioxydants chez les rats. Un extrait aqueux de feuilles a montré des propriétés antimicrobiennes contre le champignon Acremonium kiliense et les bactéries Bacillus cereus et Bacillus subtilis, mais n’était pas efficace contre les champignons Alternaria brassicicola, Fusarium udum, Macrophomina phaseolina et Phytophthora parasitica. Des extraits de feuilles à l’acétate d’éthyle ont montré une activité de piégeage des radicaux libres, des effets inhibiteurs sur l’enzyme de conversion de l’angiotensine I, et une activité anticancéreuse in vitro.
Falsifications et succédanés
A cause de son prix élevé, la ramie peut être remplacée par d’autres fibres, par ex. le lin (Linum usitatissimum L.) ou le coton (Gossypium spp.).
Description
Plante herbacée vivace, érigée, ou petit arbuste, monoïque, de 0,5–2(–3) m de haut, à long rhizome et à racines de stockage tubérisées ; tige généralement non ramifiée et creuse, de 8–16 mm de diamètre, initialement verte et poilue, virant au brunâtre et devenant ligneuse. Feuilles alternes, simples ; stipules intrapétiolaires, connées à la base, linéaires-lancéolées, atteignant 1,5 cm de long ; pétiole de 2,5–12 cm de long, pubescent ; limbe largement ovale, triangulaire à suborbiculaire, de 5–20 cm × 3,5–18 cm, base cunéiforme à subcordée, apex d’ordinaire brusquement et longuement acuminé, bord grossièrement denté à denté en scie ou crénelé, face supérieure verte et scabre, face inférieure glabre et verte ou à pubescence apprimée blanche, nervures basales 3. Inflorescence axillaire, racémiforme, paniculée, de 3–8 cm de long, chaque ramification portant plusieurs glomérules de fleurs serrés ou bien séparés, principalement femelle avec quelques ramifications mâles vers la base ; glomérules mâles petits, généralement à 3–10 fleurs, glomérules femelles plus grands, généralement à 10–30 fleurs. Fleurs unisexuées ; fleur mâle courtement pédicellée, périanthe 3–5-lobé, étamines aussi nombreuses que les lobes et incurvées, à rudiment de pistillode persistant ; fleur femelle sessile, périanthe tubuleux, 2–4-lobé, verdâtre à rosé, pistil à ovaire 1-loculaire avec 1 ovule, style exsert, mince et poilu d’un côté, stigmate filiforme. Fruit : akène subglobuleux à ovoïde d’environ 1 mm de diamètre, enveloppé par le périanthe persistant, poilu, crustacé, brun-jaune. Graines subglobuleuses à ovoïdes, légèrement inférieures à 1 mm de diamètre, brun foncé.
Autres données botaniques
Le genre Boehmeria comprend environ 65 espèces, réparties principalement dans les régions tropicales et subtropicales, rarement dans les régions tempérées. La variabilité au sein de Boehmeria nivea est considérable et généralement deux variétés se distinguent, bien qu’elles aient également été décrites au rang d’espèces, sous-espèces ou formes :
– var. nivea (“ramie blanche”, “ramie de Chine” ou “China grass”) est originaire de la Chine et du Japon, et est caractérisée par un épais feutre de poils blancs sur la face inférieure des feuilles. Elle semble plus adaptée aux climats tempérés et subtropicaux. Ce taxon est cultivé à l’échelle commerciale.
– var. tenacissima (Roxb.) Miq. (“ramie verte” ou “ramie d’Inde” ; synonyme : Boehmeria tenacissima Gaudich.) est supposée être originaire de Malaisie et a de plus petites feuilles qui sont vertes des deux côtés. Elle semble plus adaptée aux climats tropicaux. La ramie verte pourrait dériver d’un croisement entre la ramie blanche et une espèce inconnue.
Croissance et développement
La ramie est cultivée comme culture pérenne. Le rhizome commence à pousser 5–20 jours après la plantation. Les racines de stockage sont produites en début de croissance. La récolte peut commencer 3–10 mois après la plantation des rhizomes, mais la première récolte d’une nouvelle plantation est rarement utilisée pour les fibres à cause de la croissance irrégulière et de la basse qualité des fibres. La ramie est allogame. Les fleurs mâles s’ouvrent en premier et la pollinisation est effectuée par le vent.
Ecologie
La ramie est cultivée à des températures moyennes variant de 20°C pendant la saison de culture dans les régions tempérées à 28°C sous les tropiques. Le gel peut détruire les rhizomes ; il peut être évité par l’application d’un paillage avec des feuilles ou du compost. Pour pousser correctement, la ramie exige une pluviométrie mensuelle d’au moins 100–140 mm. Les jours courts favorisent la floraison et la ramie tolère un ombrage partiel. Pour une production de fibres optimale, la ramie nécessite un limon sableux riche, bien drainé, avec un pH de 5,5–6,5. Avec une fumure importante, elle peut également être cultivée sur des types de sol moins favorables. La ramie est extrêmement sensible à l’asphyxie racinaire.
Multiplication et plantation
La ramie peut se multiplier par graines, mais les plantes obtenues mettent 1–2 ans pour devenir productives et sont souvent inférieures à leurs parents. Pour cette raison, la ramie est généralement multipliée de manière végétative par des boutures de rhizome de 15–30 cm de long, prélevées sur des plantes d’au moins 3 ans. Pour garantir une croissance optimale, les rhizomes doivent être plantés aussi vite que possible après avoir été coupés. Si une plantation immédiate est impossible, ils doivent être conservés humides et couverts et dans un lieu ombragé. Les boutures de rhizome sont généralement plantées manuellement dans un lit de semis bien préparé à une profondeur de 5–7,5 cm. La distance de plantation varie beaucoup, selon la fertilité du sol, le cultivar et la disponibilité du matériel de plantation. La distance entre les lignes est de 25–140 cm, celle sur la ligne de 5–60 cm. La ramie peut également se multiplier par division, marcottage aérien et boutures de tige. La multiplication in vitro est possible, des plants complets ayant été régénérés à partir de cals produit avec des cotylédons, des feuilles, des segments de tiges, des segments de feuilles ou des hypocotyles.
Gestion
La ramie nécessite un désherbage régulier jusqu’à ce que le couvert végétal se ferme. Le désherbage de cultures de repousse commence généralement pendant la récolte de la culture précédente, lorsque non seulement la ramie est coupée mais également les plantes adventices. A cause de sa forte productivité, la ramie épuise rapidement les éléments nutritifs du sol. Une fertilisation avec du fumier ou des engrais minéraux, en particulier l’azote, est importante pour avoir des rendements satisfaisants. Laisser ou remettre les feuilles et d’autres résidus sur le champ est bénéfique, car ces matériaux contiennent une forte proportion des éléments nutritifs prélevés du sol. La production de 45 t de matière végétale fraîche (1,5 t de fibres) sur un sol tourbeux en Floride (Etats-Unis) a provoqué le prélèvement d’environ 206 kg de N, 19 kg de P, 100 kg de K, 230 kg de Ca et 52 kg de Mg. Aux Philippines, la recommandation générale est de fertiliser une plantation de 50 000 pieds/ha avec 90 kg de N, 26 kg de P et 50 kg de K par récolte par ha sur du limon sableux ou argileux, et avec 60 kg de N, 13 kg de P et 25 kg de K sur des sols riches en matière organique. Elle encourage aussi à remettre tous les débris végétaux sur le champ après l’extraction des fibres. Dans certains pays, la replantation est effectuée tous les 7 ans, alors que dans certaines parties de la Chine la culture est maintenue jusqu’à 20 ans.
Maladies et ravageurs
Aucune donnée n’est disponible sur les maladies et les ravageurs affectant la ramie en Afrique tropicale. La plus grave des maladies de la ramie en Asie est le “pourridié laineux” provoqué par Rosellinia necatrix. Parmi les autres maladies de la ramie, on signalera la maladie des taches foliaires provoquée par Pseudocercospora boehmeriae, les pourritures de tige provoquées par Corticium rolfsii (synonyme : Sclerotium rolfsii), Macrophomina phaseolina, Phoma boehmeriae et Rhizoctonia solani, et la cercosporiose provoquée par Cercospora spp. De nombreux insectes s’alimentent sur les feuilles de ramie, mais ils représentent des ravageurs peu dangereux. Les plus répandus sont les cigariers (Sylepta spp.), que l’on trouve dans presque tous les pays où la ramie est cultivée.
Le nématode à galles Meloidogyne incognita est présent régulièrement chez la ramie. Il peut être détecté par la présence de galles sur les racines. Les plantes sévèrement infectées sont rabougries et leurs feuilles sont jaunes. D’autres nématodes affectent la ramie, dont le nématode des lésions racinaires (Pratylenchus sp.), le nématode du rabougrissement (Tylenchorhynchus sp.) et le nématode réniforme (Rotylenchulus sp.).
Récolte
Le moment de la récolte de la ramie est primordial : si les tiges sont immatures, le rendement en fibres est réduit ; si les tiges sont trop mûres, il est difficile d’extraire les fibres. La récolte est généralement effectuée lorsque la tige commence à virer au brun et que la croissance ralentit. Dans les régions tempérées, les cultures de repousse peuvent être récoltées 2–3 fois par an, dans les régions subtropicales 4–5 fois, et dans les régions tropicales il est possible de faire jusqu’à 7 récoltes par an. Cependant, le rendement par récolte est généralement plus élevé dans les régions tempérées, et il se peut qu’on obtienne plus de fibres par ha et par an avec 2–3 récoltes dans les régions tempérées qu’avec un plus grand nombre de récoltes dans les régions tropicales. Les plantes sont généralement récoltées manuellement avec une faucille près du sol pour prévenir la naissance de nouvelles tiges à partir des anciennes souches. Dans certaines régions, les tiges sont pliées jusqu’à la rupture du cœur et le cortex est retiré des plantes au champ. Des moissonneuses mécaniques ont été mises au point, mais ne sont pas utilisées à des fins commerciales. Au moment de la récolte, les sommités et les feuilles peuvent être séparées de la tige et utilisées comme aliment pour les animaux ou comme engrais vert.
Rendement
Le rendement en tiges fraîches de ramie est habituellement de 45–60 t par ha et par an, soit environ 2000 kg de fibre séchée et 1500 kg de fibre dégommée. Aux Philippines, on a répertorié des rendements de 2000 kg de fibres séchées par ha la première année après la plantation et de 3500 kg les années suivantes. Les rendements commencent à baisser lorsque la plantation devient trop dense ; à ce stade, les rhizomes peuvent être taillés, par ex. par un labour, ou la zone peut être replantée.
En cas de culture pour le fourrage, le rendement peut monter à 300 t de matière fraîche ou 42 t de matière sèche par ha et par an en pratiquant jusqu’à 14 coupes.
Traitement après récolte
La ramie est transformée en fibres en une ou deux étapes : la première étant l’extraction, la seconde le dégommage. L’extraction est généralement effectuée manuellement en défoliant la tige et en retirant le ruban entier de liber brut, puis en raclant pour éliminer l’écorce externe, le parenchyme non-fibreux et une grande partie de la substance gommeuse. L’extraction manuelle est très consommatrice de main d’œuvre, et au Brésil, au Japon et dans certaines parties des Philippines, la ramie est décortiquée par voie mécanique avec des machines fonctionnant sur les mêmes principes que celles utilisées pour le kénaf (Hibiscus cannabinus L.) ou le sisal (Agave sisalana Perrine). La fibre de ramie ne peut pas être extraite correctement par rouissage, à cause de la présence et de la nature de grandes quantités de gommes dans l’écorce, bien qu’on ait découvert que certaines bactéries décomposent les gommes. Les fibres sont extraites lorsque les tiges sont encore fraîches, car l’écorce est plus difficile à éliminer lorsque la plante sèche. Si l’extraction ne peut pas être effectuée immédiatement après la récolte, les tiges sont conservées dans l’eau pour les garder fraîches. Les fibres extraites sont pendues sur des perches pendant 1–3 jours pour sécher et blanchir au vent et au soleil. Le séchage est effectué aussi vite que possible pour éviter les attaques par les champignons et les bactéries. Après le séchage, les fibres peuvent être brossées pour réduire la teneur en gomme. La fibre de ramie non dégommée peut être utilisée pour faire des cordes grossières destinées à des applications navales, des sacs et d’autres récipients et pour des carpettes et des tapis. Il n’y a pas de calibres universellement reconnus, et chaque pays a ses propres critères de calibrage.
Le dégommage est nécessaire pour éliminer les gommes contenues dans les fibres de ramie brutes. La présence de gommes rend les fibres raides et cassantes, et elles doivent être supprimées avant de pouvoir peigner et filer la fibre en fils fins. Dans les régions où le traitement est manuel, il peut être effectué en répétant le trempage, le raclage, le lavage et le séchage au soleil. D’autres méthodes intègrent le traitement avec une solution savonneuse, de la chaux ou des produits chimiques. De très nombreuses méthodes de dégommage chimique ont été mises au point, mais elles sont généralement conservées secrètes par les usines textiles qui les utilisent. Habituellement, elles comportent les mêmes étapes de base : ébullition dans une solution aqueuse alcaline ; lavage à l’eau ; blanchissage avec un agent oxydant ; lavage à l’eau ; et huilage avec un hydrocarbure sulfoné. S’il est mal effectué, le dégommage peut réduire la résistance de la fibre de ramie et augmenter sa fragilité. Le dégommage chimique produit des effluents polluants. Des procédés qui combinent dégommages microbien et chimique ont été proposés pour réduire l’utilisation de produits chimiques et d’énergie, et pour améliorer la qualité des fibres obtenues, mais ils n’ont pas encore été appliqués à l’échelle industrielle.
Dans les régions industrialisées, la ramie est généralement filée sur des machines conçues pour la soie, la laine ou le coton. Toutefois, les résultats sont souvent moins satisfaisants. Lorsqu’on utilise un système de filature de fibres courtes comme celui utilisé pour le coton, la fibre de ramie doit être coupée courte (“stapling”).
Ressources génétiques
L’Institute of Bast Fiber Crops de l’Académie chinoise des sciences agronomiques (CAAS) à Yuanjiang, Chine, a une collection d’environ 1300 entrées de ramie, et caractérise et évalue les caractéristiques botaniques et agronomiques, le rendement en fibres, la qualité et la résistance à la contrainte. Plus de 1000 entrées ont été plantées au champ au Yuanjiang pour créer la “National Ramie Germplasm Field Genebank”. Des collections de ressources génétiques sont également disponibles à l’Instituto Agronômico de Campinas (IAC), à São Paulo, Brésil, et à l’Institute of Plant Breeding de l’Université des Philippines Los Baños.
Sélection
La ramie étant une culture clonale, les méthodes de sélection appliquées sont donc similaires à celles de la canne à sucre ou de la pomme de terre. Les semis sont généralement d’une qualité très inférieure et pour obtenir des cultivars améliorés, un croisement recombinant initial doit être suivi d’un long programme de sélection clonale. Le travail de sélection sur la ramie a été effectué dans différents pays, dont les Philippines et l’Indonésie. En Chine, l’Institute of Bast Fibre Crops a sélectionné et diffusé plus de 30 entrées d’élite. En Inde, 5 cultivars ont été sélectionnés sur la base du rendement, de la teneur en gommes, de la réponse aux engrais et de la résistance à la contrainte, et le plus apprécié d’entre eux (‘R 67–34’) est commercialisé. Les points importants à prendre en considération pour la sélection de la ramie sont : l’adaptation aux conditions écologiques, les caractéristiques de décorticage, les caractéristiques du feuillage et de la ramification, la résistance aux maladies et aux ravageurs, la tendance à la verse et les caractéristiques des fibres (uniformité, résistance, finesse et couleur).
Au Brésil, un protocole a été développé pour la modification génétique de la ramie et des essais sont menés pour améliorer la composition en acides aminés et donc la valeur fourragère de la ramie par la modification génétique. En Chine, une transformation génétique de plantes de ramie a été obtenue au moyen d’Agrobacterium.
Perspectives
En raison des difficultés et des coûts impliqués dans la production et la transformation de la ramie, il est peu probable que cette culture devienne une marchandise importante du commerce mondial et concurrence les principales fibres naturelles et synthétiques établies. Cependant, les excellentes propriétés de sa fibre et la vaste gamme d’utilisations possibles font de la ramie une culture de rapport prometteuse pour les marchés locaux dans de nombreux pays tropicaux et subtropicaux. La mise au point de nouvelles technologies, telles que des machines de décorticage et d’extraction et des processus de dégommage adaptés à des opérations à moyenne et petite échelle, peut améliorer les chances de la ramie de devenir une plante à fibres plus importante. Les propriétés médicinales de Boehmeria nivea semblent justifier la poursuite des recherches.
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Sources de l'illustration
- Escobin, R.P., 2003. Boehmeria nivea (L.) Gaudich. In: Brink, M. & Escobin, R.P. (Editors). Plant Resources of South-East Asia No 17. Fibre plants. Backhuys Publishers, Leiden, Netherlands. pp. 86–91.
Auteur(s)
- M. Brink, PROTA Network Office Europe, Wageningen University, P.O. Box 341, 6700 AH Wageningen, Netherlands
Citation correcte de cet article
Brink, M., 2011. Boehmeria nivea (L.) Gaudich. [Internet] Fiche de PROTA4U. Brink, M. & Achigan-Dako, E.G. (Editeurs). PROTA (Plant Resources of Tropical Africa / Ressources végétales de l’Afrique tropicale), Wageningen, Pays Bas. <http://www.prota4u.org/search.asp>.
Consulté le 18 décembre 2024.
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