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Raves et Navets à racines charnues (Candolle, 1882)

Révision de 4 novembre 2011 à 16:10 par Michel Chauvet (discussion | contributions)

Noms acceptés : Brassica rapa L. (navette et navet), Brassica napus (colza, chou-navet et rutabaga), Brassica oleracea Groupe Gongylodes (chou-rave)


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Raves et Navets à racines charnues. — Brassicæ species et varietates radice incrassata.

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Les innombrables variétés connues sous les noms de Raves, Navets, Choux-raves, Rutabagas, Turneps, avec leurs sous-variétes, se rapportent à quatre espèces de Linné : Brassica Napus , Br. oleracea, Br. Rapa et Br. campestris, ces deux dernières devant être plutôt réunies en une, d'après les auteurs modernes. D'autres variétés des mêmes espèces sont cultivées pour les feuilles (choux), les inflorescences (choux-fleurs), ou encore pour l'huile qu'on extrait des graines (colza, navette, etc.). Quand la racine ou le bas de la tige 1 sont charnus, les graines n'abondent pas, et il ne vaut pas la peine d'en tirer de l'huile ; quand ces organes sont minces, c'est au contraire la production de graines qui l'emporte et qui décide de l'emploi économique. En d'autres termes, les réserves de matières nutritives se déposent tantôt dans la partie inférieure et tantôt dans la partie supérieure de la plante, quoique l'organisation de la fleur et du fruit reste semblable ou à peu près.

Nous n'avons pas à nous occuper pour la question d'origine des limites botaniques des espèces et de la classification des races, variétés et sous-variétés 2, attendu que tous les Brassica sont originaires d'Europe et de Sibérie et s'y voient encore, sous quelque forme, à l'état spontané ou presque spontané.

Des plantes aussi communes dans les cultures et dont la germination est si facile se répandent fréquemment autour des terrains cultivés. De là quelque incertitude sur la spontanéité des pieds que l'on rencontre en rase campagne. Cependant Linné indique le Brassica Napus dans les sables du bord de la mer, en Suède (Gotland), en Hollande et en Angleterre, ce qui est confirmé pour la Suède méridionale par Fries 3, lequel, toujours attentif aux questions de cette nature, mentionne le Brassica campestris L. (type du Rapa, avec racines grêles) comme vraiment spontané dans toute la péninsule Scandinave, la Finlande et le Danemark. Ledebour 4 l'indique dans toute la Russie, la Sibérie et sur les rives de la mer Caspienne.

Les flores de l'Asie tempérée et méridionale mentionnent les raves et navets comme cultivés, jamais comme se répandant hors des cultures 5. C'est déjà un indice d'origine étrangère. Les documents linguistiques ne sont pas moins significatifs.

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1. Dans les raves et navets, la partie renflée est, comme dans le radis, le bas de la tige (au-dessous des cotylédons) avec une portion plus ou moins persistante de la racine (Voir Turpin, Ann. sc. nat, sér. 1, vol. 21); dans le choux-rave (Brassica oleracea caulo-Rapa), c'est la tige.

2. Cette classification a été le sujet d'un mémoire d'Augustin Pyramus de Candolle, couronné par la Société d'horticulture de Londres, qui se trouve dans les Transactions de cette Société, vol. V, dans les Annales de l'agric. franc., vol. 19 et, en abrégé, dans le Systema regni veget., vol. 2,

3. Fries, Summa veget. Scand., I, p. 29.

4. Ledebour, Fl. ross., I, p. 216.

5. Boissier, Flora orientalis ; Sir ,1. Hooker, Flora of british India ; Thun-

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Il n'existe aucun nom sanscrit pour ces plantes, mais seulement des noms modernes indous et bengalis, et encore pour les seuls Brassica Rapa et oleracea 1. Kæmpfer 2 cite pour la rave des noms japonais, Busei ou plus communément Aona, mais rien ne prouve que ces noms soient anciens. Le docteur Bretschneider, qui a étudié attentivement les auteurs chinois, ne mentionne aucun Brassica. Apparemment il n'en est pas question dans les anciens ouvrages de botanique et d'agriculture, quoique maintenant en Chine on en cultive plusieurs variétés.

Transportons-nous en Europe. C'est tout l'opposé. Les langues anciennes ont une foule de noms qui paraissent originaux. Le Brassica Rapa se nomme dans le celtique du pays de Galles Meipen ou Erfinen 3 ; dans plusieurs langues slaves 4, Repa, Rippa, ce qui répond au Rapa des Latins et n'est pas éloigné du Neipa des Anglo-Saxons. Le Brassica Napus est en celtique gallois Bresych yr yd ; dans le dialecte irlandais, Braisseagh buigh, d'après Threlkeld 5, qui voit dans Braisseagh l'origine du Brassica des Latins. On cite un nom polonais Karpiele, un nom lithuanien Jellazoji 6, sans parler d'une foule d'autres noms, parfois transposés dans le langage populaire d'une espèce à une autre. Je parlerai plus loin des noms du Brassica oleracea à l'occasion des légumes.

Les Hébreux n'avaient point de noms pour les choux, raves ou navets 7, mais il existe des noms arabes : Selgam pour le Br. Napus, et Subjum ou Subjumi pour le Br. Rapa, noms qui se retrouvent en persan et même en bengali, transposés peut-être d'une espèce à l'autre. La culture de ces plantes dans le sud-ouest de l'Asie s'est donc répandue depuis l'antiquité hébraïque.

En définitive, on parvient par toutes les voies, botanique, historique et linguistique, aux conclusions suivantes :

I° Les Brassica à racines charnues sont originaires de l'Europe tempérée.

2° Leur culture s'est répandue en Europe avant et dans l'Inde après l'invasion des Aryas.

3° La forme primitive, à racine grêle, du Brassica Napus, appelée Br. campestris, avait probablement une habitation primitive plus étendue, de la péninsule Scandinave vers la Sibérie et le Caucase. Sa culture s'est propagée peut-être en Chine et au Japon par la Sibérie, à une époque qui ne paraît pas beaucoup plus reculée que la civilisation gréco-romaine.

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berg, Flora japonica ; Franchet et Savatier, Enumeratio plant. japonicarum.

1. Piddington, Index.

2. Kaempfer, Amœn., p. 822.

3. Davies, Welsh botanology, p. 65.

4. Moritzi, Dict. ms. tiré des flores publiées.

5. Threlkeld, Synopsis stirpium hibernicarum, 1 vol. in-8, 1727.

6. Moritzi, Dict. ms.

7. Rosenmüller, Biblische Naturgeschichte, vol. I, n'en indique aucun.

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4° La culture des diverses formes ou espèces de Brassica s'est propagée dans le sud-ouest de l'Asie depuis les anciens Hébreux.