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Genévrier (Cazin 1868)

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__TOC__

[468]

== Genévrier ==

Voir la page ''[[]]''

GENÉVRIER. Juniperus communis.

Juniperus vulgaris fructicosa. G. BAUH. — Juniperus vulgaris seu mi'itor,

PARK.

Genévrier commun, — genièyre, — pétron, — petrot.— genibre, —piket.
CONIFÈRES. — CUPRESSINÉES. Fam. nat. — DIOECIE MONAUELPHIE. L.

Le genévrier croît dans presque toute la France, et se trouve dans te
bois, les terrains incultes, sur les revers des montagnes. Il ne s'élève pasà
plus de 2 mètres dans nos climats, où il forme des buissons rabougris el
épineux, tandis que dans les pays chauds il s'élève souvent en arbre deoà
6 mètres de haut. La culture peut lui faire acquérir partout cette hauteur.
Je l'ai obtenue pour plusieurs à ma maison de campagne.

Description. — Racines fortes et rameuses. — Tiges tortueuses, difformes,!
écorce raboteuse et rdugeâtre, les jeunes pousses des rameaux menues, pendantes, i
peu triangulaires. — Feuilles sessiles, étroites, dures, en forme d'épine et toujours
vertes, marquées d'une raie blanche longitudinale, réunies en verticilles trois par trois.
—- Fleurs dioïques, quelquefois monoïques; les fleurs mâles disposées en petits chatons,
ovoïdes, munies d'écaillés pédicellées, élargies au sommet en forme de bouclier; sons
chaque écaille trois ou quatre anthères sessiles, à une seule loge : les fleurs femelles en
chatons globuleux, les écailles épaisses, aiguës, disposées sur quatre rangs. - 0«
ovaire sous chacune d'elles, surmonté d'un petit stigmate. Ces écailles croissent, de-
viennent charnues, se soutient ensemble, et forment une prétendue baie arrondie de la
grosseur d'un pois, glabre, luisante, verte d'abord, puis noirâtre à la maturité. Ces
fruits, improprement désignés sous le nom de baies de genièvre, sont, comme nous ve-
nons de le voir, de véritables cônes à trois écailles soudées entre elles, renfermant trois
noyaux osseux à une seule loge.

Parties usitées. — Le bois, l'écorce, les sommités, les fruits.

[Culture. — Le genévrier croît spontanément sur les coteaux stériles, et végète
bien sur le sable et sur la craie ; il a plusieurs variétés, parmi lesquelles nous cite»
les G. oblonga, oblonga pendula, hibernica, etc. On le multiplie de marcottes ouf
boutures en août.]

Récolte. — Les fruits du genévrier restent verts pendant deux ans; ce n'est P»
la troisième année qu'ils mûrissent et deviennent d'un brun noirâtre. C'est à cause»
la lenteur de leur maturité qu'on voit constamment sur les genévriers des fruits veris
et des mûrs. La récolte de ces fruits se fait dans les mois d'octobre et de novembre; o»
les sèche facilement en les étendant clair-semés dans un grenier, et les remuant son-
vent. On doit les choisir gros, bien nourris, noirs, luisants, pesants, d'un goût sucre
un peu acre. Us doivent être aussi récents que possible, parce qu'il est prouvé qua»
le temps ils perdent leur arôme et leurs vertus.
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GENEVRIER. 469

ta récolte et la conservation des sommités ne réclament que les soins ordinaires.
Propriétés physiques et chimiques; usages économiques.

—Presque toutes les parties du genévrier, et surtout les cônes, répandent, quand on les
brûle une odeur résineuse plus ou moins suave et aromatique. Ces derniers sont d'une
odeur forte, agréable, d'une saveur douceâtre, amère, chaude, balsamique, térébin-
Ihacée. Ils contiennent un suc pulpeux, sucré. L'analyse chimique y a démontré la pré-
sence de l'huile volatile 1, de la cire Zi, de la résine 10, du sucre 33.8, de la gomme 7,
du ligneux et de l'eau Zi8; plus quelques sels de chaux et de potasse.— L'eau et l'alcool
s'emparent de leurs principes actifs. [Suivant Tromsdorff, la matière sucrée est cristalli-
sante et analogue au sucre de raisin; Nicolet a obtenu la résine cristallisée.]

L'huile volatile, qu'on obtient par distillation, est incolore; sa densité est de 0.911.
Elle est peu soluble dans l'alcool. Elle est isomérique avec l'essence de térébenthine,
suivant Dumas.

-.Les semences, osseuses, anguleuses, présentent de petites fossettes alignées où sont
contenues des utricules remplies d'huile volatile quand les fruits sont verts, et qui se
change en une vraie térébenthine à leur maturité. De sorte que pour obtenir cette
huile, il faut prendre les premiers, et les seconds, c'est-à-dire les fruits mûrs, pour pré-
parer l'extrait, et même les prendre desséchés (1).

Le tronc du genévrier rend, dit-on, dans les pays chauds, au moyen d'incision, une
résine appelée gomme de genévrier, vernis, etc., qu'il ne faut pas confondre avec la
sandaraque, qui est produite par le thuya articulata, d'après Broussonnet, quoiqu'on
l'ait attribuée au juniperus communis. Dans le nord et dans le centre de l'Europe, le
genévrier ne rend pas de résine; on ne connaît pas de gomme ou résine de genévrier;
et l'on donne comme telle la sandaraque. (Mérat et Delens.)

Dans le Nord, on distille beaucoup de grains, et l'eau-de-vie qu'on en retire a tou-
jours un goût de feu, un goût acre, empyreumatique; pour remédier à cet inconvé-
nient et lui communiquer d'autres qualités, on a coutume de mêler des cônes de ge-
névrier à la liqueur qu'on veut distiller, et qui donne l'eau-de-vie connue sous le nom
de genièvre.— Les fruits du genévrier, infusés dans l'eau, y fermentent et donnent une
espèce de vin dont on obtient par là distillation une eau-de-vie de genièvre un peu
acre et dont l'usage est très-répandu parmi les habitants peu aisés, surtout en Alle-
magne, où.elle, est l'objet d'un commerce considérable. — Les Suédois préparent avec
ces mêmes fruits une espèce de bière qu'ils louent comme très-saine et surtout comme
antiscorbutique. — Helvétius conseillait Une boisson composée de 7 décalitres 1/2 de
fruits de genièvre concassés, et de quatre poignées d'absinthe bien épluchée, jetées
dans un tonneau plein d'eau, pour laisser infuser dans un lieu frais ou dans une cave
pendant un mois. Cette boisson est salutaire et durable, si l'on a soin, chaque l'ois, de
renrcttre. autant d'eau qu'on a tiré de liqueur pour l'usage journalier. Elle convient
principalement aux, habitants des contrées marécageuses, où les fièvres intermittentes
sont effdëmiques. Voici un vin de genièvre qui est plus agréable : on supprime l'ab-
sinthe et on la remplace par quelques livres de miel ou de cassonnade; lorsque la
liqueur a acquis une saveur vineuse par la fermentation, on la soutire. — On fait infu-
ser les fruits de genévrier dans l'eau-de-vie pour en confectionner des liqueurs de table
ou médicinales, etc.

;» PRÉPARATIONS PHARMACEUTIQUES ET BOSES.

A LUWERIEDH. — Infusion des fruits concas-
'Sés.oa dés sommités (à vase clos), de 15 à
ffgr. par kilogramme d'eau ou de vin
Manci

Décoction du bois en copeaux, 30 à 00 gr. par
..kilogramme.

ïau distillée (i sur 4 d'eau), de 50 à 123 gr.,

.; et pouruiasquer l'odeur et la saveur dés-
agréables de diverses préparations purga-

*.^its(30 à 60 gr. par kilogramme de

iManc), 60 à 100 gr.

'L cendre de genêt (150 gr. par kilo-

JWmme.de vin blanc), 60 à 120 gr.

sT^ 11 SUr 2 d'alc°°l ^ 33 degrés), de 2 à
J gr, en potlon ou mélangée a la tisane a

"u vin, etc.

Extrait (par infusion, 1 sur 4 d'eau), de ti à
8 gr., en pilules ou en solution dans un li-
quide approprié ou seul.

Huile essentielle (1 sur 8 d'eau), de 10 à
1^ centigr., en potion, en oleo-saccharum,
pilules, etc.

Poudre, de 2 à 8 gr., en bols, pilules, ou dans
un liquide approprié.

Alcoolat, à la même dose et de la même ma-
nière que la teinture.

Fruits entiers, 15 à 20 à la fois.

A L'EXTÉRIEUR. — Infusion des fruits, décoc-
tion des sommités, en lotions, fomentations,
bains.

Teinture, en frictions.

Poudre ou fruits entiers sur des charbons ar-

tl) Journal de pharmacie, 1827, t..XIII, p. 215.
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470 GENEVRIER.

dents, dans une hassinoire, pour fumiga-
tions.

i Poudre, en bains.

I Fruits contus, en cataplasmes.

Les fruits du genévrier sont stimulants, toniques, stomachiques, diuré-
tiques, diaphorétiques. Â petite dose, ils localisent leur action sur l'esto-
mac : ils excitent l'appétit, dissipent les flatuosités, facilitent la digestion,
A dose plus élevée, ils agissent sur toute l'économie, provoquent l'exha-
lation cutanée, modifient les sécrétions muqueuses et excitent plus spécia-
lement les organes sécréteurs de l'urine, à laquelle ils communiquent une
odeur de violette. On les emploie dans les affections catarrhales pulmo-
naires et vésicales chroniques, la phthisie, la leucorrhée, la blennorrhée, la
néphrite calculeuse, la chlorose, l'aménorrhée par débilité, l'hydropisie,
l'albuminurie, l'asthme humide, la bronchorrée, le scorbut, les engorge-
ments des viscères abdominaux, les cachexies, les affections cutanées chro-
niques, rhumatismales, etc.

Les praticiens de tous les temps ont employé avec succès les cônes de ge-
névrier dans les diverses maladies que nous venons d'énumérer. On peut
lire à ce sujet Van Swieten, Hoffmann, Vogel, Rosenstein, Meckel, Schmidt,
Hecker, Loiseleur-Deslongchamps, Lange et Demangeon. Ce dernier a fait
insérer dans le Journal de médecine (1806) deux observations remarquables
constatant leur action particulière sur l'appareil urinaire.

En employant préalablement ou simultanément l'infusion de fruits de ge-
névrier et les frictions de pommade de belladone, dont l'effet est de dissi-
per le spasme et la douleur, on pourrait favoriser l'expulsion des calculs,
dans les cas où ces symptômes, au lieu de diminuer, augmenteraient par
l'usage des diurétiques. (Voyez BÉLLADONK, p. 166.) On sait que les cônes de
genévrier excitent à tel point les organes sécréteurs de l'urine, que celle-ci
devient quelquefois sanguinolente, quand on les administre à trop grande
dose, ou à des sujets trop irritables, ou qu'on en fait usage trop longtemps,
Il est donc rationnel, dans les affections calculeuses, de s'assurer du tempé-
rament du malade, et surtout de l'état des voies uritiaires, avant de prescrire
ce médicament.

On a retiré de grands avantages des fruits de genévrier comme diuré-
tiques dans les hydropisies. On se sert alors le plus ordinairement de fin- ■
fusion simple ou nitrée, aqueuse ou vineuse. Hegewisch (1) préférait la
décoction dans la bière à tous les autres diurétiques dans le traitement de
l'hydropisie. Van Swieten faisait prendre quatre à huit fois par jour une
à deux cuillerées à-bouche du mélange de 120 gr. d'extrait délayé dans
1 kilogr. d'eau distillée des baies, avec addition de 60 gr. d'esprit dege-
nièvre. Vitet prescrit contre l'ascite par cachexie le suc exprimé de cresson
mêlé avec-une forte infusion de fruits de genévrier. Alexandre (2) met » ;
premier rang des remèdes employés contre l'hydropisie, l'huile essentielle
de genièvre, à la dose de quelques gouttes seulement- dans une infusion*
thé vert. L'infusion aqueuse ou vineuse m'a réussi dans un grand nombre ne
cas. J'y ai souvent ajouté la racine de persil ou celle de raifort, surtout a»
les hydropisies succédant aux fièvres intermittentes ou accompagnant'al-
buminurie chronique.

. Dans lespays bas et humides, l'usage de l'infusion des fruits de genévrier
dans l'eau, la bière ou l'eau-de-vie (ratafia), relève les forces, favoriseP
sécrétions et peut préserver des fièvres muqueuses et intermittentes, <!•
sévissent annuellement sous l'influence paludéenne. Tissot recommande a
habitants des lieux où la nature de l'air rend ces fièvres fréquentes, deffl'.
cher tous les jours des fruits de genévrier et d'employer pour boisson un

" (1) Horn's Archive, t. VI.
(2) Dictionnaire des sciences médicales, t. XXII, p. 407.
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.GENÉVRIER. 471

infusion fermentée de cette même graine, moyens aussi faciles que peu
coûteux. Le vin composé de fruits de genévrier et d'absinthe m'a réussi dans
des fièvres intermittentes automnales avec engorgement splénique et ca-
chexie, après l'usage infructueux du sulfate de quinine. J'ai souvent vu des
paysans se guérir promptement de ces fièvres en prenant avant l'accès 4 à
.te. debaies de genévrier en poudre. Ce remède excite la transpiration,
{ruelemalade favorise en s'enveloppant de couvertures de laine dans un lit
préalablement imprégné de la vapeur de cette même poudre jetée dans une
bassinoire, sur des charbons ardents.

Les rameaux et les sommités du genévrier jouissent de propriétés ana-
logues à celles des cônes de cet arbrisseau. Roques (1) a eu à se louer d'un
vin composé de 60 gr. de fruits, de 30 gr. de rameaux et de 1 kilogr,

. de vin blancs avec addition, après trois jours d'infusion, de 60 gr. de
sucre. Il augmentait parfois l'action de ce vin en y ajoutant une bonne
pincée d'absinthe et 30 gr. de racine de raifort. Deux ou trois cuillerées,
administrées de temps en temps, suffisaient pour ranimer les tissus orga^
niques, pour exciter l'appétit, réveiller les fonctions digestives, pour pro-
voquer le cours des urines, etc. « Ce vin stimulant, dit l'auteur que nous
venons de citer, a quelquefois guéri des hydropisies rebelles, des fièvres
intermittentes automnales que le quinquina rendait encore plus opiniâtres,
des affections scorbutiques, etc.»

Auguste-Frédéric Hecker (2) a guéri, au moyen de l'extrait de genièvre,
un grand nombre d'individus affectés de blennorrhagie. Jourdan (3) a con-
firmé, par de nombreux essais, les observations de Hecker. Suivant le doc-
teur Plàgge (4), o gouttes d'huile essentielle de baies de genièvre, avec
4gf. d'esprit de nitre doux, dans une mixture, seraient un des meilleurs diu-
rétiques 'que- nous possédions. Ce médecin accorde à l'huile essentielle de
genévrier un effet curatif dans les cas de blennorrhagie ; il la considère
'Comme pouvant remplacer avantageusement le cubèbe et le copahu.

C'est surtout dans les affections catarrhales anciennes et les écoulements
chroniques muqueux, que j'ai été à même de constater les bons effets des
sommités et des cônes de genévrier. J'ai vu des leucorrhées anciennes avec
débilité dès voies digestives, traitées inutilement par divers moyens, céder
à l'usage d'une forte infusion aqueuse ou vineuse, dont les propriétés me
semblent; au reste, tout à fait semblables à celles de la térébenthine et des
autres substances résineuses. J'associe souvent à ce médicament la racine
d'aunée et celle d'angélique. Dans les hydropisies, les engorgements viscé-
raux'e# lès cachexies qui suivent ou accompagnent les fièvres intermit-
tentes, je l'emploie seul ou mêlé avec la gentiane, la bryone, l'absinthe, là

• Tpétite centaurée, l'eupatoire d'Avicenne, le calcitrape ou la digitale, selon
les indications et l'état du malade.

. .;!*,'"bois de genévrier est sudorifique et diurétique, suivant les cas et les
dispositions individuelles. Il est le meilleur succédané du gaïac dans la
•syphilis le rhumatisme, la goutte, les maladies cutanées chroniques, etc.
feôn l'Africain et Brassavole l'ont recommandé dans les affections syphili-
h|aes.Sylvius'a également préconisé l'écorce et le bois de cet arbrisseau
!?.*s,ces mêmes affections. Hanin préparait avec le bois et une petite quan-.
tue de fleurs de sureau une tisane très-diaphorétique, qu'il employait con-
■fimment dans le traitement des maladies vénériennes. J'ai vu donner avec
succès .dahss les affections rhumatismales chroniques, chez les villageois, la
«sane sudorifique suivante : bois de genévrier râpé, 123 gr.; faites bouillir

' HÉl ï1"^ usuelles, t. IV, p. n.
'AihMy!<Went. de la gonorrhée.
■ U2)TTÎ *? sciences médicales, t. XVIII, p. 73.
») Bulletin de thérapeutique, 1852. ' .

472 GENÉVRIER.

dans eau, 1 kilogr. 4/2, et réduire à 1 kilogr.;' ajoutez vers la fin de l'ébul-
lition, vin blanc, 123 gr. Dose : 180 gr. Le malade prend cette tisane chaude
en se couvrant bien pour provoquer la sueur. Ce moyen est répété chaque
matin, ou chaque soir.

Les cendres du genévrier, en infusion dans le vin blanc, sont très-diuré-
tiques. J'ai vu des cas de leucophlegmatie, qui avaient résisté aux moyens
ordinaires, céder à l'effet de ce vin. Je le prépare en faisant infuser à froid
150 gr. de ces cendres dans 1 kilogr. de bon vin blanc de Bordeaux ou du
Rhin, ou tout simplement dans le cidre de bonne qualité. Le malade en
prend 60 à 100 gr. deux ou trois fois par jour, jusqu'à ce qu'il soit com-
plètement désenflé. Je dois faire observer que cette dose, très-bien sup-
portée par des campagnards robustes et peu irritables, serait trop forte
pour des sujets faibles, nerveux, ou atteints d'irritation gastrique ou in-
testinale.

La décoction de genévrier est employée à l'extérieur comme résolutive,
détersive, tonique, dans le traitement des engorgements froids, oedéma-
teux, les ulcères atoniques et scorbutiques. On applique aussi les fruits de
genévrier concassés en cataplasme. J'ai vu des paysans mettre sur la tête
des enfants atteints de teigne des baies de genièvre récentes, pilées et mê-
lées avec du saindoux. J'ai observé de bons effets de ce topique.

Les fumigations de cônes sont efficaces dans l'atonie générale, les vieilles
douleurs rhumatismales ou goutteuses, les hydropisies consécutives aux
lièvres éruptives. Ces fumigations m'ont été d'un grand secours pour rétablir
les fonctions de la peau dans l'anasarque albuminurique, qui survient à la
suite de la fièvre scarlatine. Je les fais pratiquer au moyen d'une bassinoire,
dans le lit des malades. Hufeland conseille de frictionner deux ou trois fois
par jour tout le corps des enfants scrofuleux ou très-faibles, avec des fla-
nelles imprégnées de la vapeur de ces mêmes fruits. J'ai vu plusieurs cas de
coryza chronique rebelle guérir au moyen de ces fumigations reçues dans
les narines. Dans ma pratique rurale, j'ai souvent fait brûler les branches et
les sommités du genévrier dans la chambre des phthisiques. Ce moyen est
très-bon. On fait quelquefois brûler cet arbrisseau pour désinfecter l'air. La
chimie moderne considère cette fumigation, ainsi que toutes celles du même
genre, comme ajoutant à l'air des corps étrangers qui, au lieu de le puri-
fier, en altèrent la pureté. On leur préfère, avec raison, la vapeur du chlo-
rure de chaux, ou d'oxyde de sodium, et les fumigations guitonniennes.

GENÉVRIER OXYCÈDRE, CADE (Juniperus oxicedrus, L.), petit cèdre. 11
croît dans le midi de la France. La combustion de son bois donne un li-
quide appelé huile de cade, qui est employée depuis longtemps par les ma-
réchaux contre la gale et les ulcères des chevaux.

Cette huile, produit de la distillation des grosses branches et des racines
de genévrier de l'espèce que nous venons de désigner, que l'on coupe par
morceaux de 20 à 30 centigr. de long pour les soumettre à l'action du feu
dans une vieille marmite percée sur un des côtés et couverte d'une pi*
plate qu'on lute avec de l'argile; cette huile, dis-je, qui coule par l'ouver-
ture laissée au vase distillatoire, est un liquide brunâtre, inflammalA
d'une forte odeur résineuse, analogue à celle du goudron, d'une saveur
acre et caustique.

Serre, d'Alais, a publié dans le Bulletin de thérapeutique (1846) un mé-
moire sur les bons effets de l'huile de cade, déjà employée depuis lon0-
temps dans la médecine populaire. ■ i ni

Appliquée sur la peau saine, l'huile de cade ne provoque ni doulÇur
démangeaison. Sur les muqueuses non enflammées, l'irritation est tres-p
prononcée; sur la peau et les muqueuses enflammées, son application
quelquefois accompagnée d'une cuisson légère et de courte durée ; su
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GENÉVRIER. 473

parties ulcérées, cette cuisson est un peu plus forte, mais elle ne dure pas
davantage : environ un quart ou une demi-minute. Elle ne détermine pas de
réaction pathogénique sensible chez les enfants atteints d'affection vermi-
neuse, auxquels on la donne à l'intérieur.

Les'premiers essais de Serre ont porté sur la gale, et il a si constamment
réussi qu'il n'emploie plus d'autre moyen dans le traitement de cette affec-
tion. Trois ou quatre frictions suffisent le plus ordinairement pour la faire
disparaître lorsqu'elle est récente. Lorsque cette maladie est invétérée, et
qu'il s'y joint un état eczémateux avec suintement, Serre réussit encore à la
«niérir par l'huile de cade, quand tous les traitements ont échoué. Cette
huile, suivant ce médecin, s'est montrée efficace dans les affections sécré-
tantes de la peau et contre toute maladie dartreuse, quelle que soit sa forme.
Cette application se fait à l'aide d'un pinceau.

Serré signale, comme particularité remarquable, la formation d'une pelli-
cule analogue à l'épiderme par l'action de l'huile de cade. Cette pellicule
se forme, du quatrième au cinquième jour, sur les parties eczémateuses
ointes d'huile; elle est lisse et presque transparente. Du cinquième au
sixième jour, cette pellicule se casse, et tombe du neuvième au dixième
jour, laissant voir la surface malade guérie ou en voie rapide de guérison.

C'est surtout contre l'ophthalmie scrofuleuse que Serre a obtenu de bons
effets de l'huile de cade. Chez les adultes, il applique cette huile pure sur
la paupière inférieure tous les deux jours. Chez les enfants, il n'a jamais" eu
besoin de porter le remède sur l'oeil ou sur les paupières pour guérir les
ophthalmies les plus opiniâtres ; de simples onctions sur le front, les
tempes, les pommettes, et extérieurement sur les paupières, ont le plus
souvent suffi pour amener la guérison. Dans quelques cas, les résultats ont
été activés par l'introduction d'une goutte d'huile de cade dans chaque
narine.

Si la guérison, ou une amélioration tellement notable qu'on puisse l'es-
pérer prochaine, n'est pas obtenue au bout du cinquième ou sixième jour,
on ne doit plus, selon Serre, compter sur l'huile de cade, soit qu'on ait
affaire à une affection eczémateuse, soit qu'il s'agisse d'une ophthalmie.
Dans ce cas, Serre a recours aux bains de sublimé.

Devergie (1) a répété à l'hôpital Saint-Louis les essais de Serre. Il ne par-
tage pas l'enthousiasme- de ce médecin ; mais il reconnaît que l'huile de
cade est une bonne ressource de plus dans le traitement des dartres sécré-
tantes et dans les ophthalmies scrofuleuses. Il arrive même quelquefois que
l'application de ce remède supprime trop brusquement la sécrétion mor-
bide des surfaces enflammées; elle ne doit être employée que tous les trois
jours. Il faut l'étendre sur la surface malade, mais essuyer aussitôt avec du
coton sec, de manière à ce qu'il reste appliqué la couche la plus mince
possible d'huile. En général, elle est trop active quand il s'agit d'un eczéma
; P parcourt simplement ses périodes; elle devient utile lorsqu'il s'agit
d eczéma ancien où la sensibilité de la peau permet le contact de moyens
modificateurs résolutifs. C'est surtout dans la variété d'eczéma psoriasi-
wm qu'elle réussit (Devergie) (2).

On a:employé avec succès, en Angleterre, dans quelques maladies de la
Pau, l'onguent suivant : cire jaune, 3 gr.; axonge, 45 gr.; huile de cade,
,..'1* gf.; mêlez.

(Bazin a puissamment contribué à vulgariser l'emploi de l'huiie de cade,

"•.-wAttriiol. des connaissances médico-chirurgicales, 1853, p. 59.

âetouH <?P"ner-<'ej on délivre fréquemment, au lieu d'huile de cade, de l'huile distillée
W'rta°Dî CW' 1Ui est inférieure en efficacité. L'odeur peut tromper des personnes peu exer-
iWitffl t i'coul(Bur présente une différence très-apparenie. L'huile de goudron est noire et
Wière^ATi."nâtrc; l'huile de cade, en apparence brune, est d'un reflet rouge vif par la lu-
• A Paris, on vend presque toujours l'huile de goudron pour l'huile de cade.


[474]

tant dans les scrofulides que dans 1 les affections cutanées, telles que gale
lichen agrius, psoriasis, couperose, où les applications de cette huile, pure'
ou adoucie par un mélange avec l'huile d'amandes douces, la glycérine
produisent des effets remarquables, sinon très-durables. (Consultez, à et
sujet, Bazin, De la scrofule, p. 202 ; et Annales de thérapeutique, 1852, p,|(8
et suiv., Gibert, Remarques sur l'emploi de l'huile de cade, etc.)

On a tenté l'administration de cette huile à l'intérieur dans les mêmes affections, quand elles sont rebelles à l'usage externe (Bazin); mais cette pratique ne s'est pas généralisée. C'est un insecticide efficace : à ce titre, on l'a recommandée comme vermifuge.)

[Nous citerons les J. Bermudiana et Virginiana, parfaitement acclimatés en France, dont le bois, connu sous le nom de bois de cèdre, sert à faire des crayons et des stéthoscopes.]

[[Catégorie:Cazin 1868]]
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