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Clémentine (Trabut, 1926)

  • Texte identique : La Clémentine. Les hybrides du "citrus nobilis". Service botanique. Informations agricoles. Bulletin n° 67. Alger, 1926. In-8°, 7 p., figure. en ligne sur [Archive.org.

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Nom accepté : Citrus clementina


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Tous les Auteurs, qui ont eu à s'occuper des Citrus cultivés, ont été frappés du nombre et de la diversité des formes qu'ils rencontraient dans les cultures. Un des premiers qui aient formulé, pour expliquer la variabilité des Citrus, l'hypothèse des croisements est Abd-Allatif dans sa description de l'Egypte (1200) : « Ces espèces se combinent les unes avec les autres, ce qui produit une quantité infinie de variétés[1] ».

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  1. Traduction du Dr Sacy, 1800.


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Gallesio, dans son remarquable Traité des Citrus, précise l'importance de l'hybridation et lui attribue l'origine des formes intermédiaires d'un classement difficile dans le cadre des espèces admises. Aujourd'hui l'observation de faits précis permet une généralisation plus certaine qui ne manquera pas de provoquer des recherches capables d'orienter la génétique vers la création d'un très grand nombre de fruits nouveaux obtenus par de nouvelles combinaisons des caractères propres à des espèces différentes. MM. Swingle et Weber ont déjà, depuis une trentaine d'années, créé de nombreux hybrides de Citrus qui, peu à peu, prennent place dans les orangeries, répondant à des objectifs différents : résistance à des parasites, à des influences telluriques ou climatiques, à des débouchés nouveaux.

Dès 1902 j'ai attiré l'attention sur une nouvelle Mandarine distinguée dans un semis important de mandarinier à l'Orphelinat agricole à Misserghin[1]. Au cours d'une visite de cet établissement je faisais observer au chef de culture que dans les semis faits, en vue d'obtenir des Mandariniers francs de pied, il se trouvait un certain nombre de sujets bien différents du Mandarinier, sujets qui devaient provenir d'hybridations des Mandariniers avec les Citrus du voisinage.

Quelques plants recueillis alors m'ont donné : Une Mandarine-Orange que j'ai par la suite abandonnée et qui m'a paru identique à un Oranger à petites feuilles que j'ai observé aux Baléares (Fouia menuda), une Pomeline qui me parut un hybride de Mandarine × Pamplemousse (Citrus deliciosa × C. grandis) fruit de peu de valeur commerciale et abandonné.

Enfin de ces semis est sorti aussi la Clémentine dédiée au Frère Clément, directeur des cultures et promoteur des semis.

Depuis, la Pépinière de Misserghin a étendu la culture de la Clémentine et, dans l'Oranie, les citriculteurs l'ont bien accueillie. Mais dans la Mitidja, ce n'est que depuis peu que ce fruit nouveau a intéressé les producteurs et les exportateurs d'Agrumes. En 1925, la Coopérative des Agrumes de Boufarik en a exporté sur les Halles de Paris une assez grande quantité et nous voyons, dans le rapport présenté le 3 novembre par M. Brissonnet, secrétaire-général du Conseil d'Administration, que le marché parisien a fait bon accueil à la Clémentine ; nous notons en effet que dans les prix moyens de vente, alors que la Mandarine est cotée à 55 fr. 65 les 100 kgs ; la Clémentine atteint 206 fr. 25 les 100 kgs ; les oranges ordinaires 43 fr. 60 les 100 kgs.

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  1. Revue Horticole, Paris 1902. Bulletin 35 du Service botanique du Gouvernement de l'Algérie, 1902. Bulletin agricole de l'Algérie, 1902.


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Voici une constatation qui réfute toutes les objections que l'on n'a pas manqué de faire à l'extension de la culture de la Clémentine pendant plus de vingt ans. Aussi nous avons appris avec plaisir que dès le printemps prochain de nombreux Orangers seront surgreffés en Clémentine.

Dès mes premières observations j'avais constaté que la Clémentine devait être d'origine hybride, et que ses caractères indiquaient comme père un Bigaradier à feuilles de Saule dit Granito introduit d'Espagne et vivant au voisinage des Mandariniers.

Les semis de Clémentine ayant reproduit, à la Station botanique, un certain nombre de Granito le doute n'existe plus ; la Clémentine est un hybride Mandarinier × Granito ou Citrus deliciosa × C. salicifolia.

La coloration rouge vif de la peau vient du Granito, un parfum spécial musquée a la même origine, mais l'amertume n'a pas été transmise, les feuilles ont aussi beaucoup de ressemblance avec celle du Granito :

Description. — Arbre de taille plus élevée et de l'apparence d'un Mandarinier ; mais avec un feuillage plus ample et plus foncé, feuilles très variables, très inégales sur les rameaux à fruits, en moyenne de 8 à 12 cm. de long sur 3 à 4 de large, oblongues lancéolées dans leur pourtour ; elles représentent le plus souvent une pointe effilée et rétuse ; sur le même rameau on peut observer des feuilles n'atteignant pas 5 cm. et des feuilles de 14 cm., le contour est très lâchement et très irrégulièrement crénelé ; la face supérieure est foncée brillante, la face inférieure vert clair. Le limbe est articulé sur un pétiole présentant, sur les grandes feuilles, un rudiment d'ailes.

L'odeur de la feuille froissée rappelle celle du Bigaradier et non du Mandarinier. Le fruit est abondant, de la taille d'une Mandarine ; mais moins déprimé, souvent un peu pyriforme. La peau se détache facilement, elle contient de grosses glandes à essence ; elle a une coloration rouge vif très particulière. La pulpe est colorée, très douce même avant maturité ; elle a un parfum de Mandarine légèrement musqué.

Les graines sont oblongues, fusiformes ; l'embryon est vert pistache.

La culture de la Clémentine ne présente rien de particulier, la greffe est faite sur Bigaradier, surtout sur Granito. L'arbre sera traité absolument comme le Mandarinier, mais planté à plus grande distance, car il atteint une plus grande taille. Il y a lieu aussi d'essayer la greffe sur Triptera.

Le grand avantage de la Clémentine est d'être plus précoce que la Mandarine. De novembre à fin décembre on peut cueillir des fruits très doux préférés à la Mandarine qui, à cette époque, est encore acide.


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Comme la Mandarine, la Clémentine a des fruits de grosseur assez inégale.

Les semis de Clémentine peuvent être l'origine de nouveautés intéressantes, car ils sont remarquables par la grande diversité dés sujets obtenus. J'ai vu, dans l'ancienne propriété de mon ami J. Bertrand à Sidi-Ali, des fruits assez curieux provenant de ces semis, notamment plusieurs Orangers doux d'assez bonne qualité descendant peut-être de fleurs de Clémentine fécondées par l'Oranger, une sorte de Chinois avec caractères de Mandarine.

A la Station botanique j'ai conservé une très petite Mandarine dénommée Mandarinette, qui sera certainement recherchée des confiseurs. Les sujets de Granito obtenus de ces semis sont utilisés comme bons porte-greffes pour le Mandarinier et la Clémentine. Enfin la Clémentine paraît plus résistante au froid que la Mandarine.

Il est à noter que jusqu'à ce jour la disjonction de cet hybride fertile a donné des sujets purs Granito ; mais jamais de vraies mandarines. La production d'Orangers doux très typiques peut s'expliquer par la fécondation de la Clémentine par l'Oranger doux. Il est donc possible et même très probable que parmi les Orangers doux cultivés un certain nombre de variétés aient parmi leurs ancêtres le Bigaradier croisé avec le Citrus nobilis ; mais d'un autre côté, notons que l'Oranger doux ou Citrus sinensis ne paraît pas pouvoir s'hybrider avec l'Oranger amer ou Bigaradier.

Enfin il est encore bien possible que le Bigaradier à feuilles de Saule Citrus salicifolia de L. et les Chinois eux-mêmes soient des hybrides.

Le Citrus salicifolia ou Granito est bien fixé et se reproduit fidèlement par graine depuis longtemps.

Dans la collection de Citrus de la Station botanique, il a été introduit d'autres Citrus très voisins de la Clémentine et ayant sans doute la même origine hybride : La Mandarine de Canton reçue du jardin colonial et provenant de Saigon a à peu près les mêmes caractères que la Clémentine : fruit plus régulier, plus plein, arbre vigoureux fertile, mériterait de trouver une place dans les cultures concuremment avec la Clémentine.

Bombay Mandarine est plus tardive et par cela moins intéressante, estimée en Angleterre.

Nartje du Cap, fruit très cultivé dans le Sud africain et expédié à Londres en été, plus tardif que la Clémentine.

Sous le nom de Mandarine sanguine, le Jardin d'essai a introduit autrefois un Mandarinier à petites feuilles ovales, à fruit très coloré,


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soufflé, à pulpe sucrée, mais de texture grossière. Ce Mandarinier sans valeur commerciale, mais très ornemental, a été parfois confondu avec la Clémentine ce qui en a retardé la propagation dans le département d'Alger.

Le plus grand nombre des Tangerines ou Mandarines cultivées aux États-Unis et même en Orient sont des hybrides comme la Clémentine. La véritable Mandarine (Citrus deliciosa) paraît assez rare dans les cultures du Nouveau-Monde, car toutes les variétés introduites et expérimentées à la Station botanique étaient du même type que la Clémentine notamment Dancy tangerine très cultivée en Floride.

Parmi ces hybrides Cleopatra ou Spice Tangierine très voisin de notre Mandarine sanguine forme un bel arbre à petites feuilles et fruits petits très colorés intéressant pour l'Ornementation.

Cette Tangerine est utilisable comme porte-greffe, car elle paraît avoir hérité du Bigaradier de la résistance à la maladie du pied appelée souvent Gommose.

Parmi les variétés introduites à la Station botanique on peut rattacher au groupe des hybrides de Mandarine le King Siam assez estimé en Floride et en Californie, originaire de Cochinchine. Ce Roi de Siam est une grosse mandarine à peau rugueuse très épaisse, agréablement parfumée, mûrissant tard et seulement bon à consommer à complète maturité. Ce fruit est excellent en confiture et mériterait à ce titre une place dans les Orangeries.

La Mandarine King de Cochinchine paraît être le type décrit par Loureiro comme Citrus nobilis. La Mandarine algérienne est le Citrus deliciosa de Tenore.

Les nombreuses Tangerines, comme la Clémentine, sont des hybrides, aussi il conviendrait de conserver le nom de Mandarine aux formes du Citrus deliciosa et réserver le nom de Tangerine aux hybrides du Citrus deliciosa avec le Bigaradier.

L'hybridation du Mandarinier avec le Pamplemousse ou Citrus grandis que je signalais en 1902, a été méthodiquement poursuivie en Floride par MM. Swingle et Weber en 1897 et en 1904 Swingle désignait ces nouveaux Citrus : Tangelo. Les Tangelo sont des hybrides Dancy tangerine et Pomelo. La Dancy tangerine me paraît comme la Clémentine, un hybride Mandarine et Bigaradier. Quant au Pomelo il est un hybride Citrus grandis × C. sinensis si bien que le Tangelo serait un hybride complexe de deux hybrides ayant ainsi pour ancêtres Citrus amara, C. deliciosa, C. grandis et C. sinensis.

Le Tangelo introduit à la Station botanique depuis une vingtaine


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d'années par les soins de mon ami Swingle, est devenu un très bel arbre ayant l'aspect d'un Oranger, le fruit ressemble à une belle Orange, et est très juteux, a le parfum et la légère amertume du Pomelo que probablement il est appelé à remplacer quand il sera mieux connu. Les amateurs de Pomelo, qui ont dégusté les fruits, les déclarent supérieurs aux Pomelo.

Un troisième groupe de Citrus rattaché également au Citrus nobilis est le groupe des Unshiu. Assez différent des Mandarines et Tangerines cultivées dans nos régions.

Les Unshiu reçus du Japon, il y a une vingtaine d' années, produisent des fruits que l'on peut consommer en octobre, alors que la peau est encore verte. Le seul mérite de l’Unshiu réside dans sa résistance au froid et sa précocité. Au Japon, il remonte dans la région montagneuse et y passe plusieurs mois sous la neige. Les Unshiu doivent être greffés sur Triptera, ils dépérissent sur Bigaradier, se maintiennent avec peu de vigueur sur l'Oranger doux.

M. Couderc qui a reçu des greffons d’Unshiu de la Station botanique et les a greffés à Aubenas, sur Triptera, y obtient de bons fruits malgré des températures hivernales de — 14°. Sans aucun doute, l’Unshiu pouvait trouver sa place en France dans les jardins de tout le Midi et de l'Ouest jusqu'en Bretagne.

Sous le nom de Satsuma, la Station botanique possède une forme améliorée d’Unshiu, fruit ayant l'apparence d'une Mandarine à chair très colorée, même quand la peau est encore verte, pas de graine. Le Satsuma même vert est très agréable consommé coupé en tranches, en salade, avec du sucre et du rhum. Dans ces derniers temps, M. de Tanaka a signalé au Japon des mutations de Satsuma produisant des fruits supérieurs qui méritent d'attirer l'attention en raison de leur précocité.

Les dérivés du Citrus nobilis pourraient ainsi produire en Algérie : en octobre Satsuma ; en novembre-décembre Clémentine et Mandarine de Canton ; en décembre-janvier Mandarine, Mandarinette ; en janvier Bombay, Mandarine Nartje du Cap ; en février-mars King ou Roi de Siam, Tangelo.

Des semis et des hybridations nouvelles permettront sans doute d'obtenir encore de très nombreuses variétés parmi lesquelles il faudra sélectionner les formes intéressantes pour la grande culture.