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Citrouille
Cazin, Traité des plantes médicinales, 1868
Cochléaria


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Clématite

Nom accepté : Clematis vitalba


CLÉMATITE DES HAIES. Clematis vitalba. L.
Clematis sylvestris latifolia. Bauh., Tourn.
Herbe aux gueux, — clématite brûlante, — vigne blanche, — vigne de Salomon, — viorne, berceau de la Vierge, — aubervigne, — cranquillier.
RENONCULACÉES. — CLÉMATIDÉES. Fam. nat. — POLYANDRIE POLYGYNIE. L.


Cette plante (Pl. XV) croît dans toutes les haies de la France, de l'Europe.

Description. — Racine grosse, fibreuse, rougeâtre. — Tige sarmenteuse, s'entrelaçant avec les plantes voisines, s'étendant en longs festons et retombant en guirlandes. — Rameaux nombreux, rudes, anguleux, quelquefois longs de 2 mètres. — feuilles de formes variables, opposées, pétiolées, toutes ailées, composées ordinairement de cinq folioles pédicellées, cordiformes, presque ovales, aiguës à leur sommet, vertes, glabres à leurs deux faces, à grosses dentelures, presque lobées, quelquefois entières. — Pétioles roulés en forme de vrilles. — Fleurs d'un blanc un peu cendré, disposées en panicule, à l'extrémité des rameaux (juillet-août). Quatre ou cinq sépales pétaloïdes, allongés, obtus et pubescents. Environ vingt étamines. — Anthères allongées. — Ovaires nombreux surmontés d'un long style soyeux auquel succèdent autant de capsules ovales, comprimées, terminées par une longue queue plumeuse formée par le style persistant. — Fruits composés d'akènes nombreux, touffus et offrant l'aspect de plumets blancs, soyeux et abondants.

Parties usitées. — Les feuilles, les fleurs, l'écorce.

[Culture. — La clématite n'est guère cultivée que dans les jardins botaniques et d'agrément ; on la multiplie de graines ou de marcottes qu'on ne sépare qu'à la deuxième année, les clématites d'ornement se greffent sur la commune ; elles demandent une terre franche, légère, mêlée de terre de bruyère, et une exposition chaude et sèche ; on doit, autant que possible, garantir les fleurs du soleil.]


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Récolte. — Elle doit être faite avant la floraison, bien que les fleurs soient aussi très-actives. L'âcreté de cette plante diminue considérablement par la dessiccation.

Propriétés physiques et chimiques; usages économiques. — A une saveur, astringente, légèrement acide, la clématite joint une âcreté remarquable ; ses feuilles fraîches déterminent un sentiment d'ardeur brûlante sur la langue et dans l'arrière-bouche. On retire de ses feuilles une eau distillée laiteuse, qui répand l'odeur de l'anémone pulsatille, et excite un sentiment d'ardeur dans la gorge. Cette eau distillée doit son âcreté à une huile essentielle jaunâtre, d'une saveur brûlante, difficilement obtenue séparément, étant en petite quantité. — Les propriétés de la clématite diminuent considérablement par l'ébullition.

[Les fleurs renferment une huile essentielle qui leur donne une odeur très-suave, se rapprochant de celle des amandes amères, mais que la distillation au contact de l'eau détruit en partie.]


PBÉPARATIONS PHARMACEUTIQUES ET DOSES.

A L'INTÉRIEUR. — Infusion, de 5 à 12 gr. par 500 gr. d'eau bouillante, comme diaphorétique, à prendre en plusieurs fois.
Extrait alcoolique (1 d'alcool sur 1 d'herbe et 8 d'eau), 5 à 20 centigr.

Poudre, de 5 à 15 centigr., en potion, comme purgatif.
A L'EXTÉRIEUR. — Feuilles pilées, Q.S., comme vésicatoire.


Toutes les parties de la clématite sont âcres, irritantes, rubéfiantes, vésicantes. On a préconisé cette plante comme diaphorétique et purgatif drastique dans les maladies vénériennes secondaires et tertiaires, l'hydropisie, les scrofules. Dioscoride lui attribue la propriété de guérir la lèpre. Matthiole l'a citée comme efficace, dans le traitement de la fièvre quarte. Tragus loue ses effets contre l'hydropisie. Son administration demande beaucoup de prudence. On doit commencer par des doses très-légères, et observer soigneusement son action sur le tube digestif.

J'ai employé les jeunes bourgeons de clématite fraîchement cueillis, à la dose de l à 3 gr., suivant l'âge, en infusion dans 150 à 200 gr. d'eau bouillante, avec addition d'un peu de semences d'anis. Cette dose, prise en trois fois à une heure d'intervalle, a produit chez six malades de cinq à huit évacuations alvines assez abondantes, sans coliques violentes. Une légère infusion de guimauve était administrée par tasses pour en favoriser l'effet. Ce purgatif m'a paru agir à peu près comme la gratiole. Il est, suivant la dose, cathartique, ou drastique. Les feuilles sèches, à petite dose, en décoction dans un litre d'eau à prendre par tasses, ont produit un effet diurétique très-prononcé dans un cas d'anasarque, suite de fièvre intermittente automnale négligée, chez un homme de trente et un ans, habitant le marais de Fréthun, près de Calais. L'œdème s'est complètement dissipé en dix jours.

Les Annales de la Société médico-chirurgicale de Liège (1863) contiennent une étude complète sur les propriétés diurétiques de cette plante et sur son emploi dans les hydropisies, l'albuminurie, etc.

J'ai employé la clématite à l'extérieur pour produire la vésication ; elle a un effet très-prompt et dont on peut tirer un grand parti à la campagne. Les mendiants profitent de cette propriété vésicante pour se faire des ulcérations, de là le nom d’herbe aux gueux, vulgairement donné à cette plante. On l'a mise en usage comme rubéfiante dans le rhumatisme et la goutte. Nicolas Cheneau appliquait les feuilles broyées sur les pieds des goutteux. Les habitants des îles Hébrides, au rapport de Haller, remédient aux douleurs de tête et à celles des membres de la même manière.

J ai usé avec avantage de la décoction des feuilles de clématite comme détersive dans les ulcères sordides, atoniques et scrofuleux ; elle déterge puissamment et promptement. Après son action la cicatrisation s'opère avec plus de rapidité. Les paysans se guérissent quelquefois de la gale par des frictions avec de l'huile dans laquelle cette plante a été broyée et macérée. Ces frictions peuvent exciter vivement la peau, l'enflammer, et donner lieu même à un mouvement fébrile plus ou moins vif.


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La vertu antipsorique de la clématite était connue des anciens ; Pline, Dioscoride et Galien en ont parlé. Vicari, médecin d'Avignon[1], Schwilgué la citent. Curtel (in Wauters) employait l'huile dans laquelle on avait fait bouillir un nouet d'écorce intérieure de cette plante ; il faisait frictionner tout le corps avec le nouet près d'un feu clair ; après la deuxième, troisième ou quatrième friction, une éruption générale assez pénible était produite mais en huit ou dix jours on était débarrassé de la gale, même la plus invétérée.

Il est à regretter que les médecins aient laissé tomber dans l'oubli une plante aussi énergique, et qui, bien étudiée dans ses effets, peut être d'un grand secours à la thérapeutique.

(Les rameaux frais sont introduits sous la peau, en médecine vétérinaire, comme moyen révulsif.)

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  1. Mémoires de la Société royale de médecine, t. III, p. 186.